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Les Audacieux

Normandie
Deauville (Salle Elie de Brignac‑Arqana)
04/13/2024 -  
Joseph Haydn : Quatuor n° 79 en ré majeur, opus 76 n° 5
Ludwig van Beethoven : Quatuor à cordes n° 14 en do dièse mineur, opus 131
Gabriel Fauré : Quintette avec piano n° 1 en ré mineur, opus 89

Quatuor Arod : Jordan Victoria, Alexandre Vu (violon), Tanguy Parisot (alto), Jérémy Garbarg (violoncelle) ; Kojiro Okada (piano)


J. Victoria, A. Vu, T. Parisot, J. Garbarg (© Stéphane Guy)


Le festival de Pâques de musique de chambre de Deauville ressemble presque cette année à la Biennale de quatuors à cordes parisienne. Pas moins de trois ensembles se produisent en effet : le Quatuor Arod, le Quatuor Hanson et le Quatuor Hermès. Du très haut niveau à chaque fois.


Ce soir, le quatrième de la série de huit concerts de la vingt‑huitième édition du festival, c’est le Quatuor Arod qui opère. Il était naturel qu’il passe à Deauville, non loin des haras, à quelques mètres de l’hippodrome et dans la salle qui sert habituellement aux ventes de chevaux. Fondé en 2013, il a en effet choisi comme nom celui d’un cheval inventé par Tolkien pour Le Seigneur des Anneaux.


Il consacre la première partie du concert à la première Ecole de Vienne et la seconde à un compositeur qui incarne bien l’esprit français fin de siècle (dix‑neuvième). Les Arod débutent ainsi le concert par l’avant‑dernier des six quatuors de l’Opus 76 (1799) de Joseph Haydn (1732‑1809). Son Allegretto initial est interprété avec toute la finesse et l’esprit souhaitables mais c’est la beauté du Larghetto qui frappe. Les musiciens y déploient un superbe chant où on note un fort beau passage de relais entre l’alto et le violoncelle. Le Menuet bénéficie de la nervosité et de l’espièglerie du violoncelle de Jérémy Garbarg, absolument remarquable de bout en bout. Enfin, l’œuvre s’achève par un Presto où gaîté et insouciance aboutissent à une coda pleine de vigueur.


Mais les Arod n’en restent pas là et s’attaquent avec l’audace de la jeunesse à un des plus grands chefs‑d’œuvre du répertoire pour quatuor à cordes, l’Opus 131 du disciple de Haydn en matière de quatuor à cordes, celui qui a poussé la forme quatuor à des cimes inédites et qui continuent de fasciner : Ludwig van Beethoven (1770‑1827). Les musiciens n’ont pas froid aux yeux car l’œuvre aux mouvements dûment enchaînés est un monument d’une quarantaine de minutes d’une très haute l’exigence technique et qui ne laisse pas de répit. Les Arod relèvent le défi, ne lâchent rien et ne nous lâchent pas. Ils passent avec aisance d’un climat à un autre dans cette œuvre si composite, celle d’un cyclothymique au soir de sa vie qui sait écrire pour les temps à venir. Les aigus du premier violon sont parfois affectés par quelques stridences mais c’est encore une fois le violoncelle qui impressionne par sa justesse de ton, son élégance et son expressivité. Jérémy Garbarg n’écrase jamais son archet et la tension est toujours là. La bande des quatre sait relancer le discours en permanence. Il s’en faut ainsi de peu que le public applaudisse après le Presto mais les musiciens repartent pour un Adagio à pleurer avant un Allegro final superbe.


Le Premier Quintette (1906) de Gabriel Fauré (1845‑1924) qui suit en seconde partie n’est en rien comparable. Un nouveau venu, le jeune pianiste bordelais Kojiro Okada (né en 1999) se joint pour l’occasion au Quatuor Arod. L’œuvre dans laquelle tout le monde joue quasiment sans cesse en même temps, souvent à l’unisson du côté des cordes, ne lui laisse malheureusement pas beaucoup d’espace d’expression. Son jeu n’est de surcroît pas toujours d’une grande clarté dans ce fonds pianistique permanent, assez informe et lisse. L’Adagio est assurément élégiaque mais on finit par s’ennuyer. Heureusement, un Final enjoué conclut l’œuvre. A nouveau, quel violoncelle !


Suite de la « Biennale » deauvillaise, dimanche 14 avril avec le Quatuor Hermès. La « concurrence » est rude.



Stéphane Guy

 

 

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