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Parma
Teatro Regio
09/26/2024 -  et 6*, 13, 17 octobre 2024
Giuseppe Verdi : Macbeth
Ernesto Petti (Macbeth), Lidia Fridman (Lady Macbeth), Michele Pertusi*/Riccardo Fassi (Banquo), Luciano Ganci (Macduff), David Astorga (Malcolm), Natalia Gavrilan (La Comtesse), Rocco Cavalluzzi (Un médecin), Eugenio Maria Degiacomi (Un serviteur, Un sicaire, Premier fantôme), Agata Pelosi (Deuxième fantôme), Alice Pellegrini (Troisième fantôme)
Coro del Teatro Regio di Parma, Martino Faggiani (préparation), Filarmonica Arturo Toscanini, Orchestra giovanile della Via Emilia, Roberto Abbado (direction musicale)
Pierre Audi (mise en scène), Michele Taborelli (décors), Robby Duiveman (costumes), Jean Kalman, Marco Filibeck (lumières), Pim Veulings (chorégraphie)


(© Roberto Ricci)


Le Festival Verdi de Parme propose cette année la version française de Macbeth, une œuvre quasiment inédite puisqu’il s’agirait, si l’on en croit le programme de salle, de la toute première production scénique de l’époque moderne. En 1865, soit près de vingt ans après la création de l’ouvrage à Florence (1847), le Théâtre Lyrique de Paris demande à Verdi d’adapter Macbeth pour la capitale française. Le compositeur s’exécute en procédant à plusieurs modifications, parmi lesquelles l’air de Lady Macbeth de l’acte II, le duo Lady Macbeth/Macbeth de l’acte III, la scène des apparitions des rois toujours à l’acte III ou encore la scène finale, où l’air de Macbeth est remplacé par un chœur célébrant la victoire. En outre, conformément aux règles imposées par le grand opéra français, Verdi ajoute trois scènes de ballet. C’est donc un compositeur au faîte de ses moyens qui retravaille un de ses opéras de jeunesse. Sans surprise, la version française se révèle, sur de nombreux points, supérieure à l’original italien, si bien que plusieurs pages sont retraduites en italien. L’édition italienne définitive de Macbeth sera ainsi présentée à la Scala en 1874 ; c’est cette version qui est désormais le plus souvent proposée sur les scènes lyriques. La version française avait été initialement programmée à Parme en 2020 déjà, mais, pour des raisons liées à la pandémie de covid, l’ouvrage a été donné en forme de concert, dans un parc de la ville, avec Ludovic Tézier dans le rôle‑titre. Un enregistrement témoigne de cette soirée.


Ce Macbeth français a été confié à Pierre Audi, qui livre un spectacle d’une grande sobriété et parfaitement fluide, un spectacle bien ficelé mais un peu plat. Dans le programme de salle, le metteur en scène mentionne l’affaire Dreyfus, Sarah Bernhardt ou encore les théâtres baroques, mais aucune de ces références ne semble transparaître dans la production. La première partie se déroule dans un décor répliquant le Teatro Regio, théâtre dans le théâtre donc, dans une atmosphère sombre et oppressante. Les chanteurs et les choristes sont tous vêtus de noir, les sorcières en robes et les messieurs en costumes et hauts‑de‑forme. Pierre Audi s’est tout particulièrement attaché à la relation Lady Macbeth/Macbeth, ce dernier étant clairement sous la coupe de sa femme, une soumission accentuée par la différence de stature entre les deux interprètes, la chanteuse étant plus grande que le chanteur. Une trappe au milieu du plateau fait apparaître et disparaître les personnages et permet de dissimuler les crimes, qu’on ne voit jamais sur scène. Le décor et l’esthétique de la seconde partie sont entièrement différents : l’intrigue se joue entre des grilles métalliques suspendues aux cintres, dans un superbe jeu de lumières cette fois, allant du blanc au rouge en passant par le bleu et le vert. Dans les scènes de ballet, Macbeth et sa Lady sont doublés par des danseurs, Lady Macbeth étant même détriplée. Sobriété, simplicité et fluidité, tels sont les maîtres‑mots de cette production.

Les chanteurs principaux ne rendent malheureusement pas justice à la traduction française de Charles Nuitter et Alexandre Beaumont, à l’exception de Michele Pertusi dans le rôle de Banquo. Sa diction est impeccable, en raison sûrement de sa longue fréquentation des rôles français (on pense notamment à Philippe II et à Guillaume Tell). De plus, le chant est noble et élégant, avec un superbe legato, quand bien même le timbre a un peu perdu de son mordant et de sa patine avec le temps. Lidia Fridman fait forte impression en Lady Macbeth, avec sa stature svelte et élancée, mais aussi avec son aisance vocale, ses aigus atteints avec facilité, ses vocalises acérées et ses accents péremptoires. Léger bémol : son timbre plutôt clair ne lui permet pas de traduire toute la noirceur du personnage. Et la scène du somnambulisme, le grand moment de l’opéra, ne dégage guère d’émotion, même si toutes les notes sont là. Ernesto Petti incarne un Macbeth dominé par sa Lady, vulnérable et dépassé par les événements ; le chant est extrêmement bien projeté, avec un sens évident du phrasé, quand bien même il ne s’embarrasse pas de subtilités. En Macduff, Luciano Ganci force quelque peu ses moyens, livrant un chant vaillant mais peu nuancé. Dans la fosse, à la tête de la Filarmonica Arturo Toscanini, Roberto Abbado propose une lecture particulièrement théâtrale et tendue, une lecture transparente et précise aussi, avec un sens évident de l’impulsion rythmique et des couleurs. Voilà une rareté qui méritait d’être exhumée. L’année prochaine, Parme proposera l’édition italienne de Macbeth de 1847, une rareté elle aussi.



Claudio Poloni

 

 

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