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Du vent dans les voiles

Toulouse
Théâtre du Capitole
02/27/2002 -  3, 6, 10 et 13 mars 2002
Benjamin Britten : Peter Grimes, opus 33
Kim Begley (Peter Grimes), Judith Howarth (Ellen Orford), Jonathan Summers (Capitaine Balstrode), Anna Steiger (Auntie), Christer Bladin (Bob Boles), Stafford Dean (Swallow), Marita Knobel (Mrs. Sedley)
Orchestre et Chœurs du Capitole, Richard Bradshaw (direction)
Alfred Kirchner (mise en scène)


Britten a décidément de la chance à Toulouse, puisque - longtemps - après un Billy Budd resté dans toutes les mémoires (en 1994, déjà!) et une Curlew River également mémorable via Aix, voici avec ce Peter Grimes l’un des meilleurs spectacles de la saison toulousaine.


Le metteur en scène Alfred Kirchner dit avoir voulu éviter, avec raison, le piège facile du naturalisme dans une œuvre qui dépasse de loin la simple anecdote de village. Il inscrit au contraire l’œuvre dans un expressionnisme dépouillé, qui évite les clichés habituels sur l’Angleterre marine et donne à mieux comprendre l’universalité du propos de Britten. Bien sûr, ce traitement rapproche Peter Grimes de Wozzeck, ce qui éloigne un peu Britten de sa sphère stylistique originale, sans être pourtant un contresens.


Les décors sont simples et dégagent bien la scène exiguë du Capitole, les éclairages sur la toile de fond variant avec ingéniosité les atmosphères, de l’oppression à la violence. Peut-être le traitement du chœur, un rien statique, aurait-il gagné a être plus dynamique, surtout dans une scène de la taverne un peu gesticulatoire. Mais les scènes intimistes sont traités avec une sobriété très prenante. L’adieu de Grimes, geste dérisoire de la main à peine ébauché, serre véritablement la gorge.

Il faut dire que le plateau vocal réuni a tout pour soulever l’enthousiasme. On a dit, pour La Walkyrie, tout le bien que l’on pouvait penser de l’excellent Kim Begley. Son Grimes est à l’aune de son Siegmund, ce qui n’est pas peu dire. Le chanteur sait avec intelligence plier ses moyens héroïques à une conception élégiaque, toute en finesse, de son personnage. Poète capable d’éclats, il exprime une voix intime pleine de puissance retenue. Et l’acteur compose, avec sa carrure massive, un être à la chair opaque et tourmentée, la voix dans les étoiles.


Judith Howarth est une Ellen juvénile, fondante de douceur dans son timbre riche et chaud, elle aussi touchante dans sa dimension très humaine, charnelle à la fois et effigie de l’amour pur.


Les autres ne sont pas en reste, le solide et chaleureux Balstrode de Jonathan Summers, la plantureuse Anna Steiger, parfaite en Auntie, Christer Bladin, que l’on est heureux de retrouver en Bob Boles, et, par dessus tout, l’inoubliable figure de Mrs Sedley, par la voix éprouvée et la figure odieuse à la perfection de Marita Knobel.


Richard Bradshaw et les musiciens toulousains donnent de la partition une vision dramatique et pleine d’énergie, houleuse pourrait-on dire, et pourtant raffinée, douce lorsqu’il le faut.


Une mise en scène intelligente, d’excellents chanteurs,un chef maître de son sujet dans un chef-d’œuvre poignant, il a soufflé sur le Capitole un vent bien rafraîchissant. Alors, on donnerait bien quelques Traviata ou Tosca de routine pour en reprendre un peu avec, pourquoi pas, le Tour d’écrou ou même, on n’est pas difficile, une reprise de Billy Budd!



Laurent Marty

 

 

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