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Un concert en dents de scie

Paris
Philharmonie 2
12/04/2015 -  
Pierre Boulez : Sonatine pour flûte et piano (*)
Januibe Tejera : Flashforward I
Georges Aperghis : Champ-Contrechamp – Contretemps
Aurélio Edler-Copes : Como el aire
Helmut Lachenmann : Pression
Luciano Berio : Calmo

Donatienne Michel-Dansac (soprano), Sophie Cherrier (flûte), Eric-Maria Couturier (violoncelle), Sébastien Vichard (*), Dimitri Vassilakis (piano)
Ensemble tntercontemporain, Baldur Brönnimann (direction)


B. Brönnimann (© Felix Broede)


Natif d’Athènes et installé à Paris depuis 1963, Georges Aperghis fête ses 70 ans. En écartant les œuvres qui ressortissent au théâtre musical pour se focaliser sur la musique instrumentale (avec et sans voix), ce concert de la série «Grand soir» nous rappelle que celui qu’on traite communément de provocateur (préjugé dont souffrit également Mauricio Kagel) est avant tout compositeur.


Champ-Contrechamp (2010), pour piano et ensemble, mêle le soliste au groupe par le biais de textures inextricables faites d’une «multitude d’actions microscopiques». On a le sentiment d’assister au déploiement – qui se déchire par endroits – d’un délicat camaïeu aux couleurs (volontairement) ternes. Alors que n’apparaît aucune trace du conflit propre au concerto romantique, les inflexions et modes de jeu trahissent une certaine vocalité. Celle-ci est explicite dans la seconde pièce, Contretemps (2006), écrite pour la complice de toujours (championne des fameuses Récitations), la soprano Donatienne Michel-Dansac, ici en relative méforme. Certes, la prédominance du registre suraigu ne facilite pas la projection, mais la voix semble engorgée... et les bribes du texte incompréhensibles. Peut-être n’est-elle pas aidée par le volubile et contorsionné Baldur Brönnimann, accompagnateur peu attentionné bien que rythmicien accompli.


On garde un souvenir ému de Calmo, que Pierre Boulez avait donné dans le cadre du festival Agora 2004 en hommage au compositeur italien récemment disparu. Affublée de grelots aux chevilles et poignets, la remarquable mezzo Luisa Castellani investissait alors le champ sémantique des poèmes chers à Berio (de Homère à Sanguinetti) avec une émotion palpable et une sensualité ténébreuse. Autant de qualités absentes de l’interprétation de Donatienne Michel-Dansac qu’on a connue davantage expansive et musicienne. Mais possède-t-elle le timbre idoine pour cette musique aux teintes crépusculaires?


Deux autres «classiques» de la musique contemporaine étaient inscrits au programme de ce concert en dents de scie. La Sonatine de Boulez et Pression de Lachenmann. La première met à jour des problèmes d’équilibre entre le piano puissant de Sébastien Vichard, peu enclin à souligner la dimension féline du jeune – il avait 21 ans à l’époque – Français, entre arabesque debussyste et coups de griffe weberniens, et la flûte assez éteinte de Sophie Cherrier.


Plus convaincant, Pression permet à Eric-Maria Couturier de déployer tout son talent en faisant de cette pièce pour violoncelle de sept minutes autre chose qu’un simple manifeste pour la «musique concrète instrumentale»: «l’œil écoute», selon les volontés du compositeur, qui demande que l’interprète joue de mémoire ou, comme ici, dispose la partition à ses pieds afin de permettre au public d’observer la fascinante déconstruction des timbres. Une exécution musclée, favorisée par la préhension athlétique de Couturier, placé debout derrière son instrument.


La jeune génération était représentée par deux compositeurs brésiliens: à Flashforward I de Januibe Tejera, aux sonorités pulvérisées qui attestent l’influence des saturationnistes français, on préfère Como el aire d’Aurélio Edler-Copes (ancien élève de Georges Aperghis), une fascinante étude sur le transitoire (le relais timbrique entre l’archet frottant la note du vibraphone, le piccolo et l’accordéon). Une musique qui vit, respire, en même temps qu’un condensé d’énergie subtilement dosé par les musiciens de l’Ensemble intercontemporain.


Le site de Georges Aperghis
Le site de Januibe Tejera
Le site d’Aurélio Edler-Copes
Le site de Baldur Brönnimann



Jérémie Bigorie

 

 

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