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On s’ennuie au sérail

Paris
Palais Garnier
10/16/2014 -  et 19, 22*, 24, 27, 29 octobre, 1er, 5, 8 novembre 2014, 21, 24, 26, 29 janvier, 1er, 4, 7, 10, 12, 15 février 2015
Wolfgang Amadeus Mozart : Die Entführung aus dem Serail, K. 384
Jürgen Maurer*/Erol Sander (Selim), Erin Morley*/Albina Shagimuratova (Konstanze), Anna Prohaska*/Sofia Fomina (Blonde), Bernard Richter*/Frédéric Antoun (Belmonte), Paul Schweinester*/Michael/Laurenz (Pedrillo), Lars Woldt*/Maurizio Muraro (Osmin)
Orchestre et Chœurs de l’Opéra national de Paris, Philippe Jordan*/Marius Stieghorst (direction musicale)
Zabou Breitman (mise en scène)


(© Agathe Poupeney/Opéra national de Paris)


Pas d’Enlèvement au sérail à l’Opéra depuis bientôt trente ans : une nouvelle production s’imposait. Sa médiocrité, malheureusement, l’empêche de faire date. Pour sa première mise en scène d’opéra, loin de vouloir délivrer un message, Zabou Breitman ne va pas au-delà d’une turquerie au comique convenu. Se référer au cinéma muet des années 1920 ne suffit pas à créer un décalage : on en reste à un premier degré de l’orientalisme – rien n’y manque, du casque colonial de Belmonte aux danseuses orientales dont les déhanchements régalaient le touriste. La pauvreté du propos va de pair avec le kitsch de la réalisation, dans des décors carton-pâte du regretté Jean-Marc Stehlé. Ca se regarde, c’est coloré, ça peut faire sourire, avec quelques gags façon Deschiens, mais la direction d’acteurs livre souvent les chanteurs à eux-mêmes, très en deçà des enjeux du Singspiel mozartien. La vérité du drame intérieur vécu par Konstanze, en particulier, n’apparaît guère à travers ce gentil artisanat : le Quatuor du deuxième acte, par exemple, où la jalousie, le doute jettent une ombre sur l’amour, reste scéniquement pauvre. Quand Zabou Breitman esquisse quelques pistes, comme une révolte des femmes, qui pourrait rappeler un peu les Lettres persanes, elle s’arrête en chemin. Bonne idée, en tout cas, que ce vieux portier famélique, incarnation d’un Orient éternel, à la fois sage et complice, antithèse d’Osmin. Cela dit, pour faire court : un coup d’essai, pas un coup de maître.


La production laisse d’autant plus sur sa faim que la musique ne comble pas les attentes. Disons-le tout net : on s’ennuie. Si Philippe Jordan joue sur la fluidité de la pâte et la légèreté des attaques, il attend la seconde partie – après le célèbre « Martern aller Arten » de Konstanze – pour trouver un peu ses marques et faire jouer, sans beaucoup les tendre, les ressorts du théâtre. Le beau Tamino de Bernard Richter ne se réincarne guère dans ce Belmonte franc et solide, volontiers nuancé, mais très inégal, parfois raide d’émission et de phrasé, que « Ich baue ganz » met à la peine au début du troisième acte. Il manque aussi à l’honnête Konstanze d’Erin Morley le rayonnement, la flamboyance virtuose des grandes interprètes du rôle, un des plus périlleux des grands opéras mozartiens, dont elle assume, plus qu’elle ne les transcende, les difficultés – la vocalise n’est pas seulement décoration brillante, elle exprime une vérité de l’âme, en particulier dans le défi de « Martern aller Arten ». Beaucoup moins exposé, bien stylé, le couple de valets tire son épingle du jeu : avec un petit filet de voix, au médium quasi inexistant, mais un suraigu facile, Anna Prohaska est une Blonde pétulante, Paul Schweinester un Pedrillo impétueux ou tendre. L’Osmin de Lars Woldt ? Disqualifié, malgré sa truculence jamais débraillée, par un registre grave inaudible. Reste le Pacha de Jürgen Maurer, familier du rôle, à la fois éperdu et digne qui, étant comédien, ne pâtit pas des insuffisances de la mise en scène.

Une seconde distribution, un second chef prennent le relais en janvier.



Didier van Moere

 

 

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