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C’est parti!

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
02/25/2020 -  et 3 (Hamburg), 9 (München) mars, 23, 24 mai (Wien) 2020
Ludwig van Beethoven : Symphonies n° 1 en ut majeur, opus 21, n° 2 en ré majeur, opus 36, et n° 3 en mi bémol majeur «Héroïque», opus 55
Wiener Philharmoniker, Andris Nelsons (direction)


A. Nelsons (© Marco Borggreve)


Théâtre des Champs-Elysées évidemment bondé pour ce premier concert d’un cycle qui faisait figure, dès la sortie des programmes des salles de concerts parisiennes voilà presqu’un an, de passage obligé. Car le Philharmonique de Vienne dans une intégrale des Symphonies de Beethoven, ça ne se refuse pas! Après un cycle ancien dirigé alors par Claudio Abbado à la Salle Pleyel du 10 au 17 février 1988, c’est Christian Thielemann qui avait officié voilà maintenant plus de neuf ans, en ces mêmes lieux, à la fin du mois de novembre 2010 (voir ici, ici, ici et ici) pour un résultat globalement en deçà de ce qu’on pouvait espérer. Ici, place à Andris Nelsons qui, après avoir dirigé l’orchestre lors du fameux Neujahrskonzert du 1er janvier 2020, emmène les Viennois dans une grande tournée qui, après Paris, les conduira à Cologne (pour un seul concert, le 1er mars), à Hambourg (du 3 au 7 mars) puis Munich (du 9 au 12 mars) pour l’intégrale des Symphonies, à Baden-Baden (unique concert le 14 mars) avant que le cycle ne soit de nouveau donné à Vienne, cette fois-ci à deux reprises, du 23 mai au 7 juin. Précisons enfin que le chef letton retrouvera les Wiener Philharmoniker au Festival de Salzbourg les 7 et 9 août dans la Troisième Symphonie de Mahler, Riccardo Muti les dirigeant pour sa part dans la seule Neuvième de Beethoven à trois reprises, les 15, 16 et 17 août.


On connaît les talents de Nelsons, indéniables, et l’on sait combien le Philharmonique de Vienne aime jouer sous sa direction. Pour autant, ses Beethoven n’ont guère été marquants à ce jour, que ce soit en concert (on se souvient d’une honorable Pastorale donnée ici en mars 2017 même) ou au disque, la critique ayant globalement accueilli sa récente intégrale viennoise avec un enthousiasme des plus modérés. Et finalement, c’est également un bilan mitigé que nous aura offert ce premier concert qui inaugure une intégrale abordée chronologiquement, cette soirée réunissant donc dans l’ordre de numérotation les trois premières symphonies.


La Première Symphonie est assez illustrative de cet entre-deux. Le premier mouvement est très bien fait, offrant d’emblée un pupitre de cordes dont l’excellence n’est plus à démontrer et une petite harmonie étincelante où l’on retrouve notamment Walter Auer à la flûte solo, Sophie Dervaux au basson et Clemens Horak au hautbois. Joué avec toutes les reprises, on est séduit d’emblée par la seconde partie (Allegro con brio) de ce mouvement mais le deuxième tombe dans une pesanteur inattendue qui, tout en regardant ostensiblement vers Haydn, souffre d’une fréquente raideur de la part de Nelsons. Vraie déception également avec le Menuetto: Allegro molto e vivace, où nous bénéficions certes d’une claire différenciation dans les tempi mais, en revanche, les atmosphères ne changent guère et l’ensemble s’avère finalement assez étale. Conclusion néanmoins tout en verve qui, sans doute en raison de l’acoustique sèche du théâtre, aurait sans doute pu être davantage dionysiaque: cet Allegro molto e vivace n’en fut pas moins réjouissant!


