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Deux visages de la modernité

Paris
Philharmonie
02/21/2018 -  et 22* février 2018
Jörg Widmann : Concerto pour alto
Gustav Mahler : Symphonie n° 9

Antoine Tamestit (alto)
Orchestre de Paris, Daniel Harding (direction)


A. Tamestit (© Alvaro Yanez)


Quel plaisir de retrouver Antoine Tamestit dans ce Concerto pour alto qu’il a presque coécrit avec Jörg Widmann – et créé in loco au côté du même Orchestre de Paris en 2015. Un Concerto ? Pas tout à fait, même s’il revisite la virtuosité le lyrisme consubstantiels au genre, même si l’on retrouve aussi, au-delà de la continuité du discours l’alternance traditionnelle des mouvements vifs et lents. Plutôt, une action, une histoire dont le soliste serait à la fois le narrateur et le protagoniste, presque le danseur : au début à côté des harpes, il déambule à travers l’orchestre, dialoguant avec les pupitres, parfois non sans humour – réponse insolente du tuba, pour retrouver à la fin sa place de concertiste. Frappé comme une percussion, l’instrument joue beaucoup pizzicato, se déchaîne parfois furieusement, mais peut aussi chanter, souvent soumis à rude épreuve en tout cas. Une œuvre à voir autant qu’à écouter, les musiciens étant également répartis selon un placement spécifique. Ce n’est pas seulement l’écriture du genre que questionne Widmann, mais aussi le cérémonial de son exécution. Antoine Tamestit est tel qu’en lui-même, superbe donc, l’orchestre paraît plus libéré qu’en 2015 – il avait dû apprendre la partition en quelques jours – sous la direction d’un Daniel Harding coloré et complice.


La Sixième Symphonie de Mahler, donnée en septembre pour la rentrée de l’orchestre, ne nous avait pas convaincu. La Neuvième, en revanche, a révélé un Daniel Harding plus ouvert à l’émotion, plus engagé. Ne lui demandons pas d’être Bernstein, c’est contraire à sa nature – l’Américain, d’ailleurs, incarnait un style d’interprétation parmi d’autres. Le chef britannique s’attache d’abord à la structure de la partition, dès un premier mouvement dont il maîtrise parfaitement la durée, sans la fragmenter malgré les ruptures de ton. Lecture analytique, mais pas cérébrale – ce qu’on pouvait reprocher à sa Sixième, appuyée sur un sens de la dramaturgie, à partir du respect des indications de Mahler. Par l’harmonie et les sonorités, cet Andante comodo anticipe aussi pertinemment Schoenberg. Les volets médians semblent moins réussis, parce qu’ils manquent un peu de caractère : pas assez d’humour viennois dans le Ländler, de sarcasme dans le Rondo-Burlesque, pourtant plein de fougue. L’Adagio final, en revanche, renouvelle et amplifie la réussite du premier mouvement, va même plus loin dans l’émotion, magnifiquement conduit, d’un lyrisme irradiant qui rappelle beaucoup le final de la Troisième Symphonie et dont Harding, à l’exemple d’un Abbado dont il fut l’assistant, ne fait pas un adieu désespéré. D’un pupitre à l’autre, l’orchestre est celui des grands, des très grands soirs, pour nous présenter deux visages de la modernité.



Didier van Moere

 

 

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