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Le Festin de Balthazar en technisonor Paris Philharmonie 05/30/2023 - et 31* mai 2023 Dimitri Chostakovitch : Suite pour orchestre de variété n° 1 – Concerto pour violoncelle n° 2, opus 126
William Walton : Belshazzar’s Feast Willard White (baryton-basse), Sol Gabetta (violoncelle)
Chœur de l’Orchestre de Paris, Ingrid Roose, Marc Korovitch (chefs de chœur), Cambridge University Symphony Chorus, Richard Wilberforce (chef de chœur), Orchestre de Paris, Klaus Mäkelä (direction)
K. Mäkelä (© Marco Borggreve)
Vingt‑cinq après le Psaume XLVII de Florent Schmitt, deux ans après le Psaume 80 de Roussel – dont l’Orchestre de Paris, à ses débuts, avait enregistré une superbe version dirigée par Serge Baudo –, Le Festin de Balthazar de Walton déchaîne en 1931 une houle orchestrale et chorale comme, depuis Handel, les aimait l’Angleterre. Créée au Festival de Leeds sous la direction du trop oublié Sir Malcolm Sargent, la partition perpétue et renouvelle toute une tradition d’oratorio, dont le postromantique Elgar était le dernier représentant. Walton, qui aménage librement la tonalité, jusqu’à l’épicer d’accents jazzy pour l’hymne final, convoque toutes les ressources d’un orchestre énorme, riche de nombreuses percussions, pour créer des effets très théâtraux et construire à partir de l’Ancien Testament une rutilante fresque visionnaire qui va de la captivité à la libération des Hébreux. La maîtrise de Klaus Mäkelä à la tête d’un Orchestre de Paris des grands soirs est sidérante. Là où guettent lourdeur et pompiérisme, la direction, d’une parfaite transparence, éclaire et aère le complexe écheveau sonore. Il n’en maintient pas moins une grande tension dans ce récit de l’histoire du festin sacrilège et de la chute du tyran foudroyé par le châtiment divin. Si Walton situe souvent la partie du chœur dans les zones inconfortables de la voix, ceux de l’Orchestre de Paris et de l’Université de Cambridge assurent remarquablement – on ne peut ici reprocher certains aigus tendus, notamment pour l’Alleluia final. Sir Willard White paraît beaucoup moins fatigué que dans Katia Kabanova à Lyon, prenant des accents de vieux « prophète irrité » hugolien dans « Babylon was a great city ». Un mémorable moment de la saison. Avait-on entendu ce Festin à Paris depuis sa première française en 1949, par Roger Désormière et l’Orchestre national ? Klaus Mäkelä pourrait maintenant s’intéresser à Schmitt et à Roussel...
Les Chostakovitch de la première partie, en revanche, s’oublieront assez vite. La Première Suite pour orchestre de variété, d’abord connue sous le titre de Seconde Suite pour orchestre de jazz, assemblage de musiques de ballet ou de film, avec sa célèbre Valse dont la pub s’est emparée, flatte un orchestre virtuose, mais surdimensionné et dirigé pesamment. Le Second Concerto pour violoncelle confirme les qualités et les limites du jeu de Sol Gabetta. On a beau admirer la maîtrise technique, la concentration du jeu, la finesse de la sonorité, force est de constater que malgré l’accompagnement très attentif du chef finlandais dans une partition déjà chambriste, qualifiée par Chostakovitch de « Quatorzième Symphonie avec violoncelle solo », l’interprétation manque de puissance, de tension et de mordant, même si ce Second Concerto est moins sarcastique et plus lyrique que le Premier, comme si, finalement, la violoncelliste argentine n’allait pas tout à fait au fond des notes. En bis, un joli arrangement pour violoncelle et xylophone de « Nana », la berceuse de la Cinquième des Sept Chansons populaires espagnoles de Falla.
Le concert en intégralité sur Arte Concert :
Didier van Moere
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