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Un Trouvère par temps de guerre

Roma
Teatro Costanzi
02/28/2017 -  et 2, 3, 4, 5, 7, 8, 10 mars 2017
Giuseppe Verdi : Il trovatore
Simone Piazzola/Rodolfo Giugliani (Il Conte di Luna), Tatiana Serjan/Vittoria Yeo (Leonora), Ekaterina Semenchuk/Silvia Beltrami (Azucena), Stefano Secco/Diego Cavazzin (Manrico), Carlo Cigni (Ferrando), Reut Ventoreo (Ines), Aleandro Mariani (Ruiz), Riccardo Coltellaci/Francesco Luccioni (Un vieux gitan), Aurelio Cicero/Giordano Massaro (Un messager)
Coro del Teatro dell’Opera di Roma, Roberto Gabbiani (chef de chœur), Orchestra del Teatro dell’Opera di Roma, Jader Bignamini (direction musicale)
Alex Ollé (La Fura dels Baus) (mise en scène), Valentina Carrasco (collaboration à la mise en scène), Alfons Flores (décors), Lluc Castells (costumes), Urs Schönebaum (lumières)


Les bonheurs de la globalisation se traduisent, pour le lyricomane, dans l’accentuation de la tendance aux coproductions, offrant, ad libitum, un accroissement des séances de rattrapage, ou l’opportunité d’apprécier des voix différentes, bénéfice non négligeable pour les piliers du répertoire. Ainsi en est-il du Trouvère réglé par Alex Ollé de La Fura dels Baus, que présente le Teatro dell’Opera de Rome, après Amsterdam et Paris, dans une atmosphère de tranchées suggérée par les masques à ypérite au lever de rideau. L’équipe catalane a en effet choisi de resituer la folie passionnelle du livret de Cammarano et Bardare inspiré par le drame rocambolesque de Gutiérrez au cœur de la démence meurtrière de la Première Guerre mondiale, sans que l’on puisse déceler sans ambages une intention commémorative – si les épées cèdent la place aux pistolets, jusqu’à faire tuer Manrico à bout portant par son frère lui-même, sans la médiation d’une fusillade commandée, les costumes de Lluc Castells ne recherchent pas une explicite transposition temporelle. Ceinte par une muraille de miroirs, la scénographie d’Alfons Flores se meuble, au gré de l’évolution de l’intrigue, de colonnes qui descendent – et remontent – des cintres, jusqu’à creuser des tombes ou suspendre une forêt de piliers baignée par les lumières nocturnes conçues par Urs Schönebaum. On notera par ailleurs, sur ce point, l’esquisse de la dialectique traditionnelle entre la cour du conte et les gitans – ces derniers nimbés d’un rouge ferrugineux.


Deux distributions sont proposées en alternance pour les quatre rôles principaux. En Manrico, Stefano Secco, verdien accompli, possède l’héroïsme un peu rugueux requis, quitte à privilégier l’éclat à l’intégrité du grain sonore, tandis que Diego Cavazzin séduit par un timbre plus rond et homogène, qui fait davantage glisser le personnage vers le belcanto, assumant une vaillance moins crue et plus lyrique, peut-être parfois un peu en deçà de certaines attentes de décibels. De la puissance, le Conte de Rodolfo Giugliani n’en manque pas, et ne s’embarrasse guère de subtilité dans son incarnation, comme dans son émission. Simone Piazzola se révèle plus conforme à la noblesse du maître de Luna, et sait offrir un bel exemple de plénitude musicale, où la longueur de la ligne nourrit les attendus expressifs. Sans négliger la couleur de la Leonora de Vittoria Yeo, celle de Tatiana Serjan résonne d’harmoniques plus riches, avec un vibrato certes plus large, sinon audible, que celui de sa consœur, sans outrepasser pour autant l’équilibre de l’intonation. Quant à Azucena, l’aplomb corsé d’Ekaterina Semenchuk ne doit pas reléguer dans l’ombre la composition honnête de Silvia Beltrami. On retiendra également le Ferrando solide de Carlo Cigni, ainsi que les interventions de Ruiz et Ines, confiées à de jeunes solistes, respectivement Aleandro Mariani et Reut Ventoreo, sans oublier celles du gitan et du messager – Riccardo Coltellaci ou Francesco Luccioni pour le premier et Aurelio Cicero ou Giordano Massaro pour le second, selon les soirs. Préparés par Roberto Gabbiano, les chœurs manifestent leur métier, quand la baguette de Jader Bignamini, au diapason, se concentre sur l’efficacité épique de la partition.



Gilles Charlassier

 

 

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