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A la porte de Kiev

Monaco
Monte-Carlo (Auditorium Rainier III)
11/05/2023 -  
Lili Boulanger : D’un matin de printemps
Dimitri Chostakovitch : Concerto pour violon n° 1, opus 77/99
Modeste Moussorgski : Tableaux d’une exposition (orchestration Maurice Ravel)

Viktoria Mullova (violon)
Orchestre philharmonique de Monte‑Carlo, Elias Grandy (direction)


V. Mullova, E. Grandy (© André Peyrègne)


Les minutes les plus douces, fraîches, légères du concert du Philharmonique de Monte‑Carlo ont été celles D’un matin de printemps de Lili Boulanger. On ne joue pas assez cette compositrice qui, dans sa courte vie qui n’a duré que 25 ans, a été traversée par le génie. Son style rappelle Debussy et Fauré. Elle a été première femme à obtenir le Prix de Rome. Elle s’est posée, tel un oiseau léger, sur une branche de l’histoire de la musique puis s’est envolée pour l’éternité.


Après le matin de printemps, l’œuvre d’un hiver sombre était au programme : le Premier Concerto pour violon de Chostakovitch. Il témoigne de la vie du compositeur persécuté par Staline. Dans le troisième mouvement en forme de passacaille, on entend l’orchestre évoquer la noirceur de l’existence sur le rythme du « destin » de Beethoven (trois brèves-une longue), tandis que le violon entonne sa mélodie. Il a l’air de dire : la dureté de ma destinée ne m’empêche pas de chanter ! La grande, la belle, l’admirable Viktoria Mullova, dressée comme une flamme dans une robe rouge, nous a tenus en haleine d’un bout à l’autre de la partition.


Puis ce furent les Tableaux d’une exposition de Moussorgski orchestrés par Ravel. Le jeune chef Elias Grandy, précis, méthodique, prenant des tempos plutôt lents, s’appliquait à mettre en relief tout ce que cette musique contenait de pittoresque. Parfois, penché au‑dessus des musiciens, il s’arrêtait de battre la mesure et, de ses deux mains frémissantes, exhortait son orchestre à redoubler d’intensité. Il faisait penser à un sorcier au‑dessus de son chaudron s’employant à porter sa potion à ébullition.


Les solistes du magnifique orchestre mettaient en relief les images des tableaux : le saxophone (joué par François Leclaircie) un château dans la brume, le tuba (Florian Wielgosik) un char à bœufs, la flûte et la clarinette (Anne Maugue et Marie‑B Barrière‑Bilote) des pépiements de poussins, la trompette (Matthias Persson) les jérémiades d’un avare, le basson (Franck Lavogez) les sortilèges d’une sorcière. Le dernier tableau est celui de « La Grande Porte de Kiev ». L’orchestre explosa de couleurs dans un foisonnement de coups de cloches et de cymbales. Et tandis que cette porte de Kiev était entourée de ces splendeurs orchestrales, l’autre, la vraie, était entourée des fracas de la guerre qu’une horrible actualité nous impose. Ainsi va la vie...



André Peyrègne

 

 

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