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Alain Planès au cœur de Debussy

Paris
Maison de la radio
03/09/2018 -  et 11* mars 2018

9 mars, 20 heures
Claude Debussy : Suite bergamasque – Danse bohémienne – Arabesques n° 1 & n° 2 – Rêverie – Ballade (slave) – Mazurka – Tarentelle styrienne (Danse) – Images oubliées – Pour le piano – Estampes


11 mars, 11 heures
Claude Debussy : Berceuse héroïque – Pièce pour l’œuvre du vêtement blessé – Elégie – Les soirs illuminés par l’ardeur du charbon – Epigraphes antiques – La Boîte à joujoux – Etudes (Livre I)
Alain Planès (piano)


A. Planès (© Eric Larrayadieu)


Bicentenaire Debussy à Radio France. En confiant l’intégrale pour piano à Alain Planès, la maison ronde n’avait rien à craindre. Peu de pianistes ont autant d’intimité avec l’œuvre du compositeur de La Mer. Depuis des décennies, Alain Planès le fréquente et l’interroge. Certains le bousculent, le veulent ascétiquement minéral, pour mieux en souligner la prophétique modernité. D’autres l’enferment dans les brumes d’un impressionnisme aux contours estompés. Rien de tel chez lui : la sonorité est d’une rondeur charnue et sensuelle, d’une magnifique profondeur, toujours timbrée, même lorsqu’il joue pianissimo. Mais il ne s’en grise pas : les lignes restent claires et quand l’écriture est plus verticale, chaque note résonne. Ce Debussy-là ne regarde ni en arrière ni devant lui : il est lui-même et de son temps. Le grand Steinway de concert sonne d’ailleurs comme un de ces pianos d’époque sur lesquels il aime à le jouer – tour de force témoignant d’une maîtrise parfaite du clavier.


En quatre concerts, tout le piano de Debussy nous est donné, jusqu’aux réductions à deux mains des Epigraphes antiques et de <.I>La Boîte à joujoux. Chacun, en général, respecte la chronologie, mais sans être esclave – La Boîte à joujoux précède le Premier livre des Etudes, dont le Second livre vient avant celui des Préludes. Les intégrales sont parfois monotones : Alain Planès, heureusement, capte l’esprit de chaque partition. La Suite bergamasque conserve des accents fauréens, l’ombre de Massenet traverse parfois les Arabesques, les Estampes oscillent entre l’exotisme grisant de « Pagodes » ou « Soirée dans Grenade » et la volubilité capricieuse de « Jardins sous la pluie », les Epigraphes antiques baignent dans la nostalgie de lointains fantasmés, les six premières Etudes, qu’on entend rarement aussi dominées, sont d’une virtuosité fantasque – superbe « Etude pour les octaves ».


Un fil relie pourtant l’ensemble : la conduite très étudiée et très équilibrée du discours – alors que chez d’autres elle tourne sur elle-même, la musique avance toujours, le pianiste se méfie des abandons et canalise le vagabondage rhapsodique. Héritage d’une tradition française, incarnée par son maître Jacques Février ? Mais la concentration du jeu doit peut-être aussi à la fréquentation de Rudolf Serkin à Marlboro. C’est cet équilibre, d’ailleurs, que certains reprochent à la démarche d’Alain Planès – certes on leur concédera que La Boîte à joujoux manque un peu d’humour. Une démarche qui fait de Debussy le fils spirituel de Chopin, de ces miniatures de jeunesse auxquelles il donne un relief aux grands cycles de la maturité. N’est-ce pas, justement, ce qui la légitime ?



Didier van Moere

 

 

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