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Aïda presque minimaliste Roma Teatro Costanzi 04/23/2015 - et 24, 26, 28, 29, 30 avril, 2, 3* mai 2015 Giuseppe Verdi : Aida Luca Dall’Amico (Il Re), Anita Rachvelishvili/Raffaella Angeletti* (Amneris), Csilla Boross/Maria Pia Piscitelli/Hui He* (Aida), Fabio Sartori/Yusif Eyvazov/Dario Di Vietri (Radames), Giovanni Meoni/Kiril Manolov (Amonasro), Roberto Tagliavini (Ramfis), Antonello Ceron (Un messager), Simge Büyükedes (Une prêtresse), Ballet de l’Opéra du Teatro dell’Opera de Rome
Coro del Teatro dell’Opera, Roberto Gabbiani (chef du chœur), Orchestra del Teatro dell’Opera, Jader Bignamini (direction musicale)
Micha van Hoecke (mise en scène, chorégraphie), Carlo Savi (décors, costumes), Vinicio Cheli (lumières)
Après une ouverture de saison, en décembre dernier, avec Rusalka, un titre plutôt rare dans la péninsule, et une incursion dans le romantisme français en janvier sous le signe de Werther, l’Opéra de Rome revient à ce qui constitue le cœur de son répertoire. Après une reprise de Rigolettoen février, c’est Aïda que l’institution présente dans une nouvelle production réglée par Micha van Hoecke, qui signe également la chorégraphie, où s’illustre le ballet de la maison, et en particulier Alessio Rezza en esclave maure et le guerrier Giuseppe Depalo au deuxième acte. Dans la beauté plastique baignée souvent de fragrances bleutées se signale l’empreinte de la carrière initiale de l’artiste belge, quand d’aucuns pourraient y déceler quelques souvenirs wilsoniens. La primauté accordée au visuel ne dédaigne pas cependant quelques soupçons d’humour, perceptibles dans les séquences dansées. Sans refuser absolument la pompe inhérente l’ouvrage, la scénographie imaginée par Carlo Savi s’abstient de la surcharge illustrative où le premier degré voudrait limiter le drame qui en occulterait alors la dimension intimiste, portée entre autres par les duos qui le parcourent. Les atmosphères distillées par les lumières de Vinicio Cheli soulignent la relative sobriété des décors, qui ne craint pas un certain dépouillement dans les numéros entre Aïda et Radamès. A défaut de creuser une direction d’acteurs parfois modeste, la mise en scène évite le péplum monolithique, et rend sensibles les tensions sentimentales au cœur de l’intrigue.
Remplaçant au pied levé Maria Pia Piscitelli dans le rôle-titre pour la dernière en matinée, Hui He équilibre puissance vindicative et tendresse dans une composition nuancée qui approche la subtilité. Les notes et les affects, de nature généralement picturale, ne manquent point à l’appel, et la crédibilité non plus. Face à elle, le Radamès de Yusif Eyvazov démontre une ampleur et un éclat indéniables, qui s’allient de manière convaincante avec la composition de sa partenaire. L’Amnéris de Rafaella Angeletti n’échappe au caractère impérieux de son personnage, qu’elle ne condamne pas à la caricature. Le roi de Luca Dall’Amico affirme une présence aussi noble que la vocalité, quand Kiril Manolov n’appuie pas inutilement la noirceur d’Amonasro. Mentionnons encore le Ramfis de Roberto Tagliavini, ainsi que l’intéressante prêtresse de Simge Büyükedes et le messager dévolu à Antonello Ceron. On ne saurait oublier les chœurs, efficacement préparés par Roberto Gabbiani, ni la direction énergique de Jader Bignamini, au diapason d’un spectacle, qui évite de réduire la partition à ses interventions cuivrées.
Gilles Charlassier
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