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Abstraction lyrique

Gers
Eauze (Arènes Nimeno II)
08/15/2024 -  et 16, 19, 21 juillet (Soustons), 20 octobre (Brunoy) 2024
Wolfgang Amadeus Mozart : Die Zauberflöte, K. 620 (arrangement Jonathan Lyness)
Matthieu Toulouse (Sarastro), Mark Van Arsdale (Tamino), Andoni Etcharren (Sprecher, Zweiter Priester, Zweiter Geharnischter), Marlène Assayag (Königin der Nacht), Sonia Menen (Pamina), Pauline Jolly (Erste Dame), Olga Bystrova (Zweite Dame), Aviva Manenti (Dritte Dame), Lysandre Châlon (Papageno), Morgane Bertrand (Pagagena), Alfred Bironien (Monostatos), Fabio Sitzia (Erster Priester, Erster Geharnischter), Elie Marmier, Léna Smaili, Louise Casamayou (Knaben), Nathalie Schaaff, Alexis Brison (chœur)
Orchestre Opéra Eclaté, Gaspard Brécourt (clavier, direction musicale)
Eric Perez (mise en scène), Patrice Gouron (décors), Joël Fabing (lumières), Jean‑Michel Angays (costumes)


(© Vincent Lajus)


A la faveur d’une météo redevenue clémente, les arènes d’Eauze peuvent accueillir, en collaboration avec l’Opéra des Landes, la reprise de la production de La Flûte enchantée créée à Saint‑Céré voici quinze ans. On retrouve donc avec plaisir le travail d’Eric Perez, fidèle aux deux dimensions parfois difficiles à concilier du Singspiel de Mozart, symbolique et ludique.


Pour ce qui est des symboles, la sobriété de la scénographie conçue par Patrice Gouron a même quelque chose d’abstrait : des cadres parallélépipédiques figurent temples, portails et tours mais peuvent également servir de support à un polyptique (portrait de Pamina), à des néons, à un miroir ou à des panneaux colorés. De même, des masques suffisent à évoquer le serpent qui attaque Tamino puis les bêtes sauvages que charme sa flûte. La dimension initiatique du livret n’est pas du tout éludée, les épreuves du feu et de l’eau étant ainsi clairement identifiées et représentées. Le spectacle décrit un cheminement vers la lumière : progressivement retournées, les quarante‑neuf cases en noir et blanc du damier prennent de vives nuances, comme les costumes des deux initiés qui se colorent à la Mondrian au fur et à mesure de l’action. Davantage que l’opposition manichéenne entre le Bien (Sarastro et les prêtres) et le Mal (la Reine de la nuit, les trois Dames et Monostatos), la dramaturgie réoriente le propos autour la volonté des deux héros d’accéder à la connaissance de soi et à la sagesse, démarche soutenue par l’ensemble des autres personnages, un peu à la manière du Mariage du solstice d’été de Tippett. Le chœur final prend ainsi l’allure d’un traditionnel lieto fine, où l’ensemble des protagonistes font face au public pour célébrer à l’unisson l’heureux dénouement.


Mais la dimension ludique et comique ne s’en trouve nullement obérée : avec les bouffonneries de Papageno et la chorégraphie déjantée de Monostatos et des esclaves ensorcelés par le son des clochettes, les spectateurs rient ou sourient, d’autant que les dialogues parlés, assez largement réécrits, sont en français, ce qui apparaît opportun car les numéros chantés, quant à eux, ne sont pas surtitrés.


La partition, elle aussi, est adaptée. Il faut tout faire avec seulement quatorze chanteurs adultes, qui doivent dès lors tous contribuer aux parties chorales, quitte à ce que le chœur des prêtres du second acte devienne purement instrumental. Grâce au travail de Jonathan Lyness, un compositeur anglais spécialiste de ce type d’arrangements, l’orchestre est réduit à quinze musiciens (neuf cordes, quatre bois, cor et timbales), le chef recourant à un clavier électronique pour la flûte et le glockenspiel de Papageno.


Sonia Menen n’est pas très loin d’égaler le souvenir laissé par Marion Tassou en 2009 : la soprano française est une Pamina de chair et de sang, moins évanescente que de coutume, mais son air du second acte n’en est pas moins poignant. En Tamino, Mark Van Arsdale possède le timbre, l’intonation et la musicalité adéquats ; en outre, le ténor américain restitue très convenablement les textes parlés dans une langue qui n’est pas la sienne. Marlène Assayag donne l’impression d’avancer avec prudence, mais elle se sort bien des deux airs de la Reine de la nuit, notamment celui du second acte. Bon musicien, Matthieu Toulouse pèche en Sarastro par des graves manquant par trop de corps et de projection. Le Papageno de Lysandre Châlon remporte tous les suffrages : comédien virevoltant et charismatique, il chante en outre avec style et sa Papagena, Morgane Bertrand, n’est pas en reste pour ce qui est de la vis comica, ce qui nous vaut un duo très en verve. Excellent ténor de caractère, Alfred Bironien se défoule de façon très convaincante en Monostatos. On regrettera en revanche que l’allemand insuffisamment idiomatique d’Andoni Etcharren ne soit pas au niveau de sa prestation vocale dans le rôle de l’Orateur. Les deux trios sont de qualité très inégale : les Dames se tirent remarquablement d’affaire tandis que les Garçons, élèves du Conservatoire des Landes, semblent trop souvent en mal de justesse.


Dans une acoustique qui se révèle pleinement satisfaisante, Gaspard Brécourt dirige parfois de manière un peu trop sèche mais toujours avec beaucoup de conviction le petit Orchestre Opéra Eclaté, qui comprend quelques belles individualités, à commencer bien sûr par la flûte.


Le site de Gaspard Brécourt
Le site de Jonathan Lyness
Le site de Marlène Assayag
Le site de Morgane Bertrand



Simon Corley

 

 

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