About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Tout en expressivité

Paris
Athénée - Théâtre Louis‑Jouvet
02/26/2024 -  
Benjamin Britten : Canticle I « My Beloved is Mine and I am his », opus 40 – Canticle V « The Death of Saint Narcissus », opus 89 – Canticle IV « The Journey of the Magi », opus 86 – Canticle III « Still falls the Rain », opus 55 – Canticle II « Abraham and Isaac », opus 51
Allan Clayton (ténor), George Humphreys (baryton), Christopher Lowrey (contre‑ténor), Harriet Walter (récitante)
Richard Watkins (cor), Olivia Jageurs (harpe), Julius Drake (piano)


Dans le cadre des « Lundis musicaux à l’Athénée », l’ensemble Le Balcon propose l’un des programmes les plus audacieux de la saison autour des cinq cantiques composés par Benjamin Britten tout au long de sa carrière, de 1947 à 1974. Rarement donnés (voir le dernier spectacle parisien qui leur a été consacré, en 2015), ces ouvrages intimistes, à mi‑chemin entre la mélodie et la cantate, mettent en avant le goût inépuisable de Britten pour la poésie, qui l’accompagna dès ses premières compositions, notamment les Quatre Chansons françaises pour soprano et orchestre écrites à seulement 15 ans, sur des poèmes d’Hugo et Verlaine.


Le spectacle invite dès le début à la concentration, lorsque la récitante Harriet Walter rejoint la scène pour lire en anglais (malheureusement sans sous‑titres) le poème ayant servi d’inspiration au premier cantique, My Beloved is Mine and I am his (1947). La soirée sera ainsi rythmée, entre poésies dévoilées par le ton clair de Walter, puis chantées dans les adaptations réalisées par Britten. La scène est légèrement éclairée, grâce aux quelques ampoules réparties autour du piano placé au centre, du fait de son rôle omniprésent (hormis dans le cinquième cantique, dont l’accompagnement est confié à la harpe). Allan Clayton émerge de la pénombre pour nous régaler de ses phrasés finement articulés, où chaque mot est ciselé au service du sens. Déjà interprète du rôle‑titre de Peter Grimes à Garnier l’an passé, le ténor britannique impressionne par sa souplesse dans les changements de registre, se jouant des passages en force comme des réparties plus apaisées avec une égale rondeur, hormis dans le suraigu un rien plus charbonneux. Ca n’est là qu’un détail, tant Clayton apparait comme l’un des meilleurs interprètes de notre temps dans ce répertoire, à juste titre fêté en fin de représentation.


La suite du spectacle fait découvrir les cantiques dans l’ordre inverse de leur composition, du cinquième au deuxième, afin de conclure la soirée par le plus émouvant d’entre eux, dédié au quasi-sacrifice d’Isaac par son père Abraham. Le Cantique V « The Death of Saint Narcissus » (1974) fait initialement valoir une utilisation inattendue de la harpe en accompagnement, avec des verticalités hautes en couleur parfaitement rendues par Olivia Jageurs. Le Cantique IV « The Journey of the Magi » (1971), plus classique, offre ensuite une mise en miroir fascinante des trois voix entremêlées, la plupart du temps en homophonie. Plus sombre, le Cantique III « Still falls the Rain » (1954) fait intervenir le cor dans les teintes graves et marmoréennes, aux côtés du piano. Mais c’est bien entendu le Cantique II « Abraham and Isaac » (1951) qui reste dans les esprits avec sa construction émouvante en arche, où les deux interprètes prennent Dieu pour témoin, avant que ce dernier ne parle littéralement par leur bouche. Proche du sujet expiatoire de Billy Budd, composé à la même période, ce cantique donne à entendre la voix cristalline du contre‑ténor Christopher Lowrey, dans le rôle de l’enfant (tenu à la création par Kathleen Ferrier). Au piano, Julius Drake n’a pas son pareil pour nous plonger dans l’univers expressif de ces petites pièces délicieuses, qui mériteraient de trouver plus souvent le chemin de la scène.



Florent Coudeyrat

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com