La Deuxième Symphonie monta la qualité d’un cran, à l’évidence. Dès le premier mouvement, Andris Nelsons nous emmène dans un tourbillon, les Viennois étant parcourus d’une énergie folle où les premiers violons font montre d’une technique extraordinaire sous la double houlette de Volkhard Steude et d’Albena Danailova. Incroyable performance des musiciens avant de nous emmener, dans un deuxième mouvement (Larghetto) dont, personnellement, nous n’avions jamais à ce point entendu la parenté avec le mouvement lent de la Pastorale, une légère danse découlant ainsi avec délectation des merveilleux échanges entre pupitres de cordes. Dommage néanmoins qu’Andris Nelsons ait décidé de l’aborder si sagement puisque la fraîcheur et le lyrisme de certains passages cédèrent tout de même, de temps à autre, à quelques longueurs. Le troisième mouvement fut bien enlevé avant que Nelsons n’engage les musiciens dans un Finale: Allegro molto ébouriffant! Enthousiasme du public à juste titre, en tout cas eu égard à cette conclusion que seuls les meilleurs orchestres sont capables de livrer ainsi sans «savonner».


Après l’entracte, l’orchestre, à la suite de ses deux Konzertmeister, revint sur scène, plusieurs musiciens ayant changé pour l’occasion, à l’instar de la petite harmonie, presque totalement renouvelée, des cors, du timbalier, Erwin Falk prenant donc place derrière ses quatre timbales à clefs. Voici donc le «gros» morceau du concert avec l’Héroïque (1803): bilan là aussi mitigé. Le premier mouvement fut magnifique: Nelsons, très suggestif, délaissant souvent sa baguette au profit de ses seules mains, notamment pour propager le passage d’un thème d’un pupitre, se révéla d’une rare efficacité. Les musiciens le suivent avec aisance et l’énergie du chef letton galvanise en plus d’une occasion les violons (premiers comme seconds), ce qui suffit bien entendu à entraîner le reste de l’orchestre. On passera rapidement sur quelques micro-problèmes de mise en place: avouons même que c’est plutôt rassurant de la part d’un des meilleurs orchestres du monde, comme quoi chacun peut avoir ses petites faiblesses! Le plus beau moment, qui restera dans les mémoires, fut sans aucun doute la célèbre Marcia funebre: du vibrato utilisé avec parcimonie, peu de legato, une solennité et une tension de chaque instant. Pas sûr qu’on ait vraiment eu droit ici à la «spontanéité» évoquée dans un des articles du programme (dû à la plume de Rémy Louis) car tout cela est très travaillé, les diverses séquences du mouvement apparaissant parfois de façon un peu trop nettes au détriment de la grande arche qu’on pourrait souhaiter y trouver, mais quel résultat! On oscille entre un côté désespéré (le hautbois solo, tenu par Sebastian Breit) et une atmosphère presque glaçante (pour prendre une image napoléonienne, on est davantage à Eylau qu’à Arcole), la grandeur de la musique restant finalement seule en mémoire: splendide.


Alors, les Viennois se sont-ils trop donnés dans ce deuxième mouvement? Peut-être car la suite aura été beaucoup moins séduisante. Dans le Scherzo, les quatre cors (au timbre vert si reconnaissable) ne sont pas aussi irréprochables qu’on aurait pu le souhaiter et la vitesse de Nelsons ne fut pas toujours de très bon aloi. Quant au Finale, il fut parfois étonnamment poussif (la transition entre le Poco andante et le Presto, la toute dernière séquence du mouvement que l’on aurait pu souhaiter moins retenue et plus orgiaque) et souffrit d’une évidente fatigue des musiciens. Les cordes sont plus dolentes et il faut bien que Volkhard Steude veille au grain pour que, de temps à autre, chacun soit en mesure avec les autres.


Pour autant, et comme on pouvait s’y attendre, ovation générale du public pour un premier concert très satisfaisant sans être pleinement convaincant: attendons la suite, avec impatience néanmoins!

Le site de l’Orchestre philharmonique de Vienne



Sébastien Gauthier

 

 

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