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(R)évolution(s)

Montpellier
Salle Pasteur
07/23/2017 -  
15 heures
Alban Berg: Sonate, opus 1
Béla Bartók: Bagatelles, opus 6, Sz. 38 (extraits)
Anton Webern: Variations, opus 27
Arnold Schönberg: Suite, opus 25
Pierre Boulez: Sonate pour piano n° 1

Florent Boffard (piano)


17 heures 30
Franz Liszt: Grosse Concert-Phantasie über spanische Weisen, S. 253 – Années de pèlerinage (Italie), S. 161: Sonnets de Pétrarque CIV et CXXIII – Sonate en si mineur, S. 178
Andrei Korobeinikov (piano)


F. Boffard (© Philippe Gontier)


Le Festival de Radio France Occitanie Montpellier, qui se tient du 10 au 28 juillet, consacre le dimanche 23 à son thème, les révolutions, mais en plaçant cette fois aussi le «r» entre parenthèses. Trois récitals de piano rythment la journée à la Salle Pasteur, pour établir une correspondance entre les révolutions politique et sociale, d’une part, et l’évolution du langage pianistique et de la facture instrumentale, d’autre part.


Après Herbert Schuch, pour ceux qui se sont privés de déjeuner, Florent Boffard propose à 15 heures un programme articulé autour de la Seconde Ecole de Vienne. Comme il s’agit d’un récital gratuit, comme celui de ce midi, une file se forme devant les portes de la salle plus d’une demi-heure avant le début, une véritable tradition dans ce festival, mais le public n’occupe pas tous les sièges, loin de là. Le taux de remplissage se révèle toutefois remarquable, compte tenu du caractère ardu et impopulaire des œuvres retenues.


Une présentatrice introduit chaque pièce au fur et à mesure, ce qui suggère que cette musique doit encore aujourd’hui être expliquée, et même défendue. Le pianiste ne manque d’ailleurs pas d’ajouter quelques mots d’explications, et ce à deux reprises: avant les Variations (1937) de Webern, dont il livre une exécution qui conserve la nature austère et insaisissable de ce diamant noir, et avant une Première Sonate (1946) de Boulez énergique, inflexible et expressive.


Ce pianiste clairvoyant et maître de ses moyens témoigne de son sens de la construction dans la Sonate (1911) de Berg, la rigueur n’excluant pas la sécheresse. Ce jeu acéré et délicat profite aux extraits des Bagatelles (1905) de Bartók, un choix judicieux dans ce contexte, ce cahier avant-gardiste éclairant une part moins connue du catalogue du compositeur hongrois; la Dixième conclura le récital, pour prendre congé du public. La Suite de Schönberg affiche aussi clarté et fulgurance, l’interprète caractérisant avec finesse chaque pièce, tout en garantissant l’unité du cycle. Ce récital complexe mais captivant procure une impression d’évidence, tant cette musique sonne sous les doigts du pianiste avec netteté et sensibilité.



A. Korobeinikov (© Irene Zandel)


Le festivalier indifférent à la prestation de Florent Boffard à 15 heures aura probablement éprouvé de grands frissons avec Andrei Korobeinikov à 17 heures 30. Le pianiste consacre son programme à Liszt, témoin d’insurrections (1830, 1848) et grand acteur de l’évolution musicale du dix-neuvième siècle, en particulier quant au principe du récital tel que nous le connaissons aujourd’hui. Cet ogre russe du clavier dévoile la diversité de sa palette dans une Grande Fantaisie de concert sur des thèmes espagnols (1853) haute en couleur et marquée par des inflexions franches et une impulsion impeccable.


D’une virtuosité sans limite, Korobeinikov se montre imaginatif dans les Sonnets n° 104 et 123 de Pétrarque extraits de la Deuxième Année de pèlerinage (1839-1849), où il instaure de beaux instants de poésie et d’émotion. Le toucher est délicat, mais consistant, tandis que la conduite de la ligne demeure souple et lyrique. Korobeinikov livre ensuite une Sonate en si mineur (1853) intimement habitée et puissamment narrative. Cette interprétation grandiose et intense s’appuie sur des capacités digitales souveraines, ce qui engendre une sonorité splendide et des transitions formidablement amenées.


Ce pianiste infaillible et éloquent n’impose cependant pas de conception foncièrement audacieuse, à l’exception d’une tendance assumée à appuyer les contrastes, certains passages étant animés d’un élan irrépressible, voire vertigineux. La Sonate dégage ainsi un sentiment de cohérence et d’unité, l’interprète ne cessant d’impressionner par son engagement physique.


En revanche, il vaut mieux oublier les bis, deux transcriptions des lieder Auf dem Wasser zu singen et Le Roi des aulnes: ce qui fonctionne dans Liszt s’applique moins à Schubert, qui souffre d’un jeu par moments trop martelé.


Le site d’Andrei Korobeinikov



Sébastien Foucart

 

 

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