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Dégenré Paris Boulogne‑Billancourt (La Seine musicale) 09/15/2022 - & 16, 17, 18, 20, 21*, 22, 23, 24, 25 septembre 2022 Roméo et Juliette Benjamin Millepied (chorégraphie, mise en scène), Serge Prokofiev (musique)
L.A. Dance Project : Doug Baum, Marissa Brown, Lorrin Brubaker, Jeremy Coachman, Courtney Conovan, Daphne Fernberger, David Adrian Freeland Jr., Mario Gonzalez, Oliver Greene‑Cramer, Sierra Herrera, Leo Hishikawa, Payton Johnson, Shu Kinouchi, Peter Mazurowski, Vinicius Silva, Nayomi Van Brunt (danseurs)
Olivier Simola (collaboration artistique), François‑Pierre Couture (scénographie et lumières), Camille Assaf (costumes), Sébastien Marcovici (opérateur Steadicam)
En ces temps difficiles pour les organisateurs de spectacles, Benjamin Millepied est sur tous les fronts pour son retour à Paris cet automne avec sa compagnie californienne L.A. Dance Project : pas moins de trois spectacles, Roméo et Juliette à La Seine Musicale et deux au Châtelet, un film sur Carmen dans les bobines et des projets en pagaille.
Remplir à ras bord une salle à la jauge aussi grande dix jours de suite avec séances supplémentaires pour succès excessif n’est aujourd’hui pas un mince exploit ! Après son passage éclair à la tête du Ballet de l’Opéra de Paris, Benjamin Millepied a manifestement, le succès du film Black Swan aidant, magnétisé et fidélisé un très large public. Triomphe assuré pour ces représentations de Roméo et Juliette, deux fois reportées en temps de covid, qui, à l’aide de l’excellent vidéaste Sebastien Marcovici, permet de suivre l’action en gros plan quand elle se déroule sur la scène frontale d’un rouge écarlate ou dans les coulisses du théâtre, ici les coursives et le parvis de La Seine musicale de l’île Seguin à Boulogne-Billancourt. Autre particularité, Roméo et Juliette sont dégenrés, ou plutôt dansés selon la représentation par deux hommes, deux femmes, un homme et une femme. On pense bien sûr au Boléro de Béjart, qui déjà utilisait déjà une telle alternance.
La dramaturgie du ballet original est simplifiée, diminuée de moitié pour la durée et supprimant toute la dimension sociale et familiale de l’action. Une série de tableaux mais avec une fluidité extrême. Seize personnages seulement et l’action réduite au choc des deux amoureux et à la violence qui entoure leur réunion. La musique est enregistrée : la version assez clinquante de Valery Gergiev à la tête de l’Orchestre symphonique de Londres, artificiellement distordue pour faire sonner davantage les instruments qui soulignent le drame.
On a pu voir danser les deux protagonistes par deux hommes respectivement un danseur afro‑américain, David Adrian Freeland Jr. (Roméo), et un danseur « latino », Mario Gonzalez (Juliette). Se poser la question du fonctionnement de cette alliance nécessiterait de se situer dans l’imaginaire individuel de chaque spectateur. La danse touche bien évidement son but, les scènes amoureuses du balcon sont d’un érotisme certain, la crédibilité de l’action réelle. L’ensemble du ballet est magnifiquement réglé, les rixes et les bals particulièrement, retransmis de la coulisse par la vidéo impitoyable car chaque détail est surexposé. Les danseurs méritent tous des éloges, particulièrement les interprètes de Tybalt et Mercutio, Vinitius Silva et Shu Kinouchi. Même si on pense souvent à Jerome Robbins, le style chorégraphique de Millepied est très personnel et percutant. Scénographie, éclairages et costumes contemporains sont parfaits. Le spectacle tient en haleine une heure et quart sans interruption qui passe presque trop vite.
Olivier Brunel
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