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Paysages ravéliens

Bordeaux
Auditorium Dutilleux
11/22/2014 -  
Maurice Ravel : Ma Mère l’Oye – Valses nobles et sentimentales – Gaspard de la nuit – Pavane pour une infante défunte
Vanessa Wagner (piano)
Davide Quayola, Natan Sinigaglia (vidéo), Benoît Simon (directeur technique)


Chaque année depuis onze ans, Novart fait rimer novembre avec nouveauté. Ce festival désormais bien établi dans la vie culturelle bordelaise met à l’honneur les arts de la scène dans toute leur diversité – théâtre, danse, musique, performances – poussant les limites des genres dans leurs retranchements, à l’exemple du Pierrot lunaire de Schönberg mis en perspective avec le cabaret berlinois des années vingt et trente au Grand-Théâtre, ou Je danse et je vous en donne à bouffer, un spectacle chorégraphique et culinaire au Théâtre national de Bordeaux Aquitaine, renouant avec la tradition gastronomique de la région. «Ravel Landscapes», le concert vidéographique donné par Vanessa Wagner à l’Auditorium Dutilleux, en est un autre remarquable avatar, créé en 2013 à la Cité de la Musique et à l’Arsenal de Metz.


Davide Quayola et Natan Sinigaglia ont ainsi imaginé aux partitions jouées par la pianiste française sur Steinway, un contrepoint visuel réglé par Benoît Simon. Le jeu équilibré n’a point besoin d’ostentation pour distiller la magie envoûtante des miniatures de Ma Mère l’Oye. Si la technique du dispositif semble s’être momentanément égarée avec le «Petit Poucet», laissant, sans trop de préjudice – tant la page scintille de fantaisie exotique jamais excessive – «Laideronnette, impératrice des pagodes», sous un écran noir, l’animation des lignes dans «Les Entretiens de la Belle et la Bête» fait vivre, avec un beau sens de l’abstraction poétique où se lit quelque lointain écho de Cocteau, la grâce et les emportements maladroits des deux protagonistes.


Une semblable géométrie ludique illustre les Valses nobles et sentimentales, livrées avec une élégante fluidité, aussi sensible à la logique du cycle qu’à la caractérisation des pièces. Mais cette musicalité fine donne sa pleine mesure dans un Gaspard de la nuit plus intérieur que sombre. Avec un art consommé des atmosphères, Vanessa Wagner restitue le climat de chacune des trois parties – «Ondine», «Le Gibet» et «Scarbo» – où la virtuosité de ce qui est souvent vu comme un Everest pianistique n’asservit jamais l’émotion, et tresse une subtile intelligibilité de la partition. Les projections graphiques constituent, à ce titre, un appréciable complément d’appui, où l’esthétique n’a nul besoin de céder au didactisme. La Pavane pour une infante défunte referme ce voyage au cœur des paysages ravéliens sous le signe reconnaissable de cette mélancolie doucement détachée qui distingue l’inspiration du compositeur français. Vanessa Wagner en est une des plus délicates et attachantes passeuses, et ce concert où les sons et les images se répondent un admirable parcours.



Gilles Charlassier

 

 

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