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Eblouissant et solennel

Milano
Teatro alla Scala
12/07/2023 -  et 10, 13, 16, 19, 22*, 30 décembre 2023, 2 janvier 2024
Giuseppe Verdi : Don Carlo
Michele Pertusi (Filippo II), Francesco Meli (Don Carlo), Luca Salsi (Rodrigo, marchese di Posa), Jongmin Park (Il Grande Inquisitore, Un frate), Anna Netrebko*/María José Siri (Elisabetta), Elīna Garanca/Veronica Simeoni* (Principessa Eboli), Elisa Verzier (Tebaldo), Rosalia Cid (Una voce dal cielo), Jinxu Xiahou (Il conte di Lerma, Un araldo reale), Huanhong Li (Carlo Quinto), Chao Liu, Wonjun Jo, Huanhong Li, Giuseppe de Luca, Xhieldo Hyseni, Neven Crnić (Deputati fiamminghi)
Coro del Teatro alla Scala, Alberto Malazzi (préparation), Orchestra del Teatro alla Scala, Riccardo Chailly (direction musicale)
Lluis Pasqual (mise en scène), Daniel Bianco (décors), Franca Squarciapino (costumes), Pascal Mérat (lumières), Franc Aleu (vidéo), Nuria Castejón (chorégraphie)


(© Brescia e Amisano/Teatro alla Scala)


Don Carlo, dans la version italienne en quatre actes de 1884 (dite « version de Milan »), a ouvert la saison 2023‑2024 de la Scala. C’est la tradition, la première a eu lieu le 7 décembre, jour de la saint Ambroise, patron de la ville de Milan. Si la partie vocale et musicale du spectacle a fait peu ou prou l’unanimité, la partie visuelle a divisé le public et la critique. Lluis Pasqual a conçu une production traditionnelle, au sens noble du mot, très statique, avec le plus souvent les choristes et les chanteurs immobiles sur le devant de la scène, les bras levés au ciel ou la main sur le cœur. Le spectacle est tout simplement narratif, très premier degré, avec une intrigue d’une parfaite lisibilité, dans des décors particulièrement imposants : un immense retable chargé d’or, au centre duquel trône le roi, et une vaste grille délimitant tour à tour le cloître, les jardins du palais ou la prison, et traduisant l’enfermement physique et psychologique des personnages. Les costumes noirs richement brodés de Franca Squarciapino en imposent eux aussi. Les détracteurs de cette production y ont vu un spectacle passéiste, façon opéra de grand‑papa tel qu’on le pratiquait encore il y a trente ans. Mais aujourd’hui, à l’heure de tant de mises en scène hermétiques et absconses, sans parler des transpositions à tout‑va, un spectacle aussi somptueux et éblouissant est un vrai bonheur ; on aurait donc tort de bouder son plaisir, surtout par les temps qui courent.


La distribution vocale de ce Don Carlo scaligère a, elle, comblé toutes les attentes, ou presque. Francesco Meli a composé un Infant ardent et passionné, mélancolique aussi, aux aigus lumineux ainsi qu’au phrasé et à la diction exemplaires, même si le rôle se situe clairement à la limite de ses possibilités vocales : le chanteur doit parfois forcer ses moyens, qui sont plutôt ceux d’un ténor lyrique. En Elisabeth de Valois, Anna Netrekbo a semblé un peu en retrait dans les trois premiers actes, avec de surcroît une diction pâteuse. Mais le « Tu che le vanità » du dernier acte a été tout simplement superbe, avec une pâte sonore insolente et impressionnante qui a rempli instantanément l’auditoire, de somptueux aigus pianissimo très longuement tenus, dans un souffle de voix, des accents déchirants et des graves sonores. Son air a été très longuement et bruyamment applaudi par les spectateurs, dont certains ont demandé un bis, en vain. Malgré un chant quelque peu monochrome, Luca Salsi a campé un Rodrigo noble et émouvant, au superbe legato et aux accents engagés. Si les années qui passent lui ont ôté le velours de la voix, Michele Pertusi n’en a pas moins séduit en Philippe II par son chant bien conduit et son expressivité, quand bien même son personnage manquait d’autorité. Quoi qu’il en soit, le célèbre « Ella giammai m’amò » a été très applaudi. Remplaçant au pied levé Elīna Garanca, indisposée, Veronica Simeoni, qui ne devait chanter que les deux dernières représentations, a fait davantage que sauver la soirée, incarnant une princesse Eboli très à l’aise scéniquement malgré l’absence de répétitions, au phrasé délicat et à la diction impeccable. En Grand Inquisiteur, Jongmin Park a impressionné par ses graves métalliques et sonores. Et comme toujours dans Verdi, le Chœur de la Scala s’est montré magistral de cohésion et de précision. Dans la fosse, Riccardo Chailly a opté pour une lecture plutôt sombre et solennelle, sobre aussi, tout en retenue, avec des tempi passablement étirés, qui, s’ils ont permis de mettre en valeur la richesse de l’orchestration et la maîtrise technique des musiciens, ont par contre émoussé quelque peu l’intensité dramatique et alourdi le propos. Malgré ces quelques réserves, ce Don Carlo n’en demeure pas moins un spectacle de tout premier plan, d’excellent augure pour la suite de la saison. Une saison – la première véritable saison de Dominique Meyer à la Scala – qui s’annonce captivante.


Le spectacle en intégralité sur le site Arte Concert :






Claudio Poloni

 

 

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