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Sur le souffle

Strasbourg
Palais de la Musique et des Congrès
11/26/2015 -  et le 27* novembre 2015
Felix Mendelssohn : Ouverture «Les Hébrides», opus 26
Bechara El-Khoury : Concerto pour flûte et orchestre «Faraway Colours», opus 90 (création)
Franz Schubert : Symphonie n° 9, D. 944 «La Grande»

Emmanuel Pahud (flûte)
Orchestre philharmonique de Strasbourg, Hans Graf (direction)


E. Pahud (© Louisiana Music Videos)


Hans Graf fait partie de ces chefs de bon lignage que l’on aime regarder travailler. Avec des maîtres d’œuvre de cette trempe le concert devient l’extension naturelle d’un travail de répétition logique, la gestique venant clairement rappeler à tout moment l’essentiel de ce qui a été auparavant défriché, balisé, prémédité. Sans un mouvement parasite de trop, le comportement du chef devient partie intégrante du plaisir de perception d’une musique à la fois architecturée et sensible. Professeur de direction d’orchestre au Mozarteum de Salzbourg, fort d’une expérience qui l’a amené à tirer le meilleur de phalanges très diverses, depuis la musicalité ombrageuse d’un Orchestre national Bordeaux Aquitaine jusqu’à la mécanique fortement cuivrée d’un Orchestre de Houston, Hans Graf est assurément un atout maître dans la recette d’un concert consistant et satisfaisant.


Ces deux adjectifs conviennent bien à la Neuvième Symphonie de Schubert telle que la présentent les musiciens de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, suffisamment concentrés pour délivrer une prestation techniquement remarquable et surtout suffisamment détendus et sécurisés pour laisser s’épancher cette musique en souplesse. Reste un travail d’homogénéité des premiers violons à consolider (le son s’améliore déjà perceptiblement quand c’est la toute jeune Charlotte Juillard qui se démène à son poste de super-soliste) mais la qualité des équilibres et la recherche d’une écoute mutuelle, à mettre bien entendu aussi au crédit du travail préalable réalisé par le chef, sont très séduisants. De quoi faire passer en beauté les divines longueurs de l’œuvre...


Même constat dès les premiers accords de l’Ouverture «Les Hébrides» de Mendelssohn, plus usuellement dénommée par chez nous La Grotte de Fingal. Le modelé recherché à l’intérieur même des phrases de cordes installe de nombreuses couleurs dans ce tableau d’une nature toujours civilisée et stylisée (Mendelssohn reste avant tout un compositeur bien élevé et mesuré). Beaucoup de charme dans cet écoulement marin sans trop de turbulences, qui laisse à d’autres la tentation de lecture plus analytiques et radicales.


Après Isabelle Faust puis Cédric Tiberghien, c’est pour cette saison le flûtiste Emmanuel Pahud qui est invité à passer un peu de son temps aux côtés de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, en tant qu’artiste en résidence. Suivant de peu ce concert, c’est aussi en sa compagnie que les premiers pupitres de vents de l’orchestre donneront par exemple un fort joli programme de symphonies de chambre (Raff, Gounod). En attendant, c’est avec la création d’un concerto inédit que la résidence commence : le Concerto pour flûte et orchestre «Faraway Colours» du compositeur franco-libanais Bechara El-Khoury (commande conjointe du Philharmonique de Strasbourg et de Musique nouvelle en liberté), œuvre écrite sur mesure pour un flûtiste hors normes par sa puissance d’émission voire la richesse charnue des timbres qu’il réussit à faire sortir de son fragile instrument. Le début, portique qui recrute l’orchestre entier comme s’il s’agissait d’introduire un western américain de la grande époque, fait même figure de clin d’œil, avant l’entrée de ce héros qui n’a peur de rien. L’écriture, lisible, accessible, s’abstient cependant de trop de facilités et s’abrite à bon escient derrière l’aisance instrumentale du soliste. Pas vraiment de programme perceptible mais en tout cas une partition agréablement sonore et ludique, bel hommage à la flûte en tant que souffle sensible, poétique comme un fragment de nature transplanté au concert. La littérature concertante pour flûte contemporaine, voire du siècle dernier, est d’une si navrante parcimonie (pas même relativisée par un Jolivet systématiquement oublié), que cette œuvre intéressante est de toute façon la bienvenue, ne serait-ce que pour étoffer un tant soit peu ce tableau trop vide.


En bis, Pahud et l’orchestre reprennent la conclusion du concerto depuis la cadence, excellente démonstration de l’intérêt de pouvoir écouter une musique nouvelle une seconde fois dans la foulée, ce qui en révèle tout de suite mieux les beautés. Ensuite le public, très chaleureux, parvient encore à obtenir du soliste un Syrinx de Debussy d’une longueur de ligne et d’une richesse de couleurs à proprement parler stupéfiants.



Laurent Barthel

 

 

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