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Un ouvrage injustement oublié

Pesaro
Auditorium Scavolini
08/07/2024 -  et 11, 14*, 19 août 2024
Gioachino Rossini : Bianca e Falliero
Nicolò Donini (Priuli), Dmitry Korchak (Contareno), Giorgi Manoshvili (Capellio), Aya Wakizono (Falliero), Jessica Pratt (Bianca), Carmen Buendía (Costanza), Claudio Zazzaro (Ufficiale, Usciere), Dangelo Díaz (Cancelliere)
Coro del Teatro Ventidio Basso, Giovanni Farina (préparation), Orchestra Sinfonica Nazionale della Rai, Roberto Abbado (direction musicale)
Jean-Louis Grinda (mise en scène), Rudy Sabounghi (décors et costumes), Laurent Castaingt (lumières)


(© Amati Bacciardi)


Comme de nombreux autres opéras du maître de Pesaro, Bianca e Falliero tombe rapidement dans l’oubli après sa création, avant de revoir le jour dans le cadre du Festival Rossini (Rossini Opera Festival, ROF). On ne dira jamais assez l’importance de la manifestation et de la Fondation Rossini dans l’immense travail de redécouverte des partitions du compositeur. Représenté pour la première fois en 1819 à la Scala de Milan, le melodramma per musica qu’est Bianca e Falliero se situe entre La donna del lago et Maometto II. Le succès est manifeste, avec pas moins de trente‑neuf représentations durant la même saison. L’ouvrage sera ensuite donné pendant une vingtaine d’années sur plusieurs grandes scènes italiennes et étrangères avant de disparaître. Ce n’est qu’en 1986 qu’il est exhumé à Pesaro, avec une distribution superlative (Katia Ricciarelli, Marilyn Horne et Chris Merritt). Le spectacle est repris en 1989, avec une affiche tout aussi alléchante (Lella Cuberli, Martine Dupuy et toujours Chris Merritt). Une nouvelle production est étrennée à Pesaro en 2005, qui ne réussit pas cependant à faire oublier les représentations précédentes. La production de cette année est donc la troisième dans la ville natale de Rossini.


Ailleurs, que ce soit en Italie ou à l’étranger, c’est le calme plat, ou presque, l’œuvre ne suscitant guère l’intérêt des directeurs d’opéra. Dommage, car malgré quelques longueurs, elle contient des passages magnifiques. Adapté de la pièce française Les Vénitiens ou Blanche et Montcassin (1798) d’Antoine-Vincent Arnault, le livret, très simple, de Felice Romani narre les querelles qui opposent deux familles rivales au XVIIe siècle à Venise : Bianca, fille de Contareno, doit épouser le riche Capellio, mais elle est aime Falliero. Après bien des rebondissements, le père accepte finalement que sa fille épouse son amoureux et tout est bien qui finit bien.


Cette nouvelle production de Bianca e Falliero a été confiée à Jean‑Louis Grinda, lequel fait pour l’occasion ses débuts à Pesaro. Le metteur en scène français signe un spectacle épuré et stylisé, plutôt statique. Il a choisi de transposer l’action dans les années 1950‑1960, une période qu’on reconnaît immédiatement grâce aux costumes de Rudy Sabounghi, qui signe également les décors mobiles, qui s’assemblent et se défont pour représenter les différentes pièces de la demeure de Contareno puis la salle du tribunal où est jugé Falliero, avec pour toile de fond la basilique Saint‑Marc. Les splendides lumières de Laurent Castaingt confèrent des teintes pastel à la Cité des Doges.


L’atout principal de ces représentations de Bianca e Falliero est la Bianca de Jessica Pratt. La soprano déploie une technique impeccable, avec des vocalises hors pair et un chant à la large gamme dynamique, qu’il s’agisse de pianissimi, de crescendi ou encore de diminuendi. L’aigu est tout simplement splendide, avec notamment un mi bémol final absolument phénoménal de justesse et de puissance, après près de quatre heures de représentation. Le Falliero d’Aya Wakizono est un cran en dessous. La mezzo‑soprano japonaise est, elle aussi, une styliste exemplaire, mais elle ne possède pas les accents véhéments et tranchants ainsi que la veine dramatique associés à son rôle de chevalier. Pour une fois, le ténor a ici un rôle de « méchant » : le Contareno de Dmitry Korchak est un régal, avec son émission sûre et ses vocalises précises et acérées. Giorgi Manoshvili marque son rôle d’époux rejeté par sa voix sombre et puissante. A la tête de l’Orchestre symphonique national de la RAI, Roberto Abbado propose une direction ample et mesurée, laissant respirer la musique et le chant et faisant entendre chaque détail, mais jamais au détriment de l’action dramatique. A la fin de la représentation, tous les protagonistes sont chaleureusement applaudis, avec une ovation pour Jessica Pratt.



Claudio Poloni

 

 

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