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Violetta Blues

Paris
Opéra National de Paris Bastille
06/27/2001 -  30 juin, 2, 5, 7, 10, 12 juillet 2001
Jules Massenet : Manon
Renée Fleming (Manon), Jaël Azzaretti (Poussette), Isabelle Cals (Javotte), Delphine Haidan (Rosette), Marcelo Alvarez (Des Grieux), Jean-Luc Chaignaud (Lescaut), Alain Vernhes (Comte des Grieux), Michel Sénéchal (Morfontaine), Franck Ferrari (Brétigny)
Gilbert Deflo (mise en scène), William Orlandi (décors et costumes), Joël Hourbeigt (lumières)
Orchestre et chœurs de l'Opéra National de Paris, Jesus Lopez-Cobos (direction)

Pas de changement d'appréciation, concernant la reprise du spectacle signé Gilbert Deflo : le bleu peut servir de concept chez Wilson, il n'excuse même pas ici la nullité de la direction d'acteurs et la lourdeur du dispositif scénographique. Restent les costumes somptueux et des éclairages soignés, occasion d'un clin d'œil réussi à Watteau au Cours-la-Reine et au Kubrick de Barry Lyndon à la table de jeu. La fosse brumeuse de Bastille noie les subtils mélanges de couleurs requis par Massenet, que la battue allante mais sans arrêtes et sans nuances de Lopez-Cobos ne contribue guère à faire vivre non plus. La distribution, en revanche, est ce qu'on est en droit d'attendre de mieux en un tel lieu - confiant donc les deux rôles principaux à de grandes voix plutôt qu'à des chanteurs plus jeunes et aux moyens plus modestes mais à même de mieux intégrer la chair du timbre, l'articulation musicale et le mot dans ce qui reste un opéra-comique pensé pour Favart. Les seconds rôles, à majorité francophones, y parviennent à la perfection pour leur part. On aime la triade des cocottes de haut lignage formée par mesdemoiselles Azzaretti, Cals et Haidan, Sénéchal reprend son inénarrable Morfontaine, Chaignaud son Lescaut de bonne tenue (Tézier ou Degout y feraient mieux encore), tandis que la noblesse de phrasé et la diction parfaite d'Alain Vernhes en comte des Gieux soulignent plus cruellement encore la rareté de ce grand artiste sur la première scène parisienne - que ne lui a-t-on confié le Sancho du Quichotte ! Alvarez quant à lui chante pour la première fois en ce lieu le fils indocile. L'inexistence d'un quelconque jeu d'acteur est aisément oubliée devant la beauté naturelle du timbre, la longueur du souffle et la souplesse de la ligne ; la diction appliquée, et contrariant d'ailleurs les qualités ci-devant évoquée, gênera plus. L'élocution de Fleming n'est pas non plus un modèle (le a de Adieu ne s'ouvrira jamais correctement), et la présence scénique d'une rayonnante beauté, mais par trop sophistiquée et un peu froide, peine à rendre crédible la naïveté et la sensualité animale de cette Nana Régence. Cette voix devenue ample, à l'aigu plein et au médium solide, se contraint avec difficulté désormais à l'émission légère et à l'ornementation miniaturiste des passages les plus aigus, où elle délivre quelques sons tendus et laids et irrite par des attaques gonflées par en dessous qui manquent cruellement de grâce. Les moments dramatiques, comme Saint-Sulpice ou le tableau final, transportent en revanche par la franchise du timbre, l'élan des phrases et l'intensité d'une incarnation où les mots trouvent avec infiniment plus de naturel leur juste poids. L'évolution de son profil vocal suggère que le moment est venu pour Fleming d'abandonner Manon pour une courtisane qui supporte mieux de voir l'élégance prendre le pas sur l'érotisme, et où la vocalisation cherche plus les grands écarts que la dentelle, pourvu qu'une ligne noble et un timbre riche soutiennent tout le reste. A quand, donc, Traviata sur cette même scène ?


Vincent Agrech

 

 

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