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Premiers transports (festivaliers) que nul n’oublie… Le volet lyrique.

Montpellier
Opéra Berlioz
07/16/2001 -  et 23, 31 juillet 2001

Pietro Mascagni : Cavalleria Rusticana
Domenico Monleone : Cavalleria Rusticana

Denia Mazzola-Gavazzeni, soprano : Santuzza - Janez Lotric, ténor : Turiddu - Jean-Philippe Lafont, baryton : Alfio - Elizabeth Laurence, mezzo-soprano : Nunzia, Lucia - Nanà Kavtarashvili : Lola - Giancarlo Tosi : Brasi.
Chœur de la Radio Lettone - Orchestre National de Montpellier
Languedoc-Roussillon, Friedemannn Layer (direction)


Franco Alfano : Risurrezione
Denia Mazzola-Gavazzeni, soprano : Katiusha - Antonio Nagore, ténor : Dimitri - Vladimir Petrov, baryton : Simonson - Laura Brioli, mezzo-soprano : Anna, la Rossa - Jacqueline Mayeur : la Gobba - Giancarlo Tosi : un Gardien-Chef -
Nanà Kavtarashvili : la Gouvernante, la Korablewa.
Chœur de la Radio Lettone - Orchestre National de Montpellier
Languedoc-Roussillon, Friedemannn Layer (direction)


Franz Schmidt : Notre-Dame de Paris
Brigitte Hahn (soprano) : Esmeralda - Michael Volle (baryton) : l’Archidiacre - Ralf Lukas (basse) : Quasimodo - Stuart Skelton (ténor) : Phoebus - Robert Künzli (ténor) : Gringoire - Elizabeth Laurence (mezzo-soprano) :
Falourdel - Jean-Marc Ivaldi : un Officier.
Chœur de Radio- France - Orchestre National de Montpellier
Languedoc-Roussillon, direction : Armin Jordan.


Passionnant exercice de confrontation : deux Cavalleria en cette soirée du 16 Juillet ; Monleone contre Mascagni ? Tous les mélomanes connaissent à coup sûr le chef d’œuvre de ce dernier. Or, il est loin d’en être de même pour l’autre Cavalleria, marginale, de l’obscur Monleone… et pour cause : l’œuvre , créée en 1907 en Hollande, reste interdite en Italie pour de non moins obscures raisons de prétendu plagiat. Sans entrer dans les méandres d’une querelle juridique absconse, la véritable question qui se pose est de savoir si cette réplique inconnue est digne ou non d’intérêt musical.

N’en déplaise aux fervents mascagnistes et quitte à prendre le contre-pied du concert d’enthousiasme qui a suivi l’audition du drame le plus célèbre, l’originalité de l’opéra de Monleone, la beauté intrinsèque de la musique, le savoir-faire au plan de l’instrumentation sont indéniables. Sobre, le Monleone est plus ramassé, plus concis, moins mélodramatique ou théâtral que son rival, et plus recherché d’un point de vue symphonique (magnifique prélude orchestral qui dépeint le lent réveil d’une bourgade endormie - de l’impressionnisme à l’italienne !).

Par-delà quelques affinités stylistiques avec Mascagni, Verdi et Boïto, et en dépit d’un final abrupt, la partition est attachante. La soirée est superbe grâce à la prestation en tous points admirable de Denia Mazzola, en état de grâce, au timbre charnel, et à un ténor slovène qui change des sempiternels hurleurs véristes pleurnichards. Orchestre survolté et excellente tenue du chœur letton.

Autre découverte de taille la semaine suivante : Risurrezione, d’après Tolstoï, d’Alfano, renommé seulement pour avoir terminé l’opéra-testament de Puccini. C’est pourtant un musicien à part entière. Maudit soit le sort cruel qui a précipité arbitrairement dans les oubliettes musicales un opéra d’une telle envergure : cette exhumation s’imposait. L’orchestration s’avère constamment inspirée, avec des inflexions curieusement slaves (l’écriture des chœurs rappelle parfois la Khovantchina !), modelant une tension dramatique qui va crescendo.

Quelques accents « butterflyens » parsèment l’ouvrage, avec ici et là des mélismes debussystes ; d’autres font songer à Rimsky-Korsakov, voire Respighi. En outre, le surprenant solo de cor anglais au début du quatrième acte (le plus beau) prouve que le cultivé Franco connaissait parfaitement son Wagner ! Pour être viable, l’opéra exige un soprano dramatique de premier plan en Katiuscha, victime d’une succession d’épreuves qui la conduisent au bagne sibérien. Denia Mazzola dispose de l’endurance et des moyens vocaux requis pour déjouer les pièges d’un rôle aussi lourd. A noter le magnifique mezzo-soprano sombre au grave profond de la jeune Laura Brioli. Une révélation, le baryton racé de Vladimir Petrov. Chœur et orchestre n’appellent que des éloges.

Enfin, dernière création et non la moindre : Notre-Dame de Paris de Schmidt, sans Garou et consorts ! Chef d’œuvre peut-être, mais inégal. Astre solitaire - ouvrage tour à tour cosmopolite, d’une beauté étrange et complexe, et d’une sophistication instrumentale inédite. Le compositeur a imaginé une gigantesque tapisserie sonore qui convoque un effectif non moins monumental. Opéra surtout symphonique, malgré de poignants monologues d’une difficulté ahurissante comme ceux de Gringoire ou de l’Archidiacre. Que l’on songe à une musique réunissant Zemlinsky, Wagner, Strauss, Smetana, Reger, Schrecker, Busoni : et l’on obtient l’hybride, l’inclassable Notre-Dame.

En permanence malmenés, les solistes plutôt inégaux méritent dès lors une indulgence toute particulière, à commencer par un Phoebus dépourvu d’aigus solaires. Brigitte Hahn, placide, sans aura, semble peu concernée par son personnage de bohémienne. Il aurait fallu - là encore - un soprano dramatique wagnérien débordant de santé vocale et de sensualité brûlante. En revanche, un baryton de haut lignage, Michael Volle, incarne un redoutable Archidiacre hiératique, d’une noirceur insondable, enfermé à jamais dans les tourments d’une passion coupable et refoulée. Malgré une légère tendance à couvrir les voix, Armin Jordan parvient avec brio à surmonter les écueils multiples de cette fresque luxuriante.





Etienne Müller

 

 

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