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Le triomphe de Tristan

Toulouse
Théâtre du Capitole
01/28/2015 -  et 1er*, 4, 8, 11 février 2015
Richard Wagner : Tristan und Isolde
Robert Dean Smith (Tristan), Elisabete Matos (Isolde), Daniele Sindram (Brangaene), Stefan Heidermann (Kurwenal), Hans-Peter König (Le roi Marc), Thomas Dolié (Melot), Paul Kaufmann (Un jeune marin, Un berger), Jean-Luc Antoine (Un pilote)
Chœur du Capitole de Toulouse, Alfonso Caiani (chef de chœur), Orchestre national du Capitole de Toulouse, Claus Peter Flor (direction musicale)
Nicolas Joel (mise en scène), Andreas Reinhardt (décors et costumes), Vinicio Cheli (lumières)


E. Matos, D. Sindram, S. Heidermann (© Patrice Nin)


Créé en 2007 par Nicolas Joel alors qu’il était encore à la tête de la maison toulousaine, le Tristan et Isolde repris cette saison répond à un évident et sobre classicisme où la mise en scène se fige parfois – l’ascension du globe lunaire au premier acte, le dais étoilé au deuxième, un rocher suspendu comme un aérolite au dernier. La scénographie sacrifie çà et là à quelques discrètes touches de mise au goût du jour, en particulier dans les costumes marins dessinés par Andreas Reinhardt, évitant ainsi de prendre la poussière de la légende, ou encore dans les fort littérales oscillations des latéralités de la proue du navire, censées reproduire les vagues, avec une régularité de métronome plus que de nature. Les lunettes de Brangaene semblent empruntées à Bernadette Chirac, et les collants rouges avec escarpins assortis d’Isolde, à Austrian Airlines – vermillon qui passe à la robe au troisième acte. La mort d’amour distille une indéniable poésie, avec sa lumière d’aube.


Mais l’intérêt converge avant tout vers une solide distribution vocale, dominée par le Tristan de Robert Dean Smith. Si le ténor américain ne possède pas le volume brut de certains de ses confrères, son héroïsme n’a point à en pâlir, et son endurance encore moins. Sa constance tout au long de la soirée force l’admiration, d’autant qu’il prend soin de ne pas laisser l’impression d’économiser son énergie pour le redoutable récit sur la plage de Karéol, sans oublier un timbre mouillé doué d’un sens de la nuance qui passe aisément – et à juste titre – pour une intelligence du mot. En somme, l’un des meilleurs Tristan du moment, qui ne donne aucun signe de déclin. Souvent décriée depuis sa contre-performance à Strasbourg en Genièvre dans Le Roi Arthus, Elisabete Matos surprend agréablement en Isolde ceux qui craignaient les béances de son vibrato, oubliant au passage que l’écriture de Chausson, pour avoir puisé chez Wagner, n’a rien de comparable avec celle de l’héroïne du maître de Bayreuth. La largeur de l’émission lui permet d’assurer la partie sans trop de faiblesse, et recouvre ce qui dans d’autres rôles serait disgracieusement à découvert. L’on notera cependant une perfectibilité dans l’aigu, sensible dans la scène finale, en raison sans doute de la fatigue, comme d’un relatif défaut de souplesse de l’instrument, limitant le spectre expressif à une impérieuse souveraineté.


Daniele Sindram affirme une Brangaene d’une vigueur sans faille. Stefan Heidermann démontre en Kurwenal une puissance remarquable, où s’engouffre la soif de revanche à l’arrivée des navires du roi au dernier acte. Connu des Parisiens grâce au Ring de la Bastille, Hans-Peter König rivalise avec les plus grands Marke d’aujourd’hui. Sa lamentation concentre sa déception et son humanité dans une ampleur et une générosité vocale aux confins de l’excellence: nul besoin de forcer pour mettre en avant une présence de premier plan. Thomas Dolié assure les interventions perfides de Melot, quand Paul Kaufmann se montre honnête tant en jeune marin qu’en berger, et Jean-Luc Antoine s’acquitte des quelques notes du pilote. Préparés par Alfonso Caiani, les chœurs soutiennent l’arrivée du roi. A la tête de l’Orchestre national du Capitole, Claus Peter Flor ménage une belle consistance dans les textures, appui d’une lecture dynamique, qui galbe la matière sonore comme une glaise vivante, au risque de se laisser aller çà et là à quelques excès relativement indolores.



Gilles Charlassier

 

 

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