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L’œil et l’oreille Paris Cité de la musique 11/21/2017 - Johann Sebastian Bach : Cantates «Wir müssen durch viel Trübsal», BWV 146, «Wer weiss, wie nahe mir mein Ende», BWV 27, «Liebster Gott, wenn werd ich sterben ?», BWV 8, et «Ich elender Mensch, wer wird mich erlösen», BWV 34 Joanne Lunn (soprano), Tim Mead (alto), Nick Pritchard (ténor), Christian Immler (basse)
Pygmalion, Raphaël Pichon (direction)
Aragorn Boulanger, Cie 14:20 (magie)
T. Mead (© Andy Staples)
Deuxième programme de «Bach en sept paroles» (voir par ailleurs ici), «De passage» était à la hauteur du premier programme avec un degré de plus dans la distraction due aux intervenants non musicaux.
Austère propos que ce «passage», thème souvent abordé par Bach, de la mort qui délivre d’une vie pour une autre. Le choix des quatre cantates était exceptionnel avec de belles raretés comme Wir müssen durch viel Trübsal (BWV 146, «Il nous faut traverser maintes tribulations pour entrer dans le royaume de Dieu»), dont la Sinfonia avec orgue obligé n’est autre que le premier mouvement du Concerto pour clavecin en ré mineur, dont on retrouve le thème de l’Adagio dans l’air d’alto. L’orgue était tenu par le magnifique instrumentiste Matthieu Boutineau de l’ensemble Pygmalion.
Quelques remplacements étant survenus à la dernière minute, le quatuor vocal n’était pas aussi exceptionnel qu’au premier concert, à l’exception du contre-ténor anglais Tim Mead. La réalisation des éclairages du concert était plus soignée que précédemment et tout à fait adaptée à la thématique choisie.
Encore plus que lors du premier concert, on exprimera une réserve sur le choix de Raphaël Pichon de faire appel à des personnalités extérieures pour enrichir la soirée, dans l’objectif d’amener un autre public à venir écouter cette musique, et à l’écouter différemment. Pour ce deuxième concert, la part externe était confiée une compagnie de magie et chorégraphie, la Cie 14:20, et Aragorn Boulanger. Cette performance, spécialement conçue pour accompagner la Cantate BWV 48 «Ich elender Mensch, wer wird mich erlösen» («Misérable que je suis, qui me délivrera?»), consistait en la déambulation d’un homme sur scène, semblant défier les lois de la gravité tant sa souplesse lui permettait de contorsions. Jusqu’à se hisser complétement à l’horizontale et à évoluer couché en apesanteur. Spectacle tout à fait bluffant, magnifiquement éclairé par Elsa Revol, pendant lequel l’esprit, l’œil surtout, était totalement occupé à l’apprécier et essayer d’en comprendre le trucage. On n’a bien évidemment pas entendu au même niveau de concentration que le reste du concert la cantate qu’il accompagnait.
Le projet Bach de Raphaël Pichon est suffisamment porteur pour se suffire à lui-même, son public vient pour lui et/ou pour Bach et de plus la communication de la Cité de la musique n’est en rien axée sur ces intervenants extérieurs. On n’a pas eu l’impression de voir ce soir-là un public différent de celui qui se presse aux concerts de musique baroque. Sans vouloir dénigrer complétement l’optimisme de Raphaël Pichon sur ce projet, il faut hélas bien constater encore que trop sollicité, l’œil peut distraire l’oreille.
Le concert en intégralité sur le site Culturebox:
Olivier Brunel
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