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Jansons ou l’absolu

Paris
Philharmonie
03/23/2019 -  
Hector Berlioz : Le Carnaval romain, opus 9, H. 95
Francis Poulenc : Concerto pour orgue, orchestre à cordes et timbales, FP 93
Igor Stravinski : Le Sacre du printemps

Iveta Apkalna (orgue)
Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Mariss Jansons (direction)


M. Jansons (© Marco Borggreve)


Vienne... Berlin... oui, mais la Radio bavaroise n’a parfois rien à leur envier. Il est vrai que d’Eugen Jochum à Mariss Jansons, l’orchestre n’a, en soixante-dix ans, connu que des directeurs prestigieux. Son dernier concert à la Philharmonie atteint les plus hauts sommets, avec d’abord un Carnaval romain gorgé de couleurs et de saveurs, d’une sensualité capiteuse dans le thème d’amour – superbe cor anglais –, d’une effervescence jubilatoire dans le saltarello, alors que le chef ne cède jamais à la moindre précipitation, ne lâchant pas la bride à ses musiciens et veillant toujours à la clarté des lignes – là où certains se laissent griser par la flamboyance de la musique.


Le Concerto pour orgue de Poulenc – c’est le week-end Orgues – a pour soliste la Lettone Iveta Apkalna, une compatriote de Jansons, magnifique, comme le timbalier. Un Poulenc atypique, inscrit dans un romantisme qu’il aurait peut-être récusé, servi par des cordes au velours de rêve pour le «Très calme et lent», d’un lyrisme poignant. L’Allegro, ensuite, swingue du coup modérément, sans beaucoup de gouaille, gardant une sorte de quant-à-soi classieux, fidèle à la vision d’un chef qui, quoi qu’il dirige, veut garder la main. C’est en tout cas grandiose. En bis, une éblouissante Evocation II de Thierrry Escaich.


Le Sacre du printemps touche à l’absolu. Non que Jansons s’engage sur des sentiers battus. Le ballet tient avec lui du poème symphonique et du concerto pour orchestre, où les Bavarois sont assez inouïs – la flûte en sol, par exemple. Pas de parti pris de modernité radicale ou de primitivisme sauvage: la sonorité garde toutes ses rondeurs, le lyrisme ne perd pas ses droits, comme dans le début des deux parties, où affleure même une certaine sensualité – ou dans les «Cercles mystérieux des adolescentes». Avec Jansons, Le Sacre chante. Sans émousser pour autant la rugosité rythmique de la partition, il la dirige aussi en coloriste, nous rappelant le raffinement parfois oublié des combinaisons de timbres. Et il n’hésite pas à assumer une lecture horizontale, polyphonique, parfait démenti à la formule de Pierre Boulez selon laquelle ce serait «écrit gros» – ainsi, on entend tout, comme rarement. Le rituel sacrificiel ne se réduit plus à une succession de déflagrations sonores. Ce n’est pas Le Sacre de tout le monde.


Deux bis: un Menuet de Boccherini avec des cordes toujours en état de grâce, puis une ébouriffante polka rapide Liebesbotschaft de Johann Strauss.



Didier van Moere

 

 

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