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Minimaliste Paris Opéra Comique 04/24/2023 - et 26, 28, 30 avril, 2, 4 mai 2023 Georges Bizet : Carmen Gaëlle Arquez (Carmen), Frédéric Antoun (Don José), Elbenita Kajtazi (Micaëla), Jean‑Fernand Setti (Escamillo), Norma Nahoun (Frasquita), Aliénor Feix (Mercédès), François Lis (Zuniga), Jean‑Christophe Lanièce (Moralès), Matthieu Walendzik (Le Dancaïre), Paco Garcia (Le Remendado), Sylvia Bergé (La mère de Don José)
accentus, Christophe Grapperon (chef de chœur), Maîtrise populaire de l’Opéra‑Comique, Clara Brenier (cheffe de chœur), Orchestre des Champs‑Elysées, Louis Langrée*/Sora Elisabeth Lee (direction musicale)
Andreas Homoki (mise en scène), Paul Zoller (décors), Gideon Davey (costumes), Franck Evin (lumières)
G. Arquez (© Stefan Brion)
Trois ans après son report dû à la pandémie de covid‑19, l’Opéra‑Comique peut enfin présenter salle Favart cette Carmen mise en scène par Andreas Homoki et coproduite avec l’Opéra de Zurich.
Mise en scène assez minimaliste qui occupe la grande scène de Favart, nue jusqu’à son mur de fond, juste coupée par un impressionnant rideau de scène rouge et or. On attendait mieux de Homoki, dont on a vu des mises en scène plus originales au Komische Oper de Berlin (dont il fut l’intendant) et surtout son inoubliable Femme sans ombre de Strauss réalisée à Genève en 1992 et présentée à Paris en 1994 au Théâtre du Châtelet. L’idée directrice de cette Carmen qui, pour sa direction d’acteurs, se tient strictement aux indications originales, est un changement de costumes (de Gideon Davey) au fil du temps. Cela commence avec les costumes des bourgeois de la fin du XIXe siècle qui ont pu assister à sa création (dans ce même Opéra‑Comique, en 1875, rappelons‑le), créant une grande confusion car autant soldats que contrebandiers sont habillés pareillement. Puis à l’acte de la montagne, on passe à des costumes de ville du XXe siècle (« costumes de résistants à l’Occupation allemande »), pour virer au débraillé façon XXe aux arènes. Si c’est pour tendre un miroir au(x) public(s) (que les choristes regardent de l’avant-scène quand on se réfère sur la place à « ces gens‑là » puis plus tard en rallumant les lumières de salle, l’idée a beaucoup servi...
Gaëlle Arquez, on le savait après sa participation à la production de Calixto Bieito à l’Opéra‑Bastille fin 2022, possède les moyens vocaux et la projection, la truculence, la présence scénique du rôle‑titre, dont elle assure parfaitement tous les morceaux de bravoure. Et est très crédible dans les dialogues parlés – l’opéra est donné dans sa version « opéra comique » d’après l’édition critique de Richard Langham Smith (Editions Peters), à l’orchestration allégée. Ce n’est pas le cas de Frédéric Antoun, qui, après avoir déçu dans Gérard de Lakmé sur la même scène l’automne dernier, donne de Don José une interprétation assez fade, ne faisant pas évoluer suffisamment l’étoffe de son personnage au fil des actes. Si les chœurs accentus et de la Maîtrise populaire de l’Opéra‑Comique sont remarquables de justesse et de rythme, deux chanteurs déparent une distribution assez homogène par ailleurs. L’Escamillo de Jean‑François Setti a certes du volume mais sa ligne de chant et son émission donnent constamment froid dans le dos et la Micaëla d’Elbenita Kajatzi passe en force avec une voix peu séduisante et trop maigre pour le rôle. Touche d’originalité, la lettre de la mère de Don José est lue en voix off par la comédienne française Sylvia Bergé.
La direction de Louis Langrée à la tête de l’Orchestre des Champs‑Elysées (après le forfait de l’Orchestre symphonique de Shanghai et son chef Long Yu à cause du covid), offre de beaux moments (les préludes des troisième et quatrième actes sont poétiques à souhait) mais sonne un peu trop énergique dans nombre de scènes où l’action est vive. Cela tient beaucoup à l’acoustique et à l’équilibre quasi insoluble entre la fosse, la scène et la salle de ce théâtre aux proportions pourtant idéales.
Le spectacle en intégralité sur le site Arte Concert :
Olivier Brunel
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