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Passion Berlioz

Paris
Philharmonie
06/10/2022 -  et 7, 8 juin 2022 (Strasbourg)
Hector Berlioz : Roméo et Juliette, opus 17
Joyce DiDonato (soprano), Cyrille Dubois (ténor), Christopher Maltman (baryton)
Coro Gulbenkian, Jorge Matta (chef de chœur), Chœur de l’Opéra national du Rhin, Alessandro Zuppardo (chef de chœur), Orchestre philharmonique de Strasbourg, John Nelson (direction)


J. Nelson (© Marco Borggreve)


Quel plaisir de retrouver une salle Pierre Boulez pleine pour une œuvre de Berlioz, compositeur parfois encore insuffisamment aimé en France. Il faut dire que l’affiche avait de quoi séduire avec au pupitre de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg le grand berliozien John Nelson. Une rencontre qui a déjà donné lieu à quelques beaux moments immortalisés au disque comme Les Troyens et La Damnation de Faust, avec Joyce DiDonato ce soir aussi sur scène.


Ce fut globalement une très belle soirée malgré un démarrage sur les chapeaux de roue, à vrai dire un peu désordonné. On retrouvera à deux reprises ces difficultés de synchronisation, d’abord dans l’étonnante scène des Capulets sortant de la fête, où les voix d’hommes sont placées dans l’enveloppe de chaque côté de la salle, puis dans la troisième partie, durant laquelle les Capulets (Chœur Gulbenkian) et les Montaigus (Chœur de l’Opéra du Rhin), sans doute trop éloignés de chaque côté de l’arrière‑scène, s’opposent sans se trouver musicalement. Toutefois, ces effets de spatialisation, même imparfaitement réussis, n’auraient certainement pas déplu à Berlioz. Et John Nelson, qui dirige assis et connaît son Berlioz comme peu, propose le plus souvent une lecture vibrante et passionnée.


Tel était par exemple le récitatif choral initial confié à un chœur de chambre (sans soprani), dont les harmonies sont toujours aussi étonnantes. Vingt chanteurs placés aux cotés de Cyrille Dubois et Joyce DiDonato qui les accompagnent selon une tradition désormais bien ancrée (Daniel Harding fait de même), plantent le décor de l’histoire à la façon d’un chœur antique. La belle homogénéité, la grande précision et l’excellente diction du chœur font de ce moment un pur bonheur. Cyrille Dubois est un Mercutio vibrant, élégant et précis, qui se mêle avec un manifeste bonheur au chœur. Malgré sa réputation, Joyce DiDonato déçoit surtout de par un français perfectible. Dommage car la ligne de chant est superbe et l’émotion, notamment dans des fins de phrases suspendues, est au rendez‑vous. En seconde partie, Christopher Maltman livrera un Père Laurence impressionnant de tenue : la voix est somptueuse, la puissance infaillible, le timbre beau et homogène et l’interprétation sert ce personnage à la fois malheureux et courroucé de la mort des deux amants. Décidément un immense artiste !


L’autre grand triomphateur de la soirée, hormis le chef, est un Orchestre philharmonique de Strasbourg de toute beauté, sans point faible et au sein duquel on remarque notamment un pupitre de violoncelles d’une qualité d’homogénéité rare, notamment dans une Scène d’amour très poignante. Quelques individualités sont aussi à mentionner, notamment le clarinettiste Jérémy Oberdorf, qui livre un Réveil de Juliette de toute beauté et les six magnifiques harpes qui participent avec brio à chacune de leurs importantes interventions. Et bien entendu Berlioz dont le génie, 180 ans après la composition de ce chef d’œuvre foisonnant et innovant, ne cesse de surprendre. Richard Wagner, qui lui dédicacera son Tristan et Isolde, ne s’y était pas trompé.


Une fort belle soirée donc, démontrant une nouvelle fois la grande qualité actuelle des orchestres de région, qui n’ont rien à envier aux formations parisiennes. Sans aucun doute celui de Strasbourg est‑il, avec celui de Toulouse, l’ensemble le plus en forme en ce moment. Le seul vrai bémol de la soirée fut la présence incessante et gênante d’un bruit de fond audible au parterre comme aux balcons.


Le concert du 7 juin à Strasbourg en intégralité sur le site medici.tv



Gilles Lesur

 

 

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