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Inactuel Falstaff

Aix-en-Provence
Théâtre de l’Archevêché
07/07/2001 -  et 10, 13* et 15 juillet 2001
Giuseppe Verdi : Falstaff
Willard W. White (Falstaff), Wolfgang Ablinger-Sperrhacke (Dottor Cajus), Santiago Sanchez Jerico (Bardolfo), Paolo Battaglia (Pistola), Charlotte Hellekant (Meg Page), Geraldine McGreevy (Alice Ford), Miah Persson (Nanneta), Nora Gubisch (Mrs Quickly), Marcus Jupiter (Ford), Yann Beuron (Fenton)
Choeur de l’Académie européenne de musique
Orchestre de Paris, Enrique Mazzola (direction)
Herbert Wernicke (mise en scène)



Il est des opéras desquels il semble impossible de sortir d’une imagerie simple et naïve tant celle-ci découle immédiatement et de façon univoque de la partition. Le compositeur et le librettiste fixent si bien dans le détail le lieu, le contexte, les répliques et les situations que le «théâtre» y est déjà présent. Un Falstaff, ou une Bohème pour prendre un autre exemple, par un metteur en scène moyen et sans imagination, ça fonctionne encore parce que la scène vit déjà dans le texte (musique, répliques, didascalies). Cette sorte d’assurance tous risques contre les metteurs en scène médiocres a par contre comme inconvénient de figer le regard que l’on porte sur l’oeuvre. Comment enrichir les résonances de ces opéras sans les trahir, c’est tout le problème !


Herbert Wernicke a marqué l’histoire de la mise en scène par des productions exceptionnelles : citons Boris Godounov à Salzbourg, Le Chevalier à la rose à Salzbourg et à Paris et qui sera repris l’année prochaine à Bastille, Moïse et Aaron, La Calisto, etc. Il n’est pas du genre à se fondre dans le moule de la tradition, ni d’ailleurs à tout mettre sans dessus dessous comme Peter Sellars. Son Falstaff était attendu et nous aura surpris, agréablement, par un contre-pied audacieux et intelligent : Falstaff n’est pas obèse «mais», si l’on peut dire, il est noir ! C’est en effet le jamaïcain Willard White qui prête sa stature imposante, et à peine bedonnante, au héros. Sous cet angle, le personnage prend plus d’épaisseur, les commères révèlent surtout leur propre méchanceté, la fable devient plus sombre (plus shakespearienne ?) : on est toujours prompt à se moquer de celui qui est différent, le gros, le noir, le marginal... On rit bien sûr, car le jeu d’acteur très vif et animé de Wernicke (dans un décor unique en bois ménageant de multiples ouvertures) saisit le nerf de la comédie, mais d’un rire moins superficiel. Falstaff n’est plus un vieux gros sur le retour, mais beaucoup plus que cela...


Willard White, même s’il n’a pas la mobilité et la prononciation de Jean-Philippe Lafont (une référence en ce domaine), bénéficie d’amples moyens vocaux et campe un bon Falstaff, plus ironique que bouffon justement. Après El Nino au Châtelet, on pourra réentendre ce magnifique chanteur en août à Orange (le Grand inquisiteur de Don Carlo) et à la rentrée à Bastille dans Rigoletto. Dans une distribution très homogène, on retiendra un très beau couple Fenton/Nanetta (Yann Beuron, Miah Persson), une Meg Page craquante (Charlotte Hellekant) et une très bonne Quickly (Norah Gubisch). Dans une acoustique perfectible, Enrique Mazzola et l’Orchestre de Paris assurent l’essentiel.


Dans la fugue finale, dernier clin d’oeil de Wernicke : le décor est démonté sous nos yeux, le docteur Cajus enlève sa moustache, comme quoi, «Tout dans le monde est farce», même l’opéra !






Philippe Herlin

 

 

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