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Un concentré de bonne humeur

Paris
Théâtre Marigny
11/07/2019 -  et 8, 9, 10, 12*, 13, 14, 15, 16, 17, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 26, 27, 28, 29, 30 novembre, 1, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 26, 27, 28, 29, 31 décembre 2019, 2, 3, 4, 57, 8, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 28, 29, 30, 31 janvier, 1er, 2, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 25, 26, 27, 28, 29 février, 1er, 3, 4, 5, 6, 7 mars 2020
Jule Styne: Funny Girl
Christina Bianco (Fanny Brice), Ashley Day (Nick Arnstein), Rachel Stanley (Mrs. Brice), Matthew Jeans (Eddie Ryan), Mark Inscoe (Florenz Ziegfeld), Ashley Knight (Mr. Keeney), Shirley Jameson (Mrs. Strakosh), Jessica Buckby (Mimsie), Isabel Canning (Emma, Maid)
Orchestre du Théâtre Marigny, James McKeon (direction musicale)
Stephen Mear (mise en scène, chorégraphie), Peter McKintosh (décors, costumes), Tim Mitchell (lumières)


(© Julien Benhamou)


Désormais directeur artistique du Théâtre Marigny, Jean-Luc Choplin poursuit avec bonheur son exploration du répertoire de la comédie musicale américaine, engagée en début d’année avec Guys and Dolls. On ne dira jamais assez combien la scène rénovée de Marigny et ses quelques mille places en rotonde offrent un rapport idéal avec la scène, à même de stimuler les artistes qui « sentent » ainsi parfaitement les réactions du public. Avec soixante représentations prévues d’ici la fin de l’année, le succès public devrait être au rendez-vous, tant ce petit bijou de rythme et de swing bénéficie de l’interprétation stylée de James McKeon, très investi dans la fosse.


Immense succès à sa création en 1964 (la même année qu’Un violon sur le toit de Jerry Bock, qui sera monté en décembre prochain à l’Opéra du Rhin), Funny Girl rend hommage à la figure de Fanny Brice, l’une des plus truculentes meneuses de revues burlesques, en vogue au début du XXe siècle à New York. Le spectacle raconte autant son amour immodéré pour l’énigmatique Nick Arnstein, rongé par le démon du jeu, que son irrésistible ascension artistique, prétexte à des scènes de revue parodiques et hilarantes. Les portraits savoureux de ses origines juives populaires, comme du milieu artistique qui s’entrechoque avec les déchirements personnels, apportent de nombreux traits d’humour bienvenus tout au long de la soirée, même si l’on pourra regretter la morale finale, qui reproche à l’héroïne son paternalisme étouffant. Mais n’est-ce pas plutôt son émancipation de la tutelle masculine que le livret lui reproche en filigrane?


Quoi qu’il en soit, la musique pétillante de Jule Styne (déjà auréolé de succès en 1959 avec Gypsy, un autre ouvrage inspiré d’une personnalité féminine haute en couleur), remplit son office par son humeur joyeuse, entre accents cabarets et rythmes qui swinguent. Le succès de Funny Girl ne doit-il pas tout autant à la créatrice indissociable du rôle-titre, Barbra Streisand, aussi impériale à Broadway qu’au cinéma, dans le film du même nom de 1968 avec Omar Sharif? La grande chanteuse américaine lança sa carrière avec ce rôle, prélude à cinquante ans de succès ininterrompus: difficile, dès lors, d’imaginer une autre que Streisand pour interpréter Fanny Brice! Jean-Luc Choplin a eu toutefois la bonne idée de recourir à l’étonnante Christina Bianco, chanteuse « phénomène », connue pour ses imitations vocales virtuoses, visibles sur internet en plusieurs vidéos virales.


La chanteuse américaine impose d’emblée sa gouaille ravageuse avec à-propos dans les dialogues parlés, tout en montrant une agilité rarement prise en défaut dans l’interprétation vocale, en une émission un rien trop nasale. On regrettera cependant que la mise en avant de ces prouesses techniques se fasse au détriment de la profondeur d’expression, surtout dans les passages dramatiques. Gageons que les prochaines représentations devraient lui permettre d’explorer davantage cette facette importante du rôle, à même de créer l’émotion nécessaire. A ses côtés, le solide mais un peu trop monolithique Ashley Day assure bien sa partie, sauf dans les passages colériques un peu outrés, tandis que Matthew Jeans, beau comme un cœur, se montre un rien trop tendre dans un rôle il est vrai complexe, celui de l’ami amoureux en secret de l’héroïne. Fort heureusement, il compense ces quelques faiblesses par des qualités de danseur bienvenues, notamment aux claquettes, de même que les seconds rôles dédiés à la revue, tous parfaits. On mentionnera encore les désopilantes Rachel Stanley (Mrs. Brice) et Shirley Jameson (Mrs. Strakosh), irrésistibles dans leurs joutes au franc-parler dévastateur.


On retrouve Stephen Mear aux manettes de ce spectacle efficace, qui rend hommage à l’esprit cabaret de l’ouvrage en une scénographie astucieuse: les arceaux industriels, type Eiffel, servent ainsi autant à illustrer les turbulentes répétitions que les scènes de caractère, en un classicisme respectueux de l’ouvrage, mais peu aventureux. Pour autant, on se laisse séduire par la fantaisie des costumes, l’énergie des revues bien menées et les transitions sans temps morts. Un spectacle globalement réussi qui devrait s’affiner de représentations en représentations, à voir jusqu’au 5 janvier prochain.



Florent Coudeyrat

 

 

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