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Sentiment d’évidence

Bruxelles
Palais de la Monnaie, Tour & Taxis
11/03/2016 -  et 5, 8, 10, 13*, 16 novembre 2016
Richard Strauss: Capriccio, opus 85
Sally Matthews (Die Gräfin), Dietrich Henschel (Der Graf), Edgaras Montvidas (Flamand), Lauri Vasar (Olivier), Kristinn Sigmundsson (La Roche), Charlotte Hellekant (Clairon), François Piolino (Monsieur Taupe), Elena Galitskaya (Eine italienische Sängerin), Dmitry Ivanchey (Ein italienischer Sänger), Christian Oldenburg (Der Haushofmeister), Zeno Popescu, Nabil Suliman, Vincent Lesage, Bertrand Duby, Kris Belligh, Pierre Derhet, Maxime Melnik, Artur Rozek (Diener), Florence Bas, Margot-Annah Charlier, Germaine François (Eine junge Tänzerin)
Orchestre symphonique de la Monnaie, Lothar Koenigs (direction)
David Marton (mise en scène), Christian Friedländer (décors, costumes), Pola Kardum (costumes), Henning Streck (lumières)


(© Bernd Uhlig)


Pour le deuxième opéra de sa saison « hors les murs », la Monnaie monte le Capriccio (1942) applaudi à Lyon il y a trois ans. La mise en scène procure un rare sentiment d’évidence, David Marton ayant parfaitement saisi l’esprit et le ton de cet ouvrage. Le décor exploite le principe banal du théâtre dans le théâtre mais la mise en abyme fonctionne admirablement grâce à un dispositif judicieux, une coupe transversale montrant en même temps la scène, les coulisses, la fosse, la salle et les balcons. La scénographie contient de belles idées, de celles qui confèrent une identité à un spectacle et qui portent la signature d’un metteur en scène habile et inventif, comme ces danseuses d’âges différents ou ces plantes disposées en grand nombre à la fin sur le plateau, en écho à une réplique de Clairon dans la quatrième scène.


David Marton a conçu un spectacle intelligent, terme galvaudé mais pertinent dans ce cas. Un bémol, toutefois : la conversation ne s’épanouit pas naturellement dans la configuration et l’acoustique particulières du Palais de la Monnaie, l’inévitable bruit des avions survenant en outre à des moments inopportuns. Deux écrans montrent simultanément, mais sporadiquement, les personnages en plan rapproché, ce qui permet aux spectateurs les plus éloignés d’apprécier la justesse de la direction d’acteur. Une coupure, enfin, a été opérée après la septième scène pour une raison pragmatique : chauffer la salle afin d’«y maintenir une température agréable en cette période automnale », des couvertures étant mises gratuitement à disposition des spectateurs – les conditions ne sont toute de même pas aussi spartiates. Une reprise s’impose donc dans le théâtre rénové pour encore mieux apprécier ce spectacle limpide.


Soudée et entraînée, la distribution a de toute évidence effectué un travail approfondi, ce qui se perçoit, notamment, dans les ensembles, vigoureux et ajustés. Le personnage de la Comtesse sied à ravir à Sally Matthews, qui en possède exactement le format vocal, l’élégance et la sensibilité. La soprano cultive un chant raffiné, mais sans excès de préciosité, qui se signale par sa maîtrise et son sens de la coloration. La Clairon de Charlotte Hellekant se révèle tout aussi crédible, malgré une voix moins séduisante que celle de sa partenaire, la chanteuse incarnant un beau personnage, sophistiqué et sensuel. Dans le rôle du Comte, Dietrich Henschel concilie au mieux les exigences vocales et théâtrales : ligne ferme et nette, attention portée aux mots et à la phrase caractéristique des Liedersänger. Kristinn Sigmundsson compose impeccablement son La Roche, à juste titre acclamé : si la voix paraît parfois courte de grave et de souffle, la basse ne se contente pas de déclamer sa partie, exposant une voix de basse des plus plaisantes dans les phases lyriques. Edgaras Montvidas et Lauri Vasar chantent avec application et dévoilent de beaux timbres, harmonieusement appariés dans leurs joutes, mais Flamand et Olivier manquent d’aura, comparés aux autres. La production n’a pas négligé le couple de chanteurs italiens, la voix de Dmitry Ivanchey, solaire et onctueuse, séduisant davantage ; Monsieur Taupe idiomatique, pour finir, de François Piolino, authentique ténor de caractère, et Majordome présent et bien chantant de Christian Oldenburg.


Le chef, Lothar Koenigs, trouve le ton et l’équilibre de cette musique, la finesse de la mise en place et la précision de la dynamique permettant un dialogue instrumental expressif et naturel. Entendre l’orchestre sonner avec tant de clarté et de plénitude rassure quant à sa forme : les cordes, et ce dès le sextuor initial, s’expriment avec cohésion et souplesse, tandis que les cuivres, en particulier le cor soliste, fort sollicité, interviennent avec éloquence et douceur.



Sébastien Foucart

 

 

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