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03/15/2001 Maurice Fleuret : une politique démocratique de la musique
Anne Veitl, Noémi Duchemin Comité d'histoire du ministère de la culture (diffusion à la Documentation française), 2000, 472 p. 148 F, (22,56 €).
A l'heure où différents aspects de la politique musicale font régulièrement la Une des médias (future grande salle de concert ou enseignement musical à l'école, entre autres dossiers chauds), ce livre a le mérite de rappeler en quoi consiste l'action dans ce domaine. Et cela au travers d'une figure emblématique, celle de Maurice Fleuret.
Critique, musicien, animateur, militant de la musique et singulièrement de la musique contemporaine, il a marqué tout le paysage musical français dans les années quatre-vingts, de 1981 à 1986 plus particulièrement, années au cours desquelles il fut directeur de la musique et de la danse au Ministère de la culture et où il put mettre en pratique ses idées les plus marquantes. Idées toujours fondées sur une double articulation : favoriser l'expression individuelle de la musique mais aussi prendre en compte les dimensions sociales et collectives de la pratique musicale. Cet ouvrage, dû à deux chercheuses en sciences politiques, est un ouvrage d'histoire culturelle. C'est dire qu'il est par certains côtés austère et technique. Il n'en est pas moins facile à lire, car très bien construit, avec de nombreuses subdivisions et des intertitres qui en facilitent l'accès ; il est aussi très vivant car il fait prendre conscience que beaucoup de phénomènes, d'institutions, d'évènements, de tendances qui font aujourd'hui totalement partie du paysage musical français ont vu le jour à cette époque. On redécouvre ainsi avec plaisir et intérêt la genèse de la Fête de la musique, de l'Ircam ou bien encore de l'Opéra Bastille ! On comprend comment le grand mouvement d'ouverture vers toutes les musiques s'est produit à cette époque, où Maurice Fleuret a tant milité en ce sens.
On découvre surtout une magnifique figure : un homme de passion, de conviction et de talent qui a mis toute sa vie au service de la musique, professant que "la création artistique n'est pas l'ornement de la société, elle en est la conscience". Le livre fait la part belle à ses textes, quelques récits autobiographiques souvent émouvants, une trentaine d'extraits de ses articles du Nouvel Observateur, passionnés, virulents et polémiques, mais dont la justesse et la hauteur de vue frappent aujourd'hui encore. Et on prend conscience de l'immense travail qu'il a accompli en faveur de la création musicale, lui qui déclarait à ses détracteurs l'accusant de ne pas consacrer son article de la semaine à tel célèbre interprète que "l'événement hebdomadaire sera toujours la création d'une œuvre nouvelle, quoiqu'il se passe ailleurs". On ne saurait être plus clair !
Ce livre est donc un beau portrait d'un homme qui a tout fait pour inscrire la musique dans son temps.
Florence Trocmé
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