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Enthousiasme, passion et générosité

Orléans
Talcy (Eglise Saint-Pierre)
07/29/2017 -  et 30* juillet 2017

29 juillet
«Autour du Quintette»
Robert Schumann : Quintette pour piano et cordes en mi bémol majeur, opus 44
César Franck : Quintette pour piano et cordes en fa mineur, FWV 7

Alena Baeva (violon), Alexeï Lundin (violon), Jean-Baptiste Aguessy, Léa Hennino (*) (alto), Christian-Pierre La Marca, Vytautas Sondeckis (*) (violoncelle), Arthur Ancelle (*), Ludmila Berlinskaïa (piano)


30 juillet
«La Russie du Groupe des Cinq»
Alexandre Borodine : Quatuor à cordes n° 2 en ré majeur: Nocturne
Mili Balakirev : Suite pour piano à quatre mains (extraits)
César Cui : Kaléidoscope pour violon et piano, opus 50 (extraits)
Modeste Moussorgski : Une larme – Porte-enseigne Polka – Gopak
Nicolas Rimski-Korsakov : Le Vol du bourdon
Piotr Ilitch Tchaïkovski : Souvenir de Florence, opus 70
Alena Baeva, Alexeï Lundin (violon), Léa Hennino, Jean-Baptiste Aguessy (alto), Christian-Pierre La Marca (violoncelle), Vytautas Sondeckis (violoncelle), Arthur Ancelle Ludmila Berlinskaïa, Tatiana Fedoseeva (piano), Adélaïde Ferrière, Sylvain Borredon (marimba)




La silhouette du château de Talcy se découpe dans la plaine de la Beauce, non loin de Beaugency. Cette gracieuse demeure Renaissance, exceptionnellement conservée, qui abrita Cassandre à qui Ronsard consacra tant de sonnets et plus tard Diane, muse du jeune poète et soldat Agrippa d’Aubigné, semble figée dans le temps. Séduits par le charme du lieu, les pianistes Ludmila Berlinskaïa et Arthur Ancelle décident d’y fonder un festival dans l’église attenante au château. Pour sa cinquième édition, La Clé des Portes proposait un programme habilement composé d’œuvres autour du chiffre cinq et avait invité de prestigieux interprètes russes auxquels s’étaient joints quelques étoiles montantes de la jeune génération de musiciens français.


Entouré des violonistes Alexeï Lundin, Alena Baeva, de l’altiste Léa Hennino et du violoncelliste Vytautas Sondeckis, Arthur Ancelle abordait le Quintette de Schumann de manière sobre et objective, très contrôlée, s’équilibrant parfaitement avec les penchants fougueux de ses partenaires. Aussi tendre que passionné, l’Allegro brillante initial, bénéficiant d’un tempo large, permettait de goûter les moments de confessions, l’ambiance parfois rêveuse qui s’y développent, s’opposant de manière accrue aux élans plus tourmentés de cette page. Le deuxième mouvement, in modo d’una marcia, offrait de superbes dosages et des échanges subtils entre les cordes et le piano dans un climat introspectif que le rageur agitato central rompait passionnément. Déjà remarquée dans le premier mouvement par sa couleur ambrée, sa projection sonore, son intelligence de la moindre ponctuation musicale et sa justesse, Léa Hennino rendait à la conséquente partie d’alto voulue par Schumann toute l’intensité de son contenu. Un brillantissime scherzo où les musiciens rivalisaient de virtuosité et de vitalité précédait le Finale, abordé de manière quasi folklorique, un peu dans l’esprit des Cinq Pièces dans le style populaire écrites par le compositeur en 1849. La fantaisie, les contrastes, la dynamique et le timing ont évité les impasses ou les errances dans lesquelles tombent parfois les musiciens qui abordent ce mouvement de structure complexe.


Avec Alena Baeva, Alexeï Lundin, l’altiste Jean-Baptiste Aguessy et le violoncelliste Christian-Pierre La Marca, Ludmila Berlinskaïa se lançait à corps perdu dans l’un des plus bouleversants Quintette de Franck que l’on puisse imaginer. Dès le premier commentaire pianistique, le son magnifique, rond et plein de la pianiste, en toute complicité avec un magnifique Steingraeber de la maison Nebout, son élocution et le sens narratif qu’elle transmet à chaque phrase, littéralement habitée, nous absorbent. Les cordes, intenses et vaillantes, conduites par Alena Baeva à la sonorité solaire, si pure, à l’inspiration si juste, tissent la densité du matériau franckiste dans un discours profondément inspiré. Avec la générosité communicative d’Alexeï Lundin, la grande classe de Jean-Baptiste Aguessy, au jeu précis et intègre, le chant magnifique de Christian-Pierre La Marca aux chaudes sonorités et aux élans enthousiastes, engagés, alliés au jeu clair et détaillé de la pianiste usant parcimonieusement de la pédale afin de tracer les lignes essentielles de cette page à l’écriture foisonnante, l’œuvre s’ouvre sur des champs spirituels rarement atteints. Les interprètes poussent cette composition créée en 1880 aux confins de la modernité proche, par exemple, de La Nuit transfigurée de Schönberg avec ces clairs obscurs, ces couleurs et cette ambiance évoquant les tableaux d’Egon Schiele.


Le concert du lendemain, qui rendait hommage au Groupe des Cinq russe, fut l’occasion de découvrir quelques merveilles méconnues. Charme des pièces pour piano de Moussorgski avec notamment une irrésistible Porte-enseigne Polka dans laquelle Arthur Ancelle nous enthousiasma par un jeu virtuose et capricieux; émotion de la Suite pour piano à quatre mains de Balakirev, où les deux pianistes détaillaient ces petits tableaux intimistes avec une sensibilité tout en demi-teinte. Alexeï Lundin, avec les pages de César Cui, rendait à cette magnifique musique toute son âme russe avec l’éloquence, la souplesse, le son si lumineux, les sentiments nostalgiques qui caractérisent le jeu de ce grand violoniste, si bien accompagné par Tatiana Fedoseeva. Un Vol du bourdon foudroyant, transcrit pour deux marimbas par Adélaïde Ferrière et Sylvain Borredon, à la précision diabolique, électrisa le public. Bel exemple d’écriture de quatuor, le Nocturne du Second Quatuor de Borodine, où la circulation du thème principal aux pupitres met en valeur chaque instrumentiste, permettait de goûter la sonorité suave et la sensibilité de Vytautas Sondeckis, ses élans expressifs et généreux, et l’on retrouvait, évidemment, les mille qualités de ses partenaires. Les cordes se réunissaient une dernière fois pour l’un des plus spectaculaire Souvenir de Florence de Tchaïkovski qu’il nous ait été donné d’entendre. Apothéose flamboyante de cette réunion d’artistes merveilleux, inspirés et engagés et quelque peu épuisés d’avoir tant donné.


En bis, tous les musiciens bravèrent les pièges rythmiques de Take Five in Minimalism, commande du festival au compositeur moscovite Konstantin Chiriaev dans cette amusante paraphrase de la célèbre page à cinq temps de Dave Brubeck.



Christian Lorandin

 

 

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