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Bon sang, quel spectacle !

Geneva
Opéra des Nations
11/19/2016 -  et 21, 23*, 24, 26, 27, 29 novembre 2016
Heinrich Marschner : Der Vampyr
Tómas Tómasson (Lord Ruthven), Jens Larsen (Sir Humphrey Davenaut), Laura Claycomb (Malwina), Chad Shelton (Sir Edgar Aubry), Ivan Tursic (George Dibdin), Maria Fiselier (Emmy Perth)
Chœur du Grand Théâtre, Alan Woodbridge (préparation), Orchestre de la Suisse romande, Ira Levin (direction musicale)
Antú Romero Nunes (mise en scène), Tamara Heimbrock (reprise de la mise en scène), Matthias Koch (décors), Annabelle Witt (costumes), Simon Trottet (lumières), Ulrich Lenz (dramaturgie)


(© GTG/Magali Dougados)


Sur la scène de l’Opéra des Nations de Genève, l’hémoglobine coule à flots ; des cœurs et des viscères sont arrachés à tour de bras de corps gisant à terre, provoquant frissons et cris d’effroi parmi les spectateurs. De surcroît, une armée de morts-vivants (superbes choristes du Grand Théâtre) ne cesse de parcourir le plateau plongé dans la pénombre, en quête de chair humaine. Emotions fortes garanties. Le spectacle arrive tout droit de la Komische Oper de Berlin, où il a été créé en avril. Le grand opéra romantique allemand Der Vampyr de Heinrich Marschner (1795-1861), qui dure près de trois heures, a été amputé pour la circonstance de la moitié de son livret et de sa musique par le jeune metteur en scène Antú Romero Nunes, qui en fait un spectacle d’horreur très gore d’à peine 80 minutes. La suppression des personnages secondaires et le resserrement de l’intrigue sur la soif de sang du vampire ont le mérite de rendre la production particulièrement intense et haletante, avec de nombreux effets de surprise.


Les puristes n’ont pas manqué de crier au scandale, d’autant que l’ordre des scènes a été profondément remanié et que les différentes séquences de l’œuvre ont été reliées entre elles par des musiques écrites par Johannes Hofmann, un compositeur allemand de 37 ans. D’ailleurs, le programme de salle décrit cette version du Vampire comme un «théâtre musical d’après Heinrich Marschner». Au diable donc (ou plutôt au vampire) les puristes ! L’occasion est trop belle de découvrir un ouvrage très rarement monté aujourd’hui, même en Allemagne, alors qu’il avait pourtant connu un joli succès à sa création à Leipzig en 1828. Le compositeur a été l’assistant de Carl Maria von Weber, et on peut voir dans son Vampire à la fois la continuation du Freischütz et la préfiguration du Vaisseau fantôme. D’ailleurs, Wagner admirait Marschner. Coïncidence intéressante, c’est à Genève qu’est née l’histoire qui a inspiré Le Vampire. Le livret de l’opéra est fondé en effet sur The Vampyre, une nouvelle de l’écrivain anglais John Polidori, écrite à Genève justement, en 1816, à l’instigation de Lord Byron, qui a proposé un beau soir à ses invites d’imaginer un ouvrage effrayant. C’est dans ces circonstances que Mary Shelley écrira Frankenstein et Polidori The Vampyre.


Le plateau vocal réuni à Genève pour ce Vampire est parfaitement homogène et d’un très haut niveau. Le vampire de Tómas Tómasson possède une forte présence scénique ainsi qu’un timbre sombre et sonore idéal pour le rôle. Le ténor Chad Shelton est très expressif dans son chant et particulièrement investi dans son personnage, hésitant entre sauver sa bien-aimée et ne pas trahir son ami le vampire. Parmi les rôles féminins, Laura Claycomb en Malwina séduit par son chant aérien et éthéré, alors que Maria Fiselier en Emmy Perth émeut par sa fraîcheur et son impétuosité. A la tête d’un Orchestre de la Suisse romande des grands soirs, Ira Levin dirige la partition avec ferveur et précision... mais finit par être, lui aussi, mordu par le vampire… Un spectacle à croquer à pleines dents !



Claudio Poloni

 

 

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