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Viva Verdi!

Paris
Philharmonie
06/07/2018 -  et 22 (Pavia), 24, 25 (Hamburg) mai 2018
Giuseppe Verdi : Messa da Requiem
Tamara Wilson (soprano), Ekaterina Gubanova (mezzo-soprano), René Barbera (ténor), Ferruccio Furlanetto (basse)
Coro della Scala, Bruno Casoni (chef de chœur), Filarmonica della Scala, Riccardo Chailly (direction)


R. Chailly (© Decca/Gert Mothes)


La Philharmonie de Paris, salle pourtant vaste, avait du mal à accueillir le public et les artistes de cette soirée qui requérait, pour le célèbre Requiem (1874) de Giuseppe Verdi (1813-1901), un orchestre et des chœurs conséquents. Une des grandes questions qui se pose toujours à l’égard de cette œuvre consiste à savoir si on doit privilégier une vision théâtrale ou religieuse, l’option choisie différant selon le chef, voire selon les époques auxquelles le chef l’a dirigée, sa propre vision ayant pu évoluer avec le temps... Ce soir, aucun doute: le Milanais Riccardo Chailly opte résolument pour une interprétation théâtrale qui, d’un bout à l’autre, fut magistrale.


Dès l’entrée des cordes et le susurrement du mot Requiem par le chœur, on est ébloui par une finesse qui servira véritablement de fil conducteur. Riccardo Chailly fait constamment avancer le discours, ne s’épanchant jamais de façon inutile, déclenchant parfois de véritables cataclysmes (le début du Dies irae bien sûr mais aussi, au sein de ce dernier, le Rex tremendae!) où, appuyé par deux groupes de trompettes placées en coulisses au niveau de l’orchestre (pour le Dies irae toujours, les cuivres étant guidés par le charismatique trompettiste Marco Toro) ainsi que par des timbales et une grosse caisse incroyables, l’orchestre fit vibrer les murs de la Philharmonie en plus d’une occasion. La puissance suggestive de cette musique éclatait à chaque note, la finesse instrumentale (le pupitre de violoncelles et la flûte au début de l’Offertorio, l’orchestre dans l’accompagnement de l’Ingemisco...) ayant été magnifiée à chaque instant par la direction de Chailly.


Mais n’oublions pas que celui-ci, comme assistant de Claudio Abbado puis comme chef de la Scala, est et a toujours été un homme d’opéra: et c’est cette facette qu’il aura surtout mise en exergue ce soir, avec des passages d’une très grande théâtralité qui conférèrent à l’œuvre des couleurs et un relief parfois inattendus. Parmi ces grands moments, commençons par les pizzicati des huit contrebasses accompagnant le mot Requiem dans le Lux aeterna: le geste à la fois rageur et millimétré des instrumentistes, guidés par leur génial chef de pupitre Giuseppe Ettorre, fut visuellement un régal à lui seul! De même, le léger ralenti imposé par le chef dans l’Ingemisco, qui décupla soudain l’émotion dans l’un des plus beaux passages du Requiem, l’entrée des cordes là encore dans le Lacrymosa ou l’importance donnée à la flûte dans l’Agnus Dei, alors qu’on a plutôt l’habitude de l’entendre fondue dans la masse orchestrale... Autant de moments qui démontrèrent une nouvelle fois combien Riccardo Chailly est un chef d’une stature exceptionnelle, qui sait exploiter tous les tréfonds d’un chef-d’œuvre que l’on croyait pourtant connaître par cœur...


Orchestre de premier plan mais chœur, bien évidemment, de toute première qualité! Constamment sollicité, enchaînant les interventions du piano le plus murmuré jusqu’au forte le plus tonitruant, il fut tout bonnement irréprochable. Le quatuor de solistes fut également du plus haut niveau, à commencer par la soprano Tamara Wilson, placée juste à la gauche du chef. Qu’il s’agisse du Recordare (magnifique duo avec la mezzo, dirigé avec une attention incroyable par Chailly) ou du redoutable Libera me, Tamara Wilson fut exceptionnelle d’engagement et de justesse (les notes étant parfois murmurées avec une tension sous-jacente qui nous fit frissonner en plus d’une occasion). La mezzo-soprano Ekaterina Gubanova ajouta à sa musicalité une sobriété et une rondeur qui firent notamment merveille dans le Liber scriptus. Ne quittant jamais le chef des yeux, René Barbera fut également très bon, notamment dans le très attendu Ingemisco: même si l’on a entendu interprétation peut-être plus ronde et plus soyeuse, la voix fut généreuse et participa en maintes occasion à la réussite du quatuor tout entier. Petit bémol avec Ferruccio Furlanetto qui nous est apparu fatigué et dont la prestation, peut-être justement en raison de cette méforme, gagna en fragilité et en intensité. Les notes furent parfois difficiles à sortir (le Confutatis), la justesse en quelques occasions fut approximative, mais le chanteur sait pouvoir compter sur ses acquis et son charisme: son interprétation fut globalement bonne mais avouons qu’on s’attendait à mieux.


Pour autant, quelle soirée exceptionnelle! Autant dire que les prochaines venues de Riccardo Chailly et des forces de la Scala sont attendues avec impatience tant de tels concerts confinent au miracle.


Le site de Tamara Wilson
Le site de René Barbera
Le site de l’Orchestre philharmonique de la Scala



Sébastien Gauthier

 

 

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