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Le baba cool et la fashionista

Geneva
Victoria Hall
12/15/2017 -  
Leos Janácek: Sonate pour piano et violon, JW 7/7
Franz Schubert: Fantaisie en ut majeur, opus 159, D. 934
Claude Debussy: Sonate n° 3 pour violon et piano Ludwig van Beethoven: Sonate pour piano et violon n° 7, opus 30 n° 2

Leonidas Kavakos (violon), Yuja Wang (piano)


Le duo que forment depuis déjà plusieurs années Leonidas Kavakos et Yuja Wang est pour le moins inhabituel. Le violoniste grec est fidèle à lui-même avec son look « baba cool », sa sempiternelle barbe de quelques jours et sa chemise bleue droite sortant de son pantalon tandis que la pianiste chinoise est mondialement connue pour ses tenues de fashionista que l’on associe plus à un défilé de mode qu’à une salle de concert.


L’habit ne fait pas le moine ni le musicien, il ne faut pas s’arrêter à des telles considérations. Ce sont tous deux des artistes d’excellence d’une profonde intégrité musicale. Kavakos se distingue par un archet sans le moindre poids et une excellence dans les nuances piano-pianissimo tandis que Wang a démontré qu’en plus de sa technique époustouflante, elle est également très crédible dans des pièces classiques. Tous deux ont joué ensemble de nombreuses fois, ce qui se traduit par une mise en place de grande qualité avec en particulier un naturel dans le suivi des rubatos des deux musiciens.


La Sonate pour piano et violon de Janácek est probablement de cette soirée l’œuvre qui convient le moins à ce duo. Yuja Wang favorise une approche très dramatique n’hésitant pas à faire sonner et rugir son piano tandis que Leonidas Kavakos cherche des couleurs trop pâles et se laisse trop couvrir par sa partenaire. L’Allegretto, où le violon devrait intervenir avec beaucoup de mordant, est décevant et les pianissimos qui suivent le thème indiqué par le compositeur « féroce » ne sont pas assez audibles.


Isaac Stern avait souvent souligné la difficulté de la partie de violon de cette Fantaisie en ut de Schubert et en particulier de ses variations centrales. Le niveau instrumental des deux musiciens est très impressionnant. Kavakos nous convaincrait presque que le violon était l’instrument de prédilection de Schubert tandis que Wang trouve des trésors dans la richesse harmonique de cette œuvre. Il y a cependant un petit bémol. Il s’agit d’une des dernières pièces de Schubert et cette Fantaisie d’une apparence classique et dont la thématique est débonnaire renferme un dramatisme qui ne demande qu’à sortir. Ce Schubert a le potentiel d’être aussi d’être aussi tendu que du Janácek alors qu’il est ici un peu trop sage, un peu trop viennois...


La seconde partie est d’un très haut niveau, les qualités et caractéristiques des artistes étant plus alignés avec les œuvres jouées. La finesse de jeu des deux musiciens et leur élégance en font des artistes idéaux pour une Sonate pour violon et piano de Debussy pleine de poésie et si riche en nuances. La Sonate opus 30 n° 2 de Beethoven est pleine de vigueur et de jeunesse. Le Scherzo est bondissant. Les musiciens s’équilibrent et se répondent avec harmonie et naturel. La ligne musicale est ample. Les musiciens trouvent cette pulsation rythmique qui est si essentielle dans la musique de Beethoven.


Ces deux musiciens pourraient remplir leurs agendas avec exécutions sans fin du Concerto pour violon de Sibelius et du Premier Concerto de Tchaïkovski. C’est un signe de leur qualités artistiques de faire de la musique de chambre à ce niveau et d’explorer des répertoires que l’on n’entend pas assez. Très applaudis par une salle quasiment pleine, ils donnent en bis une pièce de Szymanowski, compositeur qui comme Janácek a été absent de cette salle depuis au moins dix ans.



Antoine Lévy-Leboyer

 

 

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