About us / Contact

The Classical Music Network

La Roque

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Abîmes brahmsiens

La Roque
Abbaye de Silvacane
08/17/2019 -  
Ludwig van Beethoven : Sonate pour piano n° 4, opus 7
Johannes Brahms : Intermezzi, opus 117
Frédéric Chopin : Valse, opus 64 n° 2 – Prélude, opus 28 n° 15 – Fantaisie-Impromptu, opus 66

Pavel Kolesnikov (piano)


P. Kolesnikov (© Christophe Grémiot)


Le Festival de La Roque-d’Anthéron propose des concerts dans bon nombre de lieux, parfois assez éloignés, des Bouches-du-Rhône et du Vaucluse voisin, mais les deux principaux demeurent le parc du château de Florans et, dans un registre tout à fait différent, l’abbaye cistercienne de Silvacane, à quelques centaines de mètres à l’est du bourg. Dans une configuration très particulière où le public est réparti sur deux des galeries du cloître (XIIIe), une acoustique tout à fait remarquable et un cadre plus intime se révèlent tout à fait appropriés pour un récital de piano.


Celui de Pavel Kolesnikov (né en 1989) n’aura pas déçu les attentes, dans un programme savamment construit par successions de tonalités, de mi bémol à ut dièse (ou son équivalent bémol). La rare Quatrième Sonate (1797) de Beethoven laisse pourtant perplexe: par de violents contrastes et des fusées virtuoses, le Russe entend-il rendre justice au titre de «grande sonate» que lui avait donné le compositeur? Si, de fait, les moyens techniques apparaissent considérables, les surprises encore bien haydniennes de la partition sont toutefois malmenées par des maniérismes et par une frappe quelquefois très dure. Mais à en juger par la couleur qu’il confère au premier thème du Largo, con gran espressione, on se dit que le résultat promet d’être intéressant dans Brahms.


Etrangement enchaînés sans interruption, les Intermezzi de l’Opus 117 (1892) confirment cette intuition: le dernier Brahms réussit beaucoup mieux à Kolesnikov que le premier Beethoven. Ce qui reste de brutal dans le jeu laisse affleurer la souffrance, l’essentiel résidant dans un toucher de rêve, un propos d’une intense concentration et une exceptionnelle profondeur du son du Bechstein: une tristesse et une beauté confondantes, tout à fait dans l’esprit de ces pièces ultimes dans lesquelles le compositeur voyait des «berceuses de ses douleurs», qui mènent l’auditeur très loin et sondent de vertigineux abîmes.


Peut-être rompu par les applaudissements qui retentissent pour la première fois, le charme se dissipe quelque peu avec Chopin: si le tempo de la Valse opus 64 n° 2 (1847) fait un peu trop le yoyo, si la partie centrale du Quinzième des Préludes de l’Opus 28 (1839) – celui dit de la «goutte d’eau» – paraît un peu trop cataclysmique, si la Fantaisie-Impromptu (1834) privilégie la démonstration sur le chant, il n’en reste pas moins de superbes réalisations.


Les spectateurs ne laisseront repartir Kolesnikov qu’au prix de deux pages supplémentaires: «Feux d’artifice», dernier des Préludes du Second Livre (1912) de Debussy, spectaculaire et descriptif, puis la petite Valse en la mineur (n° 19) posthume (1843) de Chopin, tout en délicatesse.


Le site de Pavel Kolesnikov



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com