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Un Mendelssohn de rêve

Paris
Philharmonie 1
02/21/2016 -  & 13 (Ferrara), 15 (Dortmund), 18 (Luxembourg) février 2016
Felix Mendelssohn : Symphonies n° 1 en ut mineur, opus 11, n° 4 «Italienische» en la majeur, opus 90, et n° 5 en ré majeur «Reformation», opus 107
Chamber Orchestra of Europe, Yannick Nézet-Séguin (direction)


Y. Nézet-Séguin (© Marco Borggreve)


L’Orchestre de chambre d’Europe et Yannick Nézet-Séguin, après leur premier programme consacré aux Deuxième et Troisième Symphonies de Mendelssohn, donnaient ce dimanche après-midi dans une Philharmonie de Paris pleine à craquer, un second concert, dédié cette fois aux Première, Quatrième et Cinquième. Ce concert fut un enchantement de chaque instant.


La Première Symphonie n’est pas aussi célèbre que les trois dernières. Composée à l’âge de 15 ans, elle dénote une science orchestrale tout de même très étonnante. Dans l’Allegro molto initial, Yannick Nézet-Séguin joue des contrastes et cisèle un propos foisonnant, sans doute un des traits de la musique orchestrale de Mendelssohn. Dans l’Andante, il parvient à rendre toute la poésie d’une musique qui doit encore beaucoup à Beethoven. Le son de la superbe flûte de Clara Andrada, avec ses incroyables nuances, semble même parfois venir d’ailleurs pendant que la musique circule avec bonheur d’un pupitre à l’autre. Le Menuetto est mené avec élégance et raffinement mais sans surcharger les syncopes. Quant au final, dans lequel pointe déjà la Symphonie «Italienne», il permet à l’Orchestre de chambre d’Europe une brillante démonstration de son exceptionnel niveau. Tout dans la réalisation orchestrale séduit et particulièrement les pizzicati suspendus des contrebasses d’une rare subtilité, un pupitre de violoncelles à l’unisson parfait, des bois très actifs et des cuivres précis et puissants, sans être envahissants. En somme, une vraie démonstration d’excellence orchestrale sous la direction inspirée et fédératrice d’un Nézet-Séguin perfectionniste et ne laissant aucun moment musical sans vie intérieure.


La Symphonie «Italienne» sera également une superbe réussite. Yannick Nézet-Séguin enchaîne assez rapidement les quatre mouvements et, ici aussi, dès le premier, le frémissement de la musique au sein d’un orchestre très réactif est spectaculaire. Les phrases sont conduites jusqu’au bout, les contrechants des violoncelles sont judicieusement soulignés et les traits virevoltants des bois illuminent le propos. Nézet-Séguin réussit particulièrement la toute fin du deuxième mouvement, si proche du Harold en Italie de Berlioz, à tel point que l’on en arrive à se demander qui joue encore dans ce pianissimo qui s’évanouit dans l’acoustique de la salle. Dans le troisième mouvement, l’échange entre les cors, le basson et la flûte, d’une justesse absolue et d’un équilibre parfait, ravit. Le final attaqué, non sans prise de risque (quelles trompettes!), est construit dans une palpitante progression qui étonne tellement chaque étape devient plus saisissante que la précédente. On l’aura compris, cette Symphonie «Italienne» vivante, lumineuse et transparente était également jubilatoire.


Le changement de climat est complet avec la Cinquième Symphonie, dite «Reformation», une œuvre plus austère pour laquelle trois trombones rejoignent les rangs de l’Orchestre de chambre d’Europe. Ce sont d’ailleurs ces instrumentistes, dans un unisson d’une belle plénitude, qui résonnent dès le début de cette symphonie. On sait qu’ici Mendelssohn utilise des thèmes religieux, notamment le fameux Amen de Dresde que Wagner citera aussi dans Parsifal. A chacune de ces reprises il est joué dans un pianissimo intense et habité de toute beauté. Le deuxième mouvement, presque primesautier, est lui aussi mené avec une élégance très séduisante: magnifique legato des cordes, pizzicati suspendus, bois d’une poésie rare, le tout s’évanouissant dans une fin aérienne. Le troisième mouvement, dont se souviendra curieusement un certain... Dimitri Chostakovitch, dévoile un étonnant passage fugué et permet d’écouter à nouveau la flûte, véritablement enchantée, de Clara Andrada. Le final, synthèse de l’œuvre, séduit par sa puissance assumée et jamais débridée, tout en embrasant l’œuvre de l’intérieur grâce à la direction flamboyante de Yannick Nézet-Séguin et à un orchestre somptueux. L’Orchestre de chambre d’Europe possède un sens de l’écoute et du jeu collectif qui sont la marque des meilleurs. A ce goût du jouer ensemble s’associent également des individualités de très haut niveau, largement sollicités dans cette musique, outre la flûte de Clara Andrada, principalement le hautbois de Kai Frömbgen, la clarinette de Romain Guyot, le basson de Matthew Wilkie, et le fascinant et subtil John Chimes qui joue avec de très fines mailloches sur de belles timbales d’origine viennoise.


Magnifiées par un chef exceptionnel et servies par un orchestre de très haut niveau, ces lectures vivantes, habitées, sans temps mort, élégantes et raffinées rendent pleinement justice à la musique de Mendelssohn. Un enregistrement de l’ensemble de ces Symphonies par ces interprètes doit bientôt paraître chez Deutsche Grammophon. Ces concerts parisiens permettent de penser qu’il s’agira sans doute d’une nouvelle intégrale de référence, au même titre que celle publiée en 1985 par le même éditeur, à savoir l’enregistrement de Claudio Abbado avec l’Orchestre symphonique de Londres.


Le concert en intégralité sur le site de la Philharmonie de Paris:






Gilles Lesur

 

 

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