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Triste hommage

Oviedo
Claustro del edificio histórico de la Universidad
08/21/2024 -  
Wolfgang Amadeus Mozart : Die Entführung aus dem Serail, K. 384 : Ouverture – Symphonie n° 35 en ré majeur « Haffner », K. 385
Joseph Haydn : Concerto pour trompette en mi bémol majeur, Hob. VIIe:1

Antonio Soriano (trompette)
Oviedo Filarmonía, Lucas Macías (direction)


(© Stéphane Guy)


Il fut un temps où la vie musicale à Oviedo était encore intense durant la période estivale. On pouvait assister à de multiples concerts de musique de chambre dans les cloîtres de la cathédrale ou du musée archéologique, en général de grande qualité ; plus récemment, l’orchestre de la capitale de la Principauté des Asturies (OFIL) offrait même plusieurs concerts au long du mois d’août (huit en 2020 !). Tout ceci paraît bien lointain. Cette année, en août, seuls deux concerts sont proposés par cet orchestre sous la direction de son chef (depuis 2018). Il y a là une situation un peu attristante pour les mélomanes des environs ou de passage, d’autant que la ville organise par ailleurs des spectacles de musique ou de danse folkloriques dans ses rues et parcs, répétitifs jusqu’à la nausée.


Mais il vaut mieux deux concerts que rien.


Sous l’œil sinistre du fondateur de l’Université d’Oviedo, le premier d’entre eux est d’emblée dédié à Ana Aguirre, violoniste du rang depuis la création de l’orchestre il y a vingt‑cinq ans et décédée prématurément le 6 août à l’âge de quarante‑neuf ans. Le chef, le hautboïste Lucas Macías (qui dirige aussi l’Orchestre de la ville de Grenade), arrive ainsi sur le podium une rose blanche à la main, prend la parole pour lui rendre hommage en rappelant ses hautes qualités professionnelles et humaines, salue sa famille présente et dépose la fleur sur un pupitre des seconds violons dans un moment d’intense émotion pour toute l’assistance. L’hommage est complété par une interprétation, hors programme, de l’Adagietto de la Cinquième Symphonie (1902) de Gustav Mahler (1860‑1911), où la tristesse l’emporte malheureusement sur l’urgence et la cohérence des cordes.



L. Macías (© Stéphane Guy)


A l’issue, le chef ne se retourne pas et parvient à imposer une minute de silence que tout le monde comprend compte tenu des circonstances. Mais l’amour de la musique doit l’emporter. Suit donc l’Ouverture de L’Enlèvement au sérail (1782) de Wolfgang Amadeus Mozart (1756‑1791). Le contraste est évidemment saisissant. Le chef, qui dirige tout de mémoire et avec une grande économie gestuelle, change d’univers et offre une lecture somme toute équilibrée de l’œuvre mozartienne, avec peut‑être une pointe de gaité un peu feinte mais sans traits grossiers. A l’issue, il embrasse chaleureusement et ostensiblement le mari de la violoniste défunte tandis que le public manifeste autant sa reconnaissance pour ce beau moment musical que son respect pour la douleur palpable des musiciens.


Quelques instrumentistes quittent alors discrètement l’orchestre, du côté des percussions, et Antonio Soriano, trompettiste de l’OFIL, fait son entrée pour le célèbre Concerto pour trompette (1796) de Joseph Haydn (1732‑1809). Il lui faut une sacrée concentration pour ne pas être perturbé par le son des cloches alentour, le bruit des mouettes – Oviedo est à vingt‑cinq kilomètres de la côte cantabrique et certaines persistent à s’y égarer – et l’insupportable musique de rue que personne ne semble avoir tenté ou en tout cas réussi à faire taire juste à côté. Le deuxième mouvement est d’une belle élégance et la tenue des cordes dans le dernier permet au chef d’obtenir un dynamisme tout à fait communicatif, le soliste dominant indéniablement le sujet par sa virtuosité. Devant les applaudissements, Antonio Soriano offre en bis les trois derniers mouvements de la Première Sonate pour trompette et orgue (1678) de Giovanni Buonaventura Viviani (1638‑1692) en compagnie du violoncelliste Gabriel Urena. La trompette est brillante mais le violoncelle est à la peine et d’une justesse toute relative. La prestation ne parvient guère à faire oublier la version originale pour orgue car l’interprétation pâtit d’un sérieux déséquilibre.


On trouvera davantage de cohésion dans la Symphonie « Haffner ». Aucun pupitre ne déçoit en effet dans sa lecture, finalement assez théâtrale. Le dernier mouvement est notamment particulièrement réussi.


Le moment musical était court – une heure – mais le concert, d’un classicisme à toute épreuve (ouverture, concerto, symphonie), ne pouvait qu’illuminer cette journée particulièrement maussade où l’on pouvait se demander à chaque instant si la prestation n’allait pas être annulée pour cause de pluie, épée de Damoclès fréquente pour les concerts en plein air.


Prochain concert de l’OFIL, vendredi 23 août, au même endroit, sous la même direction du chef titulaire Lucas Macías pour un concerto pour alto de Hoffmeister ou de Stamitz – les choses ne sont pas claires – avec Rubén Menéndez, premier alto de l’OFIL, et la Pastorale de Ludwig van Beethoven. Une autre occasion de mise en valeur d’un musicien de l’orchestre à ne pas rater en ces temps de disette musicale aux Asturies.


Le site de Lucas Macías
Le site de la Philharmonie d’Oviedo



Stéphane Guy

 

 

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