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Un Falstaff culinaire

Lyon
Opéra
10/09/2021 -  et 11, 13, 15, 17, 19*, 21, 23 octobre 2021
Giuseppe Verdi : Falstaff
Christopher Purves (Sir John Falstaff), Stéphane Degout (Ford), Juan Francisco Gatell (Fenton), Carmen Giannattasio (Mrs Alice Ford), Daniela Barcellona (Mrs Quickly), Giulia Semenzato (Nannetta), Antoinette Dennefeld (Mrs Meg Page), Francesco Pittari (Dottore Cajus), Rodolphe Briand (Bardolfo), Antonio Di Matteo (Pistola)
Chœur de l’Opéra national de Lyon, Anass Ismat (chef de chœur), Orchestre de l’Opéra national de Lyon, Daniele Rustioni (direction)
Barrie Kosky (mise en scène), Katrin Lea Tag (décors, costumes), Franck Evin (Lumières), Olaf A. Schmitt (dramaturgie)


C. Purves, A. Di Matteo, R. Briand (© Monika Rittershaus)


Après avoir conquis le public très chic et très international du Festival d’Aix-en-Provence l’été dernier, c’est à l’Opéra de Lyon (maison coproductrice du spectacle) que le Falstaff «culinaire» imaginé par le trublion australien Barrie Kosky fait escale. Avec une verve jamais en panne, il plante l’action dans une cantine piteuse où s’affaire le maître queux qu’est Falstaff, mijotant des plats devant le public qui découvre bientôt, médusé, que Sir John est nu sous son tablier de cuisine! Deuxième idée du spectacle, des recettes de cuisine sont déclamées au micro pendant les précipités entre les différents tableaux, ce qui permet habilement les changements de décors derrière le rideau, tout en apportant au spectacle de vraies notes d’humour, la lecture s’attardant avec sensualité sur de nombreux mots à double sens (le plus souvent coquins). Plus tard, nos joyeuses commères évoluent autour d’un kitchissime lit à baldaquin entouré de pâtisseries affolantes, sur fond de tapisserie rose! La réussite du spectacle tient surtout de cet entrain jouissif, qui ne faiblit pas un seul instant et qui rend justice au formidable (dernier) éclat de rire d’un compositeur qui, dans sa quatre-vingtième année, offrait au monde une partition d’une incroyable fraîcheur.


Le baryton britannique Christopher Purves campe un Falstaff hors norme, avec un talent de comédien qui éclate à chaque instant. De son côté, l’interprétation vocale culmine dans un «Mondo ladro» génial et émouvant, où le médium de la voix donne support à un savoureux phrasé («Ber del vin dolce») et rend pleinement compte de ce moment majeur de l’ouvrage. Son registre aigu est très assuré, et tombe à point dans la scène de séduction d’Alice. Reste pourtant le sentiment d’être privé d’une des dimensions du personnage: la noblesse véritable de Sir John, dont l’ironie supérieure est une des composantes, et qui échappe nécessairement, du fait de la mise en scène, à ce Falstaff qui n’hésite pas à montrer ses fesses au public.


Autour de lui, dans ce désordre brillamment organisé, brille le Ford de Stéphane Degout, qui réjouit de voir un Français maîtriser ainsi toute l’italianità du rôle, et avec tant d’aisance et de crédibilité en scène. Avec un jeu plus fruste, le ténor argentin Juan Francisco Gatell n’en campe pas moins un Fenton proche de l’idéal, juvénile et ardent à souhait. La mezzo italienne Daniela Barcellona est une Mrs Quickly désopilante, aux graves presque barytonnants, tandis que Carmen Giannattasio (Alice Ford) déçoit quelque peu avec une voix désormais durcie et une intonation parfois hasardeuse. Satisfecit total en revanche, pour la Nannetta lumineuse et pure de la jeune soprano italienne Giulia Semenzato, et la Meg Page au chant athlétique d’Antoinette Dennefeld. Enfin, Francesco Pittari (Cajus), Rodolphe Briand (Bardolfo) et Antonio Di Matteo (Pistola) complètent idéalement la distribution.


Opéra de chef comme le répertoire italien en comprend peu, Falstaff trouve dans l’excellent directeur musical de la maison lyonnaise, Daniele Rustioni, un maestro dirigeant son plateau avec un sens de la dynamique, un phrasé orchestral et un souci du détail peu communs.



Emmanuel Andrieu

 

 

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