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Triste soirée Paris Salle Gaveau 12/14/2016 - Johann Sebastian Bach : Concertos brandebourgeois n° 4 en sol majeur, BWV 1049, n° 6 en si bémol majeur, BWV 1051, n° 5 en ré majeur, BWV 1050, et n° 3 en sol majeur, BWV 1048 Benjamin Alard (clavecin)
La Petite Bande, Sigiswald Kuijken (violon, violoncello da spalla et direction)
S. Kuijken
Nouvel exemple de l’absence de toute prise en considération de la culture par les gouvernements actuels, le célèbre ensemble La Petite Bande ne reçoit plus de subvention de la part du Gouvernement belge depuis le mois de juin 2012 (voir ici) et joue désormais sa survie au fil de quelques concerts et enregistrements. Tel était d’ailleurs le message clairement affiché pour le concert de ce soir, justement intitulé «Sauvons La Petite Bande!», dont les bénéfices furent intégralement reversés à l’orchestre, le programme comprenant un message manuscrit de son fondateur Sigiswald Kuijken à l’adresse des spectateurs qui reçurent également, en guise de message d’amitié, un petit propos liminaire énoncé par Marleen Thiers, l’épouse de Sigiswald/
Compte tenu à la fois du contexte et du programme de ce concert, La Petite Bande ayant enregistré une fort belle version des Concertos brandebourgeois en 1995, on s’attendait à un concert d’anthologie. Malheureusement, cette représentation s’est à tous points de vue muée en une totale déconvenue qu’on s’empressera donc d’oublier bien vite. Le fait de disposer d’instruments anciens n’étant en aucune manière une justification pour jouer faux, on est tout d’abord frappé par les dissonances et les problèmes de justesse récurrents qui handicapent principalement le violon ou l’alto solo tenus par Sara Kuijken (Concertos n° 4 et n° 6) ou le violon solo de Sigiswald Kuijken dans le Concerto n° 5, mais qui affectent de manière générale les cordes solistes, la basse continue et les autres instruments s’en tirant beaucoup mieux. On est également surpris, dans le mauvais sens du terme, par la difficulté que certains musiciens semblent éprouver face aux passages techniques des concertos: dans des œuvres aussi connues, l’anicroche se repère d’autant plus facilement, les difficultés d’articulation étant par ailleurs assez nombreuses. Mais surtout, où est la fantaisie? Où est l’enthousiasme? On peut comprendre que les circonstances de ce concert n’incitent guère à la joie mais pourquoi adopter à ce point un jeu des plus besogneux, des plus plats où rien ne vient sortir l’auditeur d’un ennui des plus moroses? Les deux flûtes, fort bien tenues par ailleurs par Barthold Kuijken et Bart Coen, mais souvent couvertes par les quelques cordes qui les accompagnent, offrent un bref réconfort avant que le clavecin souverain de Benjamin Alard (quelle dextérité et quelle souplesse dans le jeu, notamment du redoutable premier mouvement du Cinquième Concerto) ne relève enfin un niveau qu’on aura constamment déploré eu égard au passé de ce si bel ensemble. Si l’on devait tout de même rester sur une image positive, ce serait ce deuxième mouvement du Concerto n° 5, où les frères Kuijken, Sigiswald au violon et Barthold au traverso, se répondirent avec une vraie poésie, accompagnés par la jeune génération incarnée par Benjamin Alard au clavecin: on ne peut que regretter que le passage de témoin qu’on aimerait voir arriver ne se fasse pas...
Hormis ce passage, l’ensemble de la seconde partie du concert donna la même impression de neutralité, même le bis (le dernier mouvement du Troisième Concerto) semblant bien terne et mécanique: pour un tel concert, avouons qu’on attendait quand même autre chose.
Le site de La Petite Bande
Sébastien Gauthier
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