About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Promesses tenues

Paris
Palais Garnier
10/25/2017 -  et 26, 27, 28*, 31 octobre, 2, 3, 4, 7 (représentation annulée), 11, 12, 14, 16 novembre 2017
Agon
George Balanchine (chorégraphie), Igor Stravinski (musique)
Grand Miroir (création)
Saburo Teshigawara (chorégraphie, scénographie, costumes, lumières), Esa-Pekka Salonen (musique)
Le Sacre du printemps
Pina Bausch (chorégraphie), Igor Stravinski (musique), Rolf Borzik (scénographie, costumes, lumières)
Akiko Suwanai (violon), Orchestre de l’Opéra national de Paris, Esa-Pekka Salonen*/Benjamin Schwartz (direction musicale)


Agon (© Agathe Poupeney/Opéra national de Paris)


Attendue comme l’événement de la rentrée, la soirée consacrée par le Ballet de l’Opéra national de Paris (BOP) à trois chorégraphes majeurs et dirigée par le compositeur et chef d’orchestre finlandais Esa-Pekka Salonen a tenu ses promesses: excellence et triomphe.


Le programme d’abord, non comme c’est trop souvent le cas trois pièces assemblées pour faire une soirée mais une véritable réflexion sur la modernité avec probablement la pièce la plus audacieuse de Balanchine, Agon (1957), dans laquelle la complicité des deux Russes exilés américains n’est jamais allée aussi loin dans la réalisation d’une illustration parfaite sur la scène de ce que pouvait être la modernité musicale émanant de la fosse. Puis une création par une des personnalités majeures de la danse contemporaine, le Japonais Saburo Teshigawara, sur le magnifique Concerto pour violon de Salonen. Enfin la reprise du Sacre du printemps dans l’éternelle chorégraphie de Pina Bausch, une de ses plus mythiques, que le BOP conserve depuis vingt ans à son répertoire.


Agon, ballet de Balanchine créé en 1957 par le New York City Ballet, est l’exact contemporain du lancement du premier satellite Spoutnik dans l’espace. Tout un contexte moderne et expérimental se reflète dans une chorégraphie «en noir et blanc» dans laquelle Balanchine laissait de côté le décoratif pour exploiter une modernité qui, comme toute vraie modernité, ne se démode jamais. C’est ce qu’ont prouvé les danseurs du BOP au premier rang desquels Dorothée Gilbert, Karl Paquette, Audric Bezard, Myriam Ould-Braham et Florian Magnenet tout au long de cette courte pièce dans laquelle l’audace des figures n’a d’égale que celle du compositeur, qui se réfère à la Renaissance pour la forme et au sérialisme musical pour l’écriture.



L. Vareilhes & J. Hilaire dans Grand Miroir (© Agathe Poupeney/Opéra national de Paris)


Avec Grand Miroir pour dix danseurs, Saburo Teshigawara signe sa troisième création pour le BOP, un projet encore plus ambitieux que dans AIR en 2003 et Darkness is hiding black horses en 2013, car le substrat musical est de taille: le Concerto pour violon de Salonen, créé en 2009. Cette superbe composition en quatre parties sollicite constamment le violon, ici tenu par Akiko Suwanai, qui en assure la réelle virtuosité et confère grâce à une ample sonorité une belle chaleur à cette musique dont l’écriture, d’une grande sagesse harmonique, est toujours mélodique. La chorégraphie de Saburo Teshigawara, qui s’inspire du poème «La Musique» extrait des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire, n’atteint pas les sommets de la musique qu’elle accompagne. Grâce à de savants éclairages du chorégraphe, responsable aussi de la scénographie minimaliste et des costumes qui confèrent des couleurs vives à la chair des interprètes principaux, la première partie se déroule comme un vol d’électrons libres bien dans le style hyper-cinétique de Teshigawara quand il danse en soliste, se coulant dans le flux musical très tendu, percussif et chromatique. Mais très vite, le procédé tourne en rond et patine. Pour la dernière partie de l’œuvre, très lyrique, on aurait attendu l’équivalent d’un tendre pas de deux pour coller au plus près de l’émotion. Mathieu Ganio, Lydie Vareilhes, Emilie Cozette, Germain Louvet et Grégory Gaillard sont les danseurs principaux de cette chorégraphie.



Le Sacre du printemps (© Agathe Poupeney/Opéra national de Paris)


Le rituel du Sacre de Pina Bausch (1975) commence dès l’entracte qui le précède quand les techniciens déversent et étalent sur la scène les kilos de tourbe fraîche dans laquelle se déroule ce rite païen, une de ses plus belles chorégraphies, dont aujourd’hui l’interprète choisie par la chorégraphe allemande disparue en 2009, la danseuse étoile Eleonora Abbagnato (aujourd’hui directrice du ballet de l’Opéra de Rome), est la dernière à avoir participé à la création parisienne en 1997. La relève est magnifiquement assurée par les jeunes danseurs du BOP, qui en perçoivent bien toute la sauvagerie, ainsi que pour ce rôle de l’Elue, qui sera tenu en alternance par Valentine Colasante et Alice Renavand. Chaque représentation de ce Sacre agit de façon magnétique sur le public et provoque des applaudissements sans fin.


La présence dans la fosse d’Esa-Pekka Salonen ajoutait un immense prestige à ces premières représentations (Benjamin Schwartz dirigera l’Orchestre de l’Opéra national de Paris à partir du 2 novembre, Salonen assurant pour sa part la direction de la reprise de la mise en scène de Patrice Chéreau de De la maison des morts de Janácek à partir du 15 novembre à l’Opéra Bastille). La précision rythmique n’excluant pas un grand geste lyrique du chef finlandais a conféré à ces trois œuvres, outre le fil conducteur qu’il a rendu évident, une grande soirée musicale à la tête d’un Orchestre de l’Opéra de Paris en grande formation dans une forme éblouissante.



Olivier Brunel

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com