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Ovation

Marseille
Opéra
05/03/2017 -  & 5, 7, 9, et 11 mai 2017
Léo Delibes: Lakmé
Sabine Devieilhe (Lakmé), Majdouline Zerari (Malika), Cécile Galois (Mistress Benson), Anaïs Constans (Ellen), Emmanuelle Zoldan (Rose), Nicolas Cavallier (Nilakantha), Julien Dran (Gérald), Loïc Félix (Hadji), Marc Scoffoni (Frédéric)
Orchestre et chœur de l’Opéra de Marseille, Emmanuel Trenque (chef du chœur), Robert Tuohy (direction musicale)
Lilo Baur (mise en scène), Caroline Ginet (scénographie), Hanna Sjödin (costumes), Gilles Gentner (lumières), Olia Lydaki (chorégraphie)


J. Dran & S. Devieilhe (© Christian Dresse)


Cette Lakmé, coproduite par l’Opéra-Comique et l’Opéra de Lausanne, a déjà fait l’objet de comptes rendus dans ces colonnes en 2013 et en 2014. La mise en scène de la Suissesse Lilo Baur n’a rien de vraiment répréhensible, sinon que la direction d’acteurs n’est pas son principal atout. Protagonistes et chœur entrent sur scène, bras ballants, chantent, puis sortent de scène; fût-ce à vélo dans le cas de Gérald, cela n’est pas de la mise en scène. Le décor stylisé se veut intemporel. Il est fait, pour le premier acte, d’un rideau de fond de scène transparent et d’une gigantesque motte de terre d’une rare laideur sur, et autour de laquelle évoluent les chanteurs. Pour le deuxième, l’action se déroule autour d’une structure métallique évoquant l’Inde traditionnelle dans une ambiance vivante et colorée. Retour du rideau transparent à l’Acte III, mais cette fois il tombe avec grâce, de même que les lianes qui descendent des cintres et envahissent la scène. L’effet est saisissant.
En dépit de costumes colorés et de lumières vives, le ton du propos reste assez sobre dans l’ensemble, écornant tant soit peu le plaisir que l’on peut attendre de cette irrésistible musique. S’agissant du choix de l’intemporalité, même filigrané, il n’est peut-être pas le meilleur pour illustrer une œuvre dont l’atmosphère est si solidement ancrée dans un exotisme conventionnel et daté que tout prédispose au charme de la désuétude.


Le plateau vocal est la qualité première de cette production. Du plus petit rôle, jusqu’à celui de Lakmé, la distribution est soignée. Tous les chanteurs s’expriment dans un français articulé dont on ne perd pas une miette ; les voix sont agréables, parfois même davantage, tel le Hadji du ténor Loïc Félix ou encore le Frédéric de Marc Scoffoni.
Parcours fulgurant que celui de Sabine Devieilhe depuis son premier prix du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris en 2011, et sa «Victoire de la Musique » en 2015. En peu de temps, elle parvient à s’inscrire dans la lignée des grands sopranos coloratures de l’école française.
Aussi bien dans les deux duos avec Gérald que dans le terrifiant Air des clochettes, elle s’impose naturellement avec une technique sans faille, une diction transparente, un timbre clair, et surtout une indéniable musicalité, même dans le registre suraigu dont elle exécute les acrobaties avec une assurance qui laisse pantois. Mais Sabine Devieilhe n’est pas seulement une mécanique de haute précision. Sa Lakmé, broyée par la rencontre de deux cultures que tout sépare, est touchante et fragile comme un souffle ténu que l’on craint de voir s’éteindre à chaque instant. Les Marseillais lui font une ovation justement méritée qui confine au délire.
Julien Dran est ce soir le Peter Pan de la Fée Clochette. Il revient pour la troisième fois cette saison sur la scène marseillaise, après La Chauve-souris et I Capuleti e i Montecchi et on ne saurait s’en plaindre. En Gérald, il nous livre un « Fantaisies aux divins mensonges » très stylé qui rend belle justice aux longues phrases et au registre haut placé de cet air. Timbre clair, aigus incisifs et articulation soignée sont également au rendez-vous de sa prestation.
Nicolas Cavallier dans le rôle de Nilakantha reçoit lui aussi une belle ovation pour ses stances du deuxième acte, « Lakmé, ton regard se voile ». La voix est puissante et la technique solide.
Majdouline Zerari en Malika n’a pas à rougir de sa contribution, tout particulièrement dans le duo « Dôme épais » avec Lakmé où elle parvient à affirmer sa présence.
Cécile Galois (Mistress Benson), Anaïs Constans (Ellen), et Emmanuelle Zoldan (Rose) contribuent au succès de l’ensemble avec, notamment, une participation de qualité au quintette bouffe des Anglais.
Le chœur de l’Opéra, sous la houlette de son chef Emmanuel Trenque fait, à son habitude, un travail remarquable de cohésion et de clarté dans les pages qui lui sont dévolues.
Le chef américain Robert Tuohy dirige cette partition avec rigueur et le souci louable de ne pas verser dans la sentimentalité. Il souligne avec subtilité le phrasé ingénu et charmeur de la mélodie delibienne. Quant aux musiciens, en particulier les cordes, les flûtes, et les percussions, ils se montrent exemplaires dans la peinture des couleurs orchestrales.


Vraiment, une Lakmé de grande qualité.



Christian Dalzon

 

 

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