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Les Contes sauvés par Hoffmann

Milano
Teatro alla Scala
03/15/2023 -  et 18*, 21, 24, 28, 31 mars 2023
Jacques Offenbach : Les Contes d’Hoffmann
Federica Guida (Olympia), Francesca Di Sauro (Giulietta), Eleonora Buratto (Antonia), Greta Doveri (Stella), Vittorio Grigolo (Hoffmann), Luca Pisaroni (Lindorf, Coppelius, Docteur Miracle, Dapertutto), Marina Viotti (Nicklausse, La Muse), Hugo Laporte (Hermann, Schlémil), François Piolino (Andrés, Cochenille, Frantz, Pitichinacchio), Alfonso Antoniozzi (Luther, Crespel), Yann Beuron (Spalanzani), Néstor Galván (Nathanael), Alberto Rota (Une voix)
Coro del Teatro alla Scala, Alberto Malazzi (préparation), Orchestra del Teatro alla Scala, Frédéric Chaslin (direction musicale)
Davide Livermore (mise en scène), Giò Forma (décors), Gianluca Falaschi (costumes), Antonio Castro (lumières), Compagnia Controluce (théâtre d’ombres)


(© Brescia e Amisano/Teatro alla Scala)


La nouvelle production des Contes d’Hoffmann qui vient d’être présentée à la Scala ne va pas rester dans les annales, tant elle est indigente sur le plan scénique. Heureusement, elle est sauvée du naufrage par la direction musicale et par les chanteurs.


Le spectacle conçu par Davide Livermore étonne tout d’abord par sa sobriété (conséquence des mesures d’économies à la suite de la réduction de la subvention de la ville de Milan  ) : il se déroule la plupart du temps sur un plateau nu, peuplé seulement de quelques accessoires, alors que le metteur en scène a habitué le public milanais à une débauche de technologie et de structures complexes, comme récemment dans le Macbeth qui a ouvert la saison 2021‑2022. Quoi qu’il en soit, le concept général est confus, sans idée maîtresse ni fil conducteur : les micros que tiennent les personnages, leurs mouvements incessants et leurs danses donnent à penser que le spectacle est une sorte de comédie musicale ou un show. Hoffmann et Nicklausse sont chacun affublés d’un double. On voit ainsi le double du héros tapant sur une machine à écrire ou affalé sur celle‑ci, ivre mort. Un double d’Hoffmann est aussi étendu dans un cercueil ; durant l’Epilogue, Stella dépose des roses sur son corps, ce qui a pour effet de réveiller le mort, qui se relève pour prendre des mains de chacun des personnages les feuillets de ses propres contes, les rassembler et les tendre au poète. Le spectacle donne l’impression que le metteur en scène a voulu compenser l’absence de décors par une multitude d’idées et de trouvailles, pas nécessairement des plus inspirées. Le Mal (Lindorf, Coppélius, Dapertutto et le Docteur Miracle) apparaît toujours accompagné d’un nain fumant un cigare et portant un haut‑de‑forme. Plusieurs personnages sont armés d’un pistolet et tirent (ou font semblant de tirer) sur le héros. L’ombre géante de l’arme apparaît d’ailleurs aussi sur un grand écran au fond de la scène. Le noir et le blanc dominent : Hoffmann et Nicklausse portent un smoking blanc, alors que les différents personnages incarnant le Mal, Antonia et les choristes sont en noir, de même qu’une multitude de figurants, lesquels vont par exemple brandir quantités de poupées mécaniques et contraindre Olympia à chanter. Andrés, Cochenille, Frantz et Pitichinaccio sont des travestis. Durant la Barcarolle, qui est certainement l’un des moments les plus attendus de l’ouvrage, des figurants déboulent bruyamment au parterre et tendent une immense toile vert foncé au‑dessus des spectateurs pour simuler les vagues de la lagune, mais ce faisant, la partie du public qui se trouve dessous ne voit absolument rien. En résumé, une mise en scène fourre‑tout, qui ne convainc guère.


Heureusement, la partie musicale du spectacle offre davantage de satisfactions. A commencer par l’Orchestre de la Scala, qui arbore la forme des grands soirs. A sa tête, Frédéric Chaslin propose une direction dynamique et contrastée, vibrante et énergique, quand bien même elle ne rend pas entièrement justice au raffinement de la partition d’Offenbach et couvre parfois les chanteurs. La distribution est emmenée par le splendide Hoffmann de Vittorio Grigolo, qui est sur scène pratiquement de bout en bout. Voix lumineuse et puissante, diction irréprochable, sens du phrasé et des nuances, le ténor italien est aussi confondant de présence et d’énergie à chacune de ses interventions, incarnant un poète particulièrement désabusé et porté sur la bouteille. Marina Viotti fait, elle aussi, très forte impression en Nicklausse/Muse : également présente tout au long de la représentation, elle ne cesse de bouger, de danser et de sauter sur scène ; la voix est chaleureuse et corsée, mais a parfois du mal à se faire entendre dans la salle. Incarnant les quatre personnages maléfiques, Luca Pisaroni séduit par son legato et l’homogénéité de sa voix mais, en raison d’une présence scénique plutôt discrète, ses interventions n’ont rien de diabolique. Des trois femmes dont Hoffmann est amoureux, c’est l’Antonia mélancolique et ingénue d’Eleonora Buratto qui tire le mieux son épingle du jeu, avec ses élans vocaux passionnés. Les vocalises de l’Olympia de Federica Guida déclenchent certes les applaudissements du public, mais, si toutes les notes sont là, elles paraissent bien scolaires et appliquées. La Giulietta de Francesca Di Sauro se remarque à peine, tant sa présence scénique est discrète et sa voix couverte par l’orchestre. Dans la peau des quatre serviteurs (Andrés, Cochenille, Frantz, Pitichinacchio), François Piolino joue et danse avec beaucoup d’aplomb mais parle plus qu’il ne chante. On mentionnera pour terminer la courte mais convaincante prestation de Yann Beuron en Spalanzani.



Claudio Poloni

 

 

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