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La musique avant tout

Madrid
Teatro Real
04/20/2015 -  et 21, 23, 24, 25, 26, 27*, 28, 29, 30 avril, 2, 3, 5, 6, 7, 8, 9 mai 2015
Giuseppe Verdi: La traviata
Ermonela Jaho*/Irina Lungu/Venera Gimadieva (Violetta Valéry), Francesco Demuro*/Antonio Gandía/Teodor Ilincái (Alfredo), Juan Jesús Rodríguez*/Angel Odena/Leo Nucci (Giorgio Germont), Marifé Nogales (Flora Bervoix), Marta Ubieta (Annina), Albert Casals (Gastone), Fernando Radó (Dr. Grenvil), Alejandro González (Giuseppe), Damián del Castillo (Obigny), César San Martín (Douphol)
Coro y Orquesta titulares del Teatro Real (Coro Intermezzo/Orquesta Sinfónica de Madrid), Andrés Máspero (chef de chœur), Renato Palumbo (direction musicale)
David McVicar (mise en scène), Marie Lambert (reprise de la mise en scène), Tanya McCallin (décors et costumes), Andrew George (chorégraphie), Jennifer Tipton (lumières)


E. Jaho, F. Demuro (© Javier del Real/Teatro Real)


Plusieurs questions se posent face à cette coproduction du Liceu de Barcelone, l’Opéra de Glasgow, le Welsh National Opera de Cardiff et le Teatro Real. Que faire aujourd’hui de l’histoire de Violetta Valéry vue par Verdi et Piave (et Dumas, bien sûr)? Les trois opéras à grand succès d’après les années de galère, époque conclue par Luisa Miller et Stiffelio, ne sont guère propices au renouvellement de l’icône. Voici longtemps que l’obsession des metteurs en scène pour le gangstérisme dans Rigoletto – une belle idée la première fois, mais trop c’est trop –, Le Trouvère oppose une résistance obstinée à l’imagination des metteurs en scène et La Traviata n’admet que quelque variations visuelles sur le même thème. C’est comme si Wagner était moins difficile à traiter, même pour ses descendants, éloignés aujourd’hui de la tutelle du Graal – mais quand même pas de son profit...


Une de ces variations est la mise en scène qu’on a vue au Teatro Real, signée McVicar, mais réalisée par Marie Lambert. Conventionnelle? Certainement, mais pas banale (grâce aux trois protagonistes). Avec un mauvais goût imprévu dans ces grands, énormes rideaux noirs annonçant l’évidence: Violetta est morte, Violetta mourra à la fin de la pièce (tout comme la mort du roi d’Ionesco est annoncée dès les premiers mots: «Tu vas mourir dans une heure et demie, tu vas mourir à la fin du spectacle.»). L’évidence est l’ennemie du drame. Et la mise de McVicar et Lambert mène de l’évidence à l’encrassement des situations, qui mènent, justement, à la mort. Les meilleures situations dramatiques de La Traviata (par exemple, le formidable ensemble de la fin du deuxième acte) et les pires (une bonne partie du premier tableau du même acte) sont conditionnées ou malmenées à cause de cette annonce de mort permanente: dire «tu vas mourir» au début de la pièce et montrer le deuil sans cesse, pendant deux heures de musique, par des énormes rideaux noirs toujours présents, de crépons noirs persistants, ce sont deux choses différentes. La chorégraphie du divertimento du deuxième acte est assez pauvre et risible.


Mais assez d’une mise en scène certes pas insultante, mais décevante. Car – heureusement – l’inteprétation musicale a été excellente. On sait bien que La Traviata est un opéra pour trois solistes et un ensemble vocal d’où surgissent parfois des voix individuelles. L’Albanaise Ermonela Jaho a offert une prestation théâtralement impeccable et vocalement supérieure du point de vue vocal. Son filato, sa capacité à chanter piano, pour les dynamiques inférieures, pour un «chuchotement chanté», pour ainsi dire, sont étonnants, tout comme son beau vibrato. Son monologue du premier acte – un petit opéra en soi –, ses sourdes plaintes au troisième, la construction vocale de son rôle montrent que cette soprano est une de voix les plus importantes d’aujourd’hui. Le ténor cerdan Francesco Demuro supporte bien la comparaison avec sa partenaire, par la belle couleur de sa voix, la qualité de son medium et ses aigus, voire son talent de comédien. Le Madrilène Juan Jesús Rodríguez (Posa, Rigoletto, Iago, etc.), formidable présence et voix ronde et riche entre le medium et le grave, complète la distribution en Germont père; il doit relever le défi d’être comparé avec Nucci, à l’affiche dans une autre distribution, mais à ce qu’on y entend, la comparaison ne lui est pas du tout défavorable. Et il a été applaudi d’une façon spécialement chaleureuse par un public d’habitude assez peu complaisant avec ses compatriotes, au-delà des grands noms bien connus.


Le Chœur, dirigé par Máspero, a été comme un véritable quatrième personnage du drame, bien mené comme une voix collective, mais aussi – il faut le souligner – très bien mené du point de vue des mouvements de vérité théâtrale. Renato Palumbo a dirigé de façon détaillée, peut-être même analytique, mais aussi avec de l’intensité, souple et dramatique au même temps. Toutes les vertus musicales des solistes et du chœur ont été placées entre les mains d’un vrai maestro, et aussi d’un artiste. Une très belle soirée d’opéra, surtout du point de vue de la musique. Les dates des représentations permettent voir qu’on a l’intention d’attirer plus de public que d’habitude. Bonne chance!



Santiago Martín Bermúdez

 

 

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