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Onéguine la routine

Paris
Opéra Bastille
05/16/2017 -  et 19, 22*, 25, 29, 31 mai, 3, 6, 11, 14 juin 2017
Piotr Ilyitch Tchaïkovski : Eugène Onéguine, opus 24
Elena Zaremba (Madame Larina), Anna Netrebko*/Nicole Car (Tatiana), Varduhi Abrahamyan (Olga), Hanna Schwarz (Filipievna), Peter Mattei (Eugène Onéguine), Pavel Cernoch (Lenski), Alexander Tsymbalyuk (Le Prince Grémine), Raúl Giménez (Monsieur Triquet), Vadim Artamonov (Zaretski), Olivier Ayault (Le lieutenant), Gregorz Staskiewicz (ténor solo)
Chœurs de l’Opéra national de Paris, José Luis Basso (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra national de Paris, Edward Gardner (direction musicale)
Willy Decker (mise en scène), Wolfgang Gussmann (décors et costumes), Hans Toelstede (lumières), Athol Farmer (chorégraphie)


P. Mattei, A. Netrebko (© Guergana Damianova/Opéra national de Paris)


La production de Dmitri Tcherniakov avait été louée et s’adaptait à Garnier. L’Opéra a donc ressorti l’Eugène Onéguine de Willy Decker, qui a maintenant plus de vingt ans. Il ne tient pas si mal le coup, grâce sans doute à son dépouillement, avec ce décor unique en plan incliné, certes pas très beau, champ de blé ou champ de neige, symbole de vie et de promesse, de mort et de renoncement. Grâce aussi aux lumières de Hans Toelstede, dont on aime toujours la subtilité. Quelques images restent : celle du duel, avec ces étreintes avortées, celle de la fin, où Tatiana part au bras de Grémine, qu’elle a finalement choisi. Mais le metteur en scène est-il venu régler sa production ? La première partie semble relâchée, carrément ennuyeuse, s’y attend en vain cette direction d’acteurs si tendue qui est sa carte de visite : on n’a pas l’impression d’un vrai plateau. La seconde passe beaucoup mieux, comme si les chanteurs prenaient leurs marques et se mettaient à y croire ; pour le bal, traité comme un rituel funèbre, le ressemblant à un essaim d’oiseaux noirs porte bien la marque du Willy Decker qu’on aime – cela passera dans sa Traviata salzbourgeoise.


Est-ce à cause de cela ? Musicalement, la première partie ne retient pas davantage. Non qu’elle ne soit pas bien chantée. Peter Mattei, notamment, est depuis longtemps un des meilleurs Onéguine qui soit, plus ténébreux que cynique, Pavel Cernoch a la délicatesse stylée de Lenski. Mais ils sentent la routine, le premier paraît un peu gris. Anna Netrebko devait être le phare de la production : elle suscite un sentiment mitigé. Si la voix, toujours glorieuse, affiche un médium et un grave incroyablement charnus pour une soprano, elle s’est un peu empâtée, voire durcie, trop mûre aujourd’hui pour Tatiana, dont les frémissements virginaux lui échappent... et dont les aigus sont souvent peu assurés : on entend plus une grande chanteuse que la jeune fille de Pouchkine, surtout dans une scène de la lettre beaucoup trop éloquente. Elle sera en revanche une vraie princesse Grémine, à la voix déployant ses moires et sa ligne, posée sur le souffle, face à un Onéguine collant enfin à son personnage. Lenski également existe davantage à partir de cette seconde partie, avec un air délicatement phrasé. Et Alexander Tsymbalyuk, même s’il faut passer sur des graves trop modestes, a la noblesse d’un Grémine cette fois sans cheveux blancs, ce qui justifie la fin conçue par Decker. Mais on a connu rôles secondaires mieux tenus : Varduhi Abrahamyan chante plus Carmen qu’Olga, Hanna Schwarz peine, même en Filipievna, à ruser avec l’usure des années, Raúl Gimenez, fatigué aussi, en fait beaucoup trop en Monsieur Triquet.


Edward Gardner laisse la même impression : efficace mais sans raffinement dans la première partie, assez décevant au fond, plus habité dans la seconde, où il nous rappelle quel chef de théâtre il peut être. On aura donc partout attendu le duel pour entrer dans le drame.



Didier van Moere

 

 

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