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Un prince sort du placard

Lausanne
Mézières (Théâtre du Jorat)
06/09/2023 -  et 13 (Cossonay), 16* (Bussigny), 17 (Epalinges), 18 (Gland), 20 (Orbe), 24 (Nax), 25 (Renens), 27 (Bex), 28 (Ecublens), 30 (Vallorbe) juin, 1er (Prilly), 4, 5 (Lausanne), 6 (Aubonne), 7 (Cully), 8 (Martigny) juillet 2023
Jacques Offenbach : L’Ile de Tulipatan
Rémi Ortega (Cacatois XXII), Emma Delannoy (Alexis), Guillaume Paire (Romboïdal), Laure-Catherine Beyers (Théodorine), Hoël Troadec (Hermosa)
Ensemble instrumental de l’Opéra de Lausanne, Léonard Ganvert (direction musicale)
Gilles Rico (mise en scène), Philippine Ordinaire (décors), Violaine Thel (costumes), Shams Martini (lumières), Jean-Philippe Guilois (chorégraphe, assistant à la mise en scène)


(© Jean-Guy Python)


A Tulipatan souffle un air de modernité puisque les frontières entre les genres sont devenues floues : Alexis, fils de Cacatois XXII, duc et chef suprême de l’île, a des manières que son père juge bien peu viriles, alors qu’Hermosa, fille de Romboïdal, le grand sénéchal, a tout d’un garçon manqué. Qu’à cela ne tienne, les deux jeunes gens sont éperdument amoureux l’un de l’autre, et le seront encore lorsque, par deux coups de théâtre successifs, ils apprendront qu’Alexis est un réalité une fille et qu’Hermosa est un garçon. Reste à le faire savoir à leurs parents, ce qui ne sera pas une mince affaire quand on connaît le caractère ombrageux et susceptible du souverain. Ce dernier décidera finalement de se remarier, pour avoir enfin un fils, un vrai !


L’Ile de Tulipatan, opéra‑bouffe en un acte, est un ouvrage composé en 1868 par un Jacques Offenbach au sommet de la gloire et de son art. C’est ce titre qu’a choisi Eric Vigié, directeur de l’Opéra de Lausanne, pour La Route Lyrique 2023. Pour la septième fois depuis 2010, un spectacle itinérant sillonne la région, tous les deux ans, pour aller à la rencontre du public et permettre à un large éventail de spectateurs de découvrir le travail de l’Opéra dans un cadre estival et décontracté. De surcroît, cette opération de décentralisation unique en son genre offre à des chanteurs et des instrumentistes fraîchement diplômés des écoles supérieures de musique la possibilité de faire leurs premières armes sur une scène et dans une fosse. Voilà une initiative qui mérite d’être saluée.


Eric Vigié a eu la main heureuse en confiant la mise en scène de L’Ile de Tulipatan à Gilles Rico, lequel s’était déjà illustré à Lausanne en signant pour les fêtes de fin d’année 2021 une Auberge du Cheval-Blanc particulièrement réussie. Sa version de l’opéra‑bouffe d’Offenbach est légère, vive et pétillante, sans aucun temps mort, avec des scènes qui s’enchaînent en toute fluidité. Les gags abondent, et c’est vrai qu’on rit souvent, mais le trait est toujours fin, jamais forcé ni vulgaire. L’actualité est aussi bien présente, avec par exemple des allusions au mariage pour tous ou à la réforme des retraites. Le décor (Philippine Ordinaire) est composé de toutes sortes de malles et de valises transformées en placards desquels sortent les personnages de l’intrigue ainsi que de nombreux objets les uns plus hétéroclites que les autres. On signalera également les costumes drôles et originaux de Violaine Thel ainsi que les chorégraphies ébouriffantes de Jean‑Philippe Guilois.


La distribution vocale est parfaitement homogène. Rémi Ortega est un Cacatois XXII cocasse dans son autoritarisme et sa fierté mal placée, trouvant à chaque occasion prétexte à humilier son pauvre sénéchal, campé par un Guillaume Paire irrésistible dans ses tentatives pour garder une certaine contenance, d’autant qu’il est aussi sans cesse rabroué par son épouse Théodorine (Laure-Catherine Beyers), qui le mène à la baguette avec son délicieux accent allemand. Les deux jeunes gens, incarnés par Emma Delannoy et Hoël Troadec, forment un couple d’amoureux frais et touchant. A la tête de l’Ensemble instrumental de l’Opéra de Lausanne spécialement créé pour l’occasion, le chef Léonard Ganvert se montre particulièrement attentif à la cohésion entre la scène et la fosse. Tous les artistes de cette production ont été chaleureusement applaudis. La Route Lyrique 2023 se terminera le 8 juillet, après avoir accosté pas moins de seize fois sur l’île de Tulipatan.



Claudio Poloni

 

 

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