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Couleurs évocatrices

Geneva
Grand Théâtre
10/09/2014 -  et 11, 13*, 15, 17, 19 octobre 2014
Piotr Ilitch Tchaïkovski : Eugène Onéguine, opus 24
Doris Lamprecht (Madame Larine), Maija Kovalevska (Tatiana), Irina Shishkova (Olga), Stefania Toczyska (Filippievna), Michael Nagy (Eugène Onéguine), Edgaras Montvidas (Lenski), Vitalij Kowaljow (Le Prince Grémine), Michel de Souza (Un capitaine), Harry Draganov (Zaretski), Raùl Giménez (Monsieur Triquet)
Chœur du Grand Théâtre de Genève, Alan Woodbridge (préparation), Orchestre de la Suisse Romande, Michail Jurowski (direction musicale)
Robert Carsen (mise en scène), Paula Suozzi (reprise de la mise en scène), Michael Levine (décors et costumes), Jean Kalman (lumières), Christine Binder (reprise des lumières), Serge Bennathan (chorégraphie)


(© GTG/Carole Parodi)


La production d’Eugène Onéguine actuellement à l’affiche du Grand Théâtre de Genève arrive tout droit du Metropolitan Opera de New York, où elle a été créée en 1997. Le spectacle conçu par Robert Carsen est d’une beauté sidérante, un régal pour les yeux : dans un décor pratiquement nu constitué de trois immenses parois, sans accessoires ou presque – si ce n’est des troncs d’arbre, des feuilles mortes, un lit, des tables et des chaises –, les magnifiques éclairages de Jean Kalman, repris ici par Christine Binder, plongent le plateau dans des tons successivement orangés, bleutés, gris et verts, créant autant d’atmosphères différentes. La scène du duel, pendant le début de laquelle les visages des protagonistes ne sont pas visibles, est particulièrement saisissante. On admire aussi les superbes costumes d’époque de Michael Levine. Par contre, à la différence d’autres spectacles du metteur en scène canadien, la direction d’acteurs reste sommaire et les personnages ne sont pas véritablement caractérisés. L’auraient-ils été davantage si Robert Carsen était venu personnellement régler la reprise de sa production plutôt que de confier l’entreprise à une assistante ? La question reste ouverte.


Le second atout de cette reprise est sa crédibilité dramatique, avec des chanteurs qui ont pratiquement l’âge de leur personnage, ce qui confère fraîcheur et vérité au spectacle. La distribution vocale est dominée par le splendide Lenski d’Edgaras Montvidas, qui offre un « Kuda kuda vi udalilis » d’anthologie, avec son chant incandescent, paré de belles nuances, ainsi que son phrasé élégant, sans parler d’une incarnation scénique où l’émotion le dispute à la fougue et à la passion. On en vient à regretter que son rôle soit si court ! Pour une fois, le Prince Grémine n’est pas interprété par un chanteur en fin de carrière, à la voix usée et chevrotante. On apprécie par conséquent d’autant plus la prestation de Vitalij Kowaljow, au timbre aristocratique et à la noble prestance. Michael Nagy livre une belle incarnation scénique du rôle-titre, dandy hautain et blasé, à la limite de la perversité, mais vocalement sa performance est plutôt discrète, manquant quelque peu de rayonnement. Maija Kovalevska interprète Tatiana : cette jeune chanteuse, non dépourvue de talent, possède une belle voix saine, ronde et pleine sur toute la tessiture, elle a aussi toutes les notes de la partition, mais à aucun moment son chant ne bouleverse les spectateurs, et la célèbre scène de la lettre ne dégage pratiquement pas d’émotion. Les rôles secondaires sont, quant à eux, très bien tenus, avec notamment la magnifique Olga d’Irina Shishkova et la Filippievna aux graves corsés de Stefania Toczyska. En Monsieur Triquet, Raùl Giménez donne une leçon de style, même si la voix a désormais subi les ravages du temps. Dans la fosse, Michail Jurowski offre une lecture fine et délicate de la partition de Tchaïkovski, en en faisant ressortir les moindres détails, et tire des musiciens de l’Orchestre de la Suisse Romande des élans lyriques et passionnés, sans jamais pour autant tomber dans le pathos. Globalement, un Eugène Onéguine de belle tenue, qui a ravi le public genevois.



Claudio Poloni

 

 

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