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Une poignante Histoire du soldat à l’Opéra de Lyon

Lyon
Caluire-et-Cuire (Radiant Bellevue)
04/25/2018 -  et 26, 27, 28, 29 avril 2018
Igor Stravinsky : Histoire du soldat
Sébastien Dutrieux (comédien)
Musiciens de l’Orchestre de l’Opéra de Lyon, Kazimierz Olechowski (violon et direction)
Alex Ollé/La Fura dels Baus (mise en scène), Lluc Castells (décors et costumes), Elena Gui & Urs Schönebaum (lumières), Emmanuel Carlier (vidéo)


(© Bertrand Stofleth)


«Entre Denges et Denezy/Un soldat qui rentre chez lui/Quinze jours de congé qu’il a/Marche depuis longtemps déjà/A marché, a beaucoup marché/S’impatiente d’arriver/Parce qu’il a beaucoup marché». Ce sont les premières lignes du poème de l’écrivain suisse Charles Ferdinand Ramuz narrant l’histoire de ce soldat qui, lors d’une permission, fait la rencontre du Diable et subit par la suite de funestes épreuves. Après une rédemption éphémère, le soldat perd son âme et est emporté par le Diable. Réfugié en Suisse – où il vivait avec les siens dans une quasi-misère –, le compositeur russe Igor Stravinsky compose Histoire du soldat avec une grande économie de moyens: sept musiciens seulement, choisis pour représenter tout l’orchestre, et trois acteurs. Ce spectacle de tréteaux, destiné à divertir les soldats du front, fut joué pour la première fois dans une toute petite salle de Lausanne, en 1918.


En coproduction avec les opéras de Lausanne et Montpellier, et en coréalisation avec le Radiant Bellevue de Caluire-et-Cuire où le spectacle est donné, l’Opéra de Lyon a convié le fameux homme de théâtre catalan Alex Ollé, signataire dans la Capitale des Gaules de productions remarquées. Procédé que nous avions déjà vu avec ce titre, un seul et même comédien incarne ici les trois personnages du drame, et endosse ainsi les rôles du Soldat, du Diable et du Narrateur. Les notes d’intention nous apprennent que «le narrateur n’est pas un personnage extérieur à l’action, mais l’alter ego du Soldat, la partie de lui-même qui reste en vie, qui se souvient et qui nous raconte l’histoire de son passage par la guerre». Formidable, le comédien français Sébastien Dutrieux réussi le tour de force de faire exister pleinement, et de manière évidemment parfaitement différenciée, chacun des protagonistes. Pour le reste, l’action est transposée de nos jours dans une chambre d’hôpital, où un double du Soldat est plongé dans le coma. Contre le mur en carrelage blanc, tout en longueur, de la chambre sont projetées des images de conflits armés, avec leur cortège d’horreur et de scènes très crues (telle une très réaliste scène de torture façon Abou Graïb). Sophistiquée, la mise en scène d’Ollé, avec l’aide de Lluc Castells pour les décors et les costumes, rend lisibles la morbidité et la mélancolie parfois insupportable de cette histoire dont la naïveté calculée dissimule une peur existentielle commune à chacun.


Surplomblant le plateau, le groupe de musiciens, issu de l’Orchestre de l’Opéra de Lyon, s’avère d’une précision remarquable. Dirigé par Kazimierz Olechowski à partir de son violon (considéré ici comme l’incarnation de l’âme du Soldat), il parvient à amalgamer les timbres en un ensemble parfaitement soudé, sans brimer la personnalité de chacun des musiciens: le commentaire orchestral semble avoir été confié à une sorte de chœur à sept voix fortement différenciées, qui distillent avec éclat le venin souvent agressif mais toujours chatoyant du langage stravinskien.



Emmanuel Andrieu

 

 

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