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Chicago latin Chicago Orchestra Hall, Symphony Center 09/24/2015 - et 25, 26, 29* septembre 2015 Emmanuel Chabrier : Espana
Alberto Ginastera : Concerto pour harpe et orchestre, opus 25
Gustave Charpentier : Impressions d’Italie
Maurice Ravel : Boléro
Xavier de Maistre (harpe)
Chicago Symphony Orchestra, Riccardo Muti (direction)
X. de Maistre, R. Muti
Pour le mélomane, tout séjour à Chicago passe immanquablement par un concert du Chicago Symphony Orchestra (CSO) et une représentation au Lyric Opera, deux institutions musicales phares des Etats-Unis. Fondé en 1891, le CSO a longtemps été une formation de tradition allemande. Directeur musical depuis 2010, Riccardo Muti apporte dans la capitale de l’Illinois la lumière et le chant italiens, ainsi qu’un certain lyrisme méditerranéen, à l’image du programme qu’il vient de donner fin septembre, à l’occasion de quatre concerts. Un programme certes léger, sans véritable pièce de résistance, mais original et inhabituel, en hommage à la musique latine. Le célèbre Boléro de Ravel, qui a terminé la soirée, a permis de mettre en valeur les qualités indéniables des musiciens solistes, le maestro ayant assoupli sa baguette de fer, s’effaçant presque, pour laisser pleinement s’exprimer les instrumentistes. Des musiciens, soit dit en passant, qui n’avaient plus de contrat au moment des concerts, les négociations avec la direction s’étant retrouvées dans l’impasse. Le CSO a beau faire partie des « Big 5 » américains, il n’est pas épargné par les difficultés financières. Fort heureusement, on apprenait quelques jours plus tard qu’un accord avait été trouvé et que de nouveaux contrats avaient finalement pu être signés.
La soirée a débuté dans la verve et l’exubérance avec Espana de Chabrier. Son lumineux, soyeux des cordes, diversité des couleurs, bois précis... la réputation du CSO n’est plus à démontrer. Le concert s’est poursuivi avec le Concerto pour harpe et orchestre de Ginastera, une partition que le compositeur argentin a mis huit ans à écrire, avec de surcroît un choix d’instrument plutôt rare pour un premier concerto. L’occasion pour le harpiste français Xavier de Maistre de faire ses débuts – très remarqués – avec le CSO. Largement inspirée par le folklore argentin, cette œuvre originale permet à la harpe de déployer toute ses possibilités, passant de la douceur à laquelle on associe généralement l’instrument à une violence inhabituelle des traits, devenant quasiment percussion puisque le soliste doit frapper la table de son instrument. Avec son jeu raffiné et élégant, très expressif, mais qui sait aussi être passionné et énergique, sans parler de sa virtuosité technique dans des glissandi époustouflants de maîtrise, Xavier de Maistre a ébloui le public. La complicité avec le chef était évidente, mais Riccardo Muti n’a pas pu empêcher les musiciens de couvrir parfois le soliste, surtout dans le premier mouvement, quand bien même la harpe était sonorisée.
Après l’entracte, le concert s’est poursuivi avec une partition très rarement interprétée de Charpentier, Impressions d’Italie. Une œuvre pas forcément des plus inspirées, il faut bien l’admettre, sa seule raison de figurer au programme étant que le CSO en avait assuré la première américaine en 1893. En cette saison du cent vingt-cinquième anniversaire de l’orchestre, chaque concert comprend une partition dont l’orchestre a été le premier exécutant aux Etats-Unis. Il faut attendre la tarentelle napolitaine finale pour voir le maestro (originaire de la région de Naples) s’animer et communiquer son enthousiasme aux musiciens. Comme on pouvait s’y attendre, le Boléro a déclenché des applaudissements enthousiastes du public et une ovation debout qui s’est très rapidement propagée à toute la salle. Une salle qui, curieusement pourtant, comptait de nombreux fauteuils vides, l’addition du Boléro et de Muti n’ayant pas réussi à la remplir.
Claudio Poloni
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