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Un Barbier façon commedia dell’arte

Firenze
Teatro del Maggio Musicale Fiorentino (Sala Zubin Mehta)
09/08/2022 -  et 10, 12, 14, 15* septembre 2022
Gioachino Rossini : Il barbiere di Siviglia
Ruzil Gatin (Il Conte d’Almaviva), Fabio Capitanucci (Don Bartolo), Vasilisa Berzhanskaya (Rosina), Nicola Alaimo (Figaro), Evgeny Stavinskiy (Don Basilio), Eduardo Martínez Flores (Fiorello, Un ufficiale), Carmen Buendía (Berta)
Coro del Maggio Musicale Fiorentino, Lorenzo Fratini (direction), Orchestra del Maggio Musicale Fiorentino, Daniele Gatti (direction musicale)
Damiano Michieletto (mise en scène, décors), Andrea Bernard (reprise de la mise en scène), Carla Teti (costumes), Alessandro Tutini (lumières)


(© Michele Monasta/Maggio Musicale Fiorentino)


Aussi étrange que cela puisse paraître pour une ville au passé si riche, Florence dispose d’un opéra flambant neuf, ou presque. L’idée d’un nouveau théâtre lyrique sur les bords de l’Arno pour remplacer le Teatro Comunale est née aux alentours de 2001‑2002, au moment même où Rome inaugurait un complexe multifonctionnel, l’Auditorium Parco della Musica, dont s’est clairement inspirée la cité toscane. Le chantier du Teatro del Maggio Musicale Fiorentino a débuté en 2008 pour s’interrompre – provisoirement – le 21 décembre 2011. Ce jour‑là était donnée, dans la Sala Grande, la Neuvième Symphonie de Beethoven pour le cent cinquantième anniversaire de l’unification de l’Italie. Juste après ce concert d’ouverture, les travaux reprenaient dans le bâtiment encore inachevé. L’inauguration officielle a eu lieu en mai 2014. Cette Sala Grande, qui est la salle principale du nouveau complexe florentin, peut accueillir 1 800 spectateurs et est destinée à l’opéra. La seconde structure du Théâtre du Mai musical florentin est un auditorium de quelque 2 000 places à ciel ouvert, nommé « Cavea », qui se situe sur le toit – en pente – du bâtiment. Enfin, en décembre 2021 a été inaugurée la Sala Zubin Mehta, en hommage au célèbre chef d’orchestre, qui a beaucoup œuvré en faveur de la musique à Florence. Cette salle de 1 200 places est modulable, pouvant accueillir aussi bien des concerts symphoniques que des représentations lyriques ou des concerts de musique de chambre, pour lesquels la capacité peut être ramenée à 500 fauteuils. C’est justement dans cette salle qu’a été repris Le Barbier de Séville dans la production de Damiano Michieletto.


Ce Barbier de Séville a été présenté pour la première fois à Florence en 2005 puis repris jusqu’ici pas moins de sept fois, pour un total de plus de quarante représentations. Damiano Michieletto s’est inspiré de la commedia dell’arte : sous les lumières aux couleurs très vives conçues par Alessandro Tutini, les personnages sont tous des caricatures, avec leurs superbes costumes excentriques dessinés par Carla Teti. Ainsi Don Basilio, tout en vert, ressemble à un serpent, traînant une longue queue. Avec ses cheveux coiffés en forme d’oreilles, Figaro a les traits et la ruse d’un renard. Les deux amoureux, Rosina et Almaviva, sont bien évidemment vêtus de rouge, alors que Bartolo est en blanc. Mis à part quelques tables et chaises, le plateau est entièrement vide. Les gags – la plupart du temps réussis – s’enchaînent à la vitesse de l’éclair et ne laissent aucun temps mort, rendant ce Barbier particulièrement désopilant et pétillant. A noter que cette production florentine est entièrement différente du Barbier de Séville que Damiano Michieletto avait conçu pour le Grand Théâtre de Genève en 2010 puis en 2012.


L’intérêt principal de cette huitième reprise florentine du Barbier de Séville résidait dans la présence dans la fosse de Daniele Gatti, qu’on n’associe pas forcément à ce type de répertoire, quand bien même le chef a déjà dirigé le chef‑d’œuvre de Rossini à plusieurs occasions. Le maestro surprend par des tempi plutôt alanguis, qui, s’ils peuvent parfois sembler en contradiction avec la vivacité de la mise en scène, font ressortir chaque détail et chaque nuance de la partition. Sa lecture est peut‑être moins pétillante que le Rossini qu’on a généralement l’habitude d’entendre, mais extrêmement raffinée et non dénuée de spontanéité. La distribution vocale est de haute tenue : même les seconds rôles sont parfaitement distribués, à l’instar de la Berta truculente de Carmen Buendía, laquelle finit par laisser tomber son rôle de gouvernante rigide pour se déchaîner dans son grand air (« Che vecchio sospettoso »). En Basilio, Evgeny Stavinskiy fait montre, lui aussi, d’une forte présence scénique, conjuguée à une voix particulièrement sonore. Fabio Capitanucci incarne un Bartolo digne et d’une grande autorité, à la voix bien timbrée. Si Nicola Alaimo est l’interprète le plus applaudi à la fin du spectacle, c’est plus pour la sympathie que suscite son personnage de Figaro, tant le chanteur est charismatique, que pour ses qualités vocales, car l’émission n’est pas des plus raffinées et le baryton se complaît souvent dans le fortissimo. S’il n’est peut-être pas aussi virtuose et flamboyant que certains de ses collègues, Ruzil Gatin incarne néanmoins un Comte Almaviva de belle prestance, au timbre clair et ardent. La révélation de la soirée est la Rosine de Vasilisa Berzhanskaya. La mezzo‑soprano russe séduit tout autant par ses graves capiteux que par ses aigus lumineux, par la précision et la fluidité de ses vocalises ainsi que par son abattage scénique impressionnant.


Pour la petite histoire, il convient de signaler que cette dernière représentation a été suivie par un public composé d’un nombre important de jeunes spectateurs, qui ont chaleureusement manifesté leur enthousiasme après chaque air ainsi qu'au baisser de rideau. Une entreprise de Florence avait proposé des billets à prix réduit et plusieurs universités avaient réservé des places pour leurs étudiants, un signe encourageant qui montre que l’opéra n’intéresse pas qu’un public âgé.



Claudio Poloni

 

 

